De notre correspondante
«NOUS AVONS découvert une voie totalement nouvelle pour réduire les dégâts causés par les radicaux libres, tels que ceux survenant durant une crise cardiaque», déclare dans un communiqué le Dr Daria Mochly-Rosen qui a dirigé le travail mené à l'université de Stanford en Californie.
L'équipe est partie d'un mécanisme de protection propre du coeur, déjà connu, appelé préconditionnement. Il peut être déclenché par des ischémies du myocarde de courte durée ou par des substances comme l'alcool. Le préconditionnement par l'ischémie peut réduire de façon impressionnante (jusqu'à 90 %) la mort des cellules cardiaques soumises à une ischémie prolongée.
La découverte en 1986 de ce puissant mécanisme cardioprotecteur a déclenché un vif intérêt pour la recherche d'agents pharmacologiques simulant cet effet.
Le préconditionnement alcoolique.
Dans cette optique, l'équipe de Daria Mochly-Rosen a étudié comment le préconditionnement alcoolique (brève exposition à l'éthanol) protège le coeur du rat soumis ex vivo à une ischémie. En utilisant une approche protéomique non biaisée, ils ont identifié une protéine dont l'activation est corrélée à la réduction de la lésion cardiaque ischémique. Cette protéine est l'aldéhyde déshydrogénase 2-mitochondriale (ALDH2), une enzyme connue pour métaboliser l'alcool. Le préconditionnement cardiaque par l'alcool augmente de 20 % l'activité de l'enzyme durant l'ischémie cardiaque, ce qui conduit à une baisse de 27 % de la taille de l'infarctus. Ayant découvert ce nouveau rôle protecteur de l'ADLH2, les chercheurs ont conduit un criblage à haut débit de molécules afin d'en découvrir une qui active l'ADLH2.
Ils ont ainsi identifié une petite molécule, alda-1, qui permet, lorsqu'elle est administrée aux rats avant le déclenchement de l'ischémie cardiaque, de réduire la taille de l'infarctus de 60 %.
La neutralisation par l'ADLH2 des aldéhydes toxiques, formés dans l'organisme lorsque les radicaux libres réagissent avec les molécules lipidiques, est vraisemblablement le mécanisme sous-tendant cette cardioprotection.
D'autres applications possibles.
L'accumulation intracellulaire des aldéhydes, qui endommage de façon permanente la machinerie cellulaire et l'ADN, survient dans de nombreuses affections comme l'infarctus du myocarde, mais aussi la maladie de Parkinson, ainsi qu'au cours du vieillissement cutané lié au soleil. «L'usage potentiel d'alda1 est énorme», estime le Dr Mochly-Rosen. L'équipe étudie d'autres applications possibles, comme les maladies neurodégénératives et les dommages de la peau dus au soleil.
Les chercheurs ont également découvert que l'alda-1 est un activateur particulièrement efficace de l'ALDH2*2, une forme mutante inactivée de l'ALDH, retrouvée chez 40 % de la population d'Asie de l'Est et responsable d'une intolérance à l'alcool. De façon étonnante, alda-1 restaure l'activité de la forme mutante de la protéine. Enfin, leurs données chez le rat suggèrent qu'il faudra peut-être réévaluer l'usage prolongé de la nitroglycérine chez les Asiatiques porteurs de l'ALDH mutée atteints d'une ischémie.
Chen et coll. « Science », 12 septembre 2008, p. 1 493.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature