LES SYNDICALISTES qui défendent ce dossier avec acharnement depuis plusieurs décennies n’en reviennent toujours pas. C’est fait. Dans son article 112, la dernière loi de financement de la Sécurité sociale (Lfss) fait tomber le vieux principe selon lequel la part hospitalière des émoluments des médecins hospitalo-universitaires ne peut pas ouvrir de droit à la retraite. Une impossibilité liée au double motif qu’on ne peut pas cumuler avec une autre pension une retraite de fonctionnaire de l’Etat – celle que touchent les professeurs de médecine sur la part universitaire de leurs revenus – et que les primes – auxquelles sont assimilés les émoluments hospitaliers des PU-PH et des MCU-PH (1) – ne permettent pas, à quelques exceptions près, de cotiser pour sa retraite. Ce verrou juridique limite sérieusement depuis trente ans le niveau de la retraite des hospitalo-universitaires. «Alors que leur part hospitalière représente 50 à 55% de leurs revenus, elle leur apporte très exactement 0euro 0centime de retraite, explique le Pr Roland Rymer, président du Snam (Syndicat national des médecins des hôpitaux publics). Du coup, le niveau de retraite des HU n’est pas bon. Il est, en moyenne, légèrement inférieur à celui des praticiens hospitaliers qui, déjà, n’est pas bien élevé.»
La pension d’un maître de conférence tourne autour des 2 100 euros mensuels ; celle d’un professeur avoisine les 3 500 euros.
De ce passé, la Lfss 2007 fait table rase en instaurant, à compter du 1er janvier, le principe d’une retraite complémentaire par capitalisation constituée sur une partie (le plafond reste à fixer par décret) du revenu hospitalier des professeurs. Les points seront acquis pour moitié par l’employeur (l’hôpital) et pour moitié par l’employé (le médecin), la part de l’employeur n’étant versée que si l’employé s’engage à payer ses propres cotisations. Des négociations restent à mener pour chiffrer le dispositif : les dernières propositions des pouvoirs publics prévoient que les cotisations représentent pour chacune des parties 5 % des émoluments des HU plafonnés à 2 000 euros. Sur ces bases, la pension d’un professeur ayant cotisé vingt-cinq ans se retrouverait abondée de quelque 600 euros. C’est l’Ircantec (Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques), dont la réforme reste à mener à bien, qui gérera à terme le dispositif. En attendant que la mue de cet organisme soit achevée, des caisses vont être agréées pour le piloter.
Quelques bémols.
L’accouchement a été long et difficile ; les syndicats – Snam et CMH (Coordination médicale hospitalière), qui ont négocié avec le ministère – crient aujourd’hui victoire. «C’est un succès! Depuis trente ans, mon syndicat a fait de cette question un de ses chevaux de bataille, se félicite le Pr Rymer. Nous sortons d’une situation qui était anormale et malsaine. Pendant des années, on nous a avancé l’argument selon lequel les hauts fonctionnaires ont tous des primes qui ne sont pas prises en compte pour le calcul de leur retraite. Oui. Mais nous étions les seuls à être rémunérés en prime pour un travail que nous sommes obligés de faire et qui n’est pas le même boulot que celui pour lequel nous cotisons.» Président de la Coordination nationale des médecins hospitalo-universitaires, le Pr Alain Autret est, lui aussi, extrêmement soulagé : «A force d’entrisme, nous avons maintenant une loi. Le verrou législatif a sauté. C’est très important.» Mais il reste vigilant pour la suite – «Il faut que le décret sorte vite» – et partage un regret avec l’ensemble des professionnels : celui de voir écartés, pour l’instant, des bénéfices de la nouvelle retraite complémentaire les praticiens en fin de carrière. «Pour les vieux, il n’y a pas de mesure de rattrapage», déplore-t-il.
Les syndicats ne désespèrent pas. «Nous nous mobilisons pour obtenir quelque chose au niveau des décrets, pour faire en sorte que les personnes à dix ans de la retraite puissent avoir sous une forme ou sous une autre un bout de retraite complémentaire», indique pour la CMH le Pr Claude Gibert.
(1) Les professeurs des universités- praticiens hospitaliers et les maîtres de conférence des universités-praticiens hospitaliers.
Une pétition pour les CHU
Inquiète de la «perte d’attractivité des carrières» médicales en CHU, la Coordination des médecins hospitalo-universitaires fait actuellement circuler une pétition qu’elle entend envoyer aux ministres de la Santé et de l’Education nationale ainsi qu’au Premier ministre. Le dossier de la retraite y figure, mais aussi les «retards» pris en général par les réformes statutaires des PU-PH et des Mcu-PH, auxquels s’ajoute le sujet de la nouvelle gouvernance. La Coordination s’alarme en effet : «La mission universitaire des CHU n’est pas garantie» par la récente réorganisation interne des hôpitaux. Elle plaide pour une nouvelle «définition de la place de l’université dans le fonctionnement des CHU», y compris, en interne, à l’échelle des pôles.
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