L'Académie de médecine contre la banalisation du cannabis

Publié le 10/06/2003
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L'Académie nationale de médecine attire de nouveau l'attention des pouvoirs publics « sur la nécessaire promotion de mesures concrètes mettant la population en garde contre toute banalisation de l'usage de cannabis ».

« A cet effet, il paraît essentiel que soit diffusée une information objective sur les altérations de la santé que peut entraîner sa consommation », écrit le Dr Roger Nordmann, président de la commission Troubles mentaux-Toxicomanies, dans un avis adopté à l'unanimité le 27 mai. Et de dénoncer « la diffusion d'informations souvent biaisées » et contrecarrant « les efforts de prévention », selon lesquelles le cannabis « serait beaucoup moins dangereux » que l'alcool ou le tabac.
« Nul ne saurait nier que les conséquences » des boissons alcoolisées et du tabac « sont, pour l'instant, beaucoup plus sévères, notamment en termes de mortalité, que celle du cannabis », affirme l'académicien. « Cependant, (le cannabis) ne résulte pas d'un libre choix délibéré des adolescents et des jeunes qui les conduirait à (en) consommer en lieu et place de l'alcool et/ou du tabac. Les données épidémiologiques ont établi qu'aussi bien la simple "expérimentation" que la consommation régulière ou intensive ont généralement été précédées et sont accompagnées de l'usage de tabac et d'alcool (...) Il convient de souligner encore que le cannabis étant le plus souvent fumé en association avec le tabac n'est pas un moyen de lutter contre la dangerosité de ce dernier. Il ne fait qu'ajouter son propre pouvoir cancérogène, lequel est particulièrement élevé (...) D'autre part, les travaux expérimentaux récents indiquent que le cannabis est susceptible d'augmenter l'appétence envers l'alcool.  »
En conséquence, « sans se substituer aux actions concernant l'alcool et le tabac, les messages de prévention doivent éviter de contribuer à la banalisation d'une troisième substance psychoactive, le cannabis, dont l'usage se surajouterait dans la plupart des cas aux deux autres ». « Le concept de comparaison de la dangerosité des drogues, largement repris par les médias, paraît, dans cette optique, particulièrement nocif et inadapté. La plus grande vigilance doit être exercée à cet égard », conclut le Dr Roger Nordmann.

Ph. R.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7350