TRAITER de façon intensive les diabétiques de type 1 permet de limiter les risques de micro- ou de macroangiopathie, sans pour autant entraîner à long terme de troubles de la cognition. En dépit des résultats de l'étude DCCT en 1996 qui prouvaient son efficacité sur la prévention des complications, les traitements comportant au moins trois injections d'insuline par jour ou la mise en place d'une pompe externe ne sont pas encore généralisés. La principale raison avancée : le risque de lésions neurologiques en rapport avec les épisodes de baisse de la glycémie.
Des études animales ont en effet prouvé qu'un épisode d'hypoglycémie profonde (glycémie inférieure à 1 mmol/l) peut s'accompagner d'une baisse massive des réserves énergétiques cellulaires, ce qui pourrait conduire à une nécrose neuronale. Une baisse moins importante de la glycémie (entre 2,8 et 3,6 mmol/l) peut, pour sa part, interrompre de façon transitoire les connexions neuronales et, de ce fait, induire un risque de troubles cognitifs associés. Ces troubles pourraient être à l'origine d'une majoration du risque corporel (accidents domestiques ou de voiture). Dans ces conditions, les craintes de l'impact à long terme des épisodes d'hypoglycémie associés au traitement intensif du diabète semblaient justifiées.
Suivi pendant 18 ans.
Les participants du groupe DCCT/EDIC ont été suivis pendant dix-huit ans. La plupart des 1 144 personnes ont été incluses entre 1983 et 1989. Dans ce groupe de patients âgés de 13 à 39 ans au moment de l'inclusion, 711 patients avaient été tirés au sort pour recevoir le traitement intensif. En 1993, en fin d'étude, il a été recommandé à l'ensemble des participants de l'étude de suivre ce type d'insulinothérapie en raison de la supériorité de ce traitement sur le traitement habituel rapporté dans les premières publications. A cette date, 1 375 des 1 428 survivants de l'inclusion initiale ont accepté de participer à l'étude EDIC observationnelle qui a duré douze ans. En fin de suivi, l'âge des patients allait de 29 à 62 ans (âge moyen 45,7 ans). La seule différence significative entre les deux groupes, initialement tirés au sort, tenait à l'incidence des rétinopathies (89 % dans le groupe traitement intensif contre 97 % dans le groupe traitement conventionnel). Fin 2005, 3 patients (un du groupe traitement intensif et 2 dans le groupe traitement conventionnel) ont présenté au moins un AVC ; la vue de cinq des patients (un du premier groupe et 4 du second) avait baissé significativement ; 20 sujets étaient devenus insuffisants rénaux (7 contre 13).
Pendant les dix-huit années de suivi, un total de 1 355 épisodes de coma ou de crise d'épilepsie en rapport avec une baisse de la glycémie a été notifié : 896 d'entre eux concernant 262 patients dans le groupe traitement intensif contre 459 survenus chez un total de 191 patients dans le groupe traitement conventionnel. Le nombre de décès total s'est établi à 53 dans l'ensemble de la population sélectionnée ; 3 de ces décès, survenus au cours de la seconde période de l'étude, étaient en rapport avec une hypoglycémie.
Pas d'influence sur les tests de cognition.
Les performances cognitives des sujets ont été calculées au moment de l'inclusion par des tests complexes, dont la durée totale était de plus de 4 heures. Ces mêmes tests ont été réalisés dans des conditions similaires en fin de suivi. Le traitement assigné en début d'étude et le nombre cumulatif d'hypoglycémies survenues pendant les dix-huit années n'ont pas significativement influencé les résultats des différents tests de cognition. Seuls des taux élevés d'hémoglobine glyquée étaient significativement liés à l'apparition d'un déclin modéré de l'efficacité psychomotrice et de la vitesse d'exécution motrice. Pour les auteurs, « ces résultats pourraient être en rapport avec le développement d'une macro- et d'une microangiopathie chez les sujets les moins biens équilibrés. L'étude a prouvé que le traitement intensif n'est jamais délétère d'un point de vue neuropsychologique ».
« New England Journal of Medicine », vol 356 ; 18, pp : 1842-1852, 3 mai 2007.
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