Les chirurgiens ne se remettent décidément pas de la non-revalorisation immédiate de leur principale lettre clé (KCC pour les opérations chirurgicales, gelée depuis treize ans) ni de leur exclusion concernant la majoration de 2 euros des consultations en secteur I.
Le président de l'Union des chirurgiens français (UCF), le Dr Jacques Meurette, a déjà décidé de couper les ponts avec la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), signataire du texte qui inspire le prochain RCM (« le Quotidien » du 8 septembre). Une rupture « définitive » qui laisse de marbre le Dr Michel Chassang, président de la CSMF. « L'UCF est une branche du SML [Syndicat des médecins libéraux, NDLR] et n'a jamais fait partie de la confédération ! », rectifie-t-il. Le Dr Chassang parle de « polémique stérile et inutile », dans la mesure où il est « le premier à regretter l'absence de revalorisation du KCC ».
Les chirurgiens, souligne le président de la CSMF, devraient plutôt « râler contre les caisses et le gouvernement qui l'ont refusée. »
L'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (UCCSF, membre de l'Alliance) estime pour sa part que « l'éviction » du KCC dans le projet de réglement conventionnel minimal (RCM) - alors que sa valorisation de + 10 % « était pourtant gravée dans le marbre du préaccord conventionnel du 10 janvier » - « obère lourdement l'avenir de la chirurgie privée française ».
Risque de « nationalisation »
L'UCCSF redoute en effet « une nationalisation de la médecine libérale dite "technique" sur plateaux techniques lourds privés », du reste déjà esquissée, selon ce syndicat, dans les objectifs des schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) 2004 et le plan Hôpital 2007. L'UCCSF regrette aussi « amèrement » une autre de ses « revendications essentielles », à savoir « la libre circulation entre les secteurs I et II ».
Malgré tout, l'UCCSF-Alliance « retrouve [dans le projet de RCM, NDLR] une bonne partie de ses propositions », à travers la prise en charge du surcoût 2003/2002 des primes d'assurance en RCP et le contrat de pratiques professionnelles (CPP) sur la fonction de coordination et de suivi péri-opératoire pour les chirurgiens de secteur I volontaires (voir encadré). Le syndicat espère maintenant le lancement du contrat de santé publique en chirurgie et du CPP d'anesthésie-réanimation qu'il avait proposés à la CNAM au printemps dernier.
A l'UCF, le Dr Meurette se dit très partagé à propos de ce CPP. « Dans l'absolu, ce CPP me paraît aller dans la bonne direction, car il apporte un petit plus et n'est pas très contraignant », explique-t-il. Mais le président de l'UCF trouve « idiot » que le CPP ne s'applique qu'aux « 20 à 30 % de chirurgiens libéraux qui sont en secteur I » et que cette démarche qualité soit limitée dans le temps (quinze mois) en attendant la nouvelle classification commune des actes médicaux (CCAM).
Le CPP est en revanche rejeté en bloc par le groupe Cochise (COllectif des CHIrurgiens de SEcteur I), lequel affirme rassembler maintenant « près de 380 » praticiens, dont « beaucoup sont issus des coordinations ». Au lieu de revaloriser les tarifs opposables des actes, la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) octroie « des forfaits qui sont en train de transformer les médecins en salariés », analyse le Dr Xavier Gouyou-Beauchamps, porte-parole du groupe Cochise. « La prise en charge des cotisations URSSAF, de la RCP [dans le cadre du CPP, NDLR] , le forfait du CPP...tout cela nous ligote un peu dans le secteur I », ajoute-t-il.
Le Dr Gouyou-Beauchamps rappelle que le rapport du Pr Jacques Domergue n'a été suivi d' « aucune réaction du ministère de la Santé », alors qu'il dressait en février un état des lieux accablant sur la démotivation des chirurgiens et la pénurie démographique. « Est-il vraiment utile de décourager davantage ceux qui exercent alors qu'ils ont déjà du mal à se faire remplacer ? », interroge le porte-parole du groupe Cochise. La solution, selon ce groupe, réside dans l'ouverture du secteur II. Faute de revalorisation du KCC, il recommande « la généralisation des dépassements » sur les honoraires des actes chirurgicaux.
Enfin, le nouveau mouvement des « Chirurgiens de France », fondé l'été dernier, adopte une position « en osmose avec l'UCCSF ». Mais, en lieu et place d'une prise en charge conditionnelle de la RCP par les caisses, les Chirurgiens de France apportent « tout leur soutien » à une proposition des unions régionales des médecins libéraux (URML), baptisée « Réconcilier droits et soins ». Depuis quelques jours, les unions demandent aux médecins libéraux d'adhérer à une solution qui déchargerait les assurances en RCP de l'indemnisation de « la quasi-totalité des préjudices subis par les patients en cas de fautes médicale », hormis les fautes inexcusables et intentionnelles. Cette solution passe par la création d'une seconde section au sein de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM, déjà chargé d'indemniser les dommages les plus graves des infections nosocomiales et des aléas thérapeutiques). En contrepartie, chaque médecin s'engagerait à mieux contrôler les risques liés à sa pratique.
Le Contrat de pratiques professionnelles (CPP), mode d'emploi
Annexé au projet d'arrêté sur le nouveau RCM, le contrat de pratiques professionnelles (CPP) sur la fonction de coordination et de suivi péri-opératoire est proposé sur la base du volontariat aux chirurgiens de secteur I jusqu'à la publication de la nouvelle CCAM. En y adhérant, les chirurgiens s'engagent à remplir et rassembler un certain nombre de documents dans le dossier médical du patient hospitalisé (fiche préopératoire, fiche d'entrée, traçabilité des consultations, examens et prescriptions...).
En contrepartie, les praticiens de secteur I reçoivent une rémunération forfaitaire annuelle, fixée à 4 000 euros pour moins de 20 000 coefficients en KC et KCC facturés, 5 500 euros entre 20 001 et 43 000 coefficients, et enfin 7 000 euros au-delà de 43 000 coefficients. Les caisses d'assurance-maladie remboursent aux chirurgiens le surcoût de la RCP entre 2003 et 2002 (hors malus) lorsque le montant de la prime est égal ou supérieur à 1 000 euros.
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