LES MALADIES ALLERGIQUES touchent 20 % de la population occidentale et toutes les tranches d'âge. Il y a, en France, 3 millions d'asthmatiques et 30 millions de sujets qui souffrent de rhinite ou de conjonctivite allergique.
La prévalence des allergies alimentaires est en augmentation croissante en Europe : suivant les études, elle se situe dans une fourchette allant de 1,8 à 4 %. Chez l'enfant (dont les allergies alimentaires au cours de la première année augmentent), plus de trois quarts des allergies concernent l'oeuf, l'arachide, le lait, le poisson et les noix. Chez l'adulte, plus de la moitié des allergies sont dues au latex, aux rosacées, aux ombellifères, aux noix et à l'arachide. Le nombre d'allergies croisées avec le latex progresse, ainsi que les allergies au sésame et à la farine de blé.
La croissance des maladies allergiques est favorisée par le mode de vie occidental qui expose aux polluants domestiques et atmosphériques, à une diminution de la pression infectieuse et à des modifications nutritionnelles précoces, modifiant la flore intestinale au cours de la première année de vie.
L'identification de la nature de l'allergie et du ou des allergènes responsables est indispensable pour un traitement efficace.
L'interrogatoire est essentiel, avec recherche des antécédents familiaux d'allergie et description précise des symptômes et du contexte environnemental dans lequel ils surviennent. Ils orientent le choix des tests à effectuer : tests cutanés et identification des allergènes, tests biologiques, avec dosages des IgE totales et des IgE spécifiques, et mesure de la libération d'histamine par les basophiles sanguins. Enfin, parfois, il est nécessaire de réaliser des tests de provocation.
Les résultats des tests dépendent étroitement de la qualité des extraits utilisés et, dans ce domaine, l'apport des allergènes recombinants constituera un progrès important.
Des allergènes purifiés.
Les techniques de génie génétique ont permis de cloner des allergènes majeurs et mineurs obtenus sous forme de protéines recombinantes dont il est toutefois indispensable de confirmer l'activité immunologique et l'identité de l'allergène recombinant avec l'allergène naturel par des tests in vitro et in vivo.
Des résultats récents sont rapportés avec les principaux pneumallergènes recombinants. Ainsi, par exemple, pour l'allergène recombinant du bouleau Bet v 1*, il a été montré une concordance entre les tests in vitro et les tests cutanés et ceux de provocation nasale et bronchique.
Les allergènes recombinants de la blatte Bla g 4 et Bla g 5 entraînent des réactions positives chez 50 % des sujets sensibilisés aux blattes. Autre exemple : l'association de quatre allergènes recombinants de la phléole a permis la détection i n vitro d'une sensibilisation aux pollens de graminées chez 94 % des patients.
D'autres allergènes recombinants d'allergènes d'animaux, d'acariens, et de végétaux ont été validés ou sont en cours de validation.
Les allergènes recombinants présentent plusieurs avantages susceptibles d'améliorer le diagnostic de l'allergie en permettant d'identifier avec précision le ou les protéines allergisantes chez un patient, et en établissant le spectre de spécificité de ses IgE et leur quantification.
Avec la production d'allergènes recombinants, il est possible d'obtenir des extraits, dont l'activité allergénique est constante et dont la dose d'allergène est stable et standardisée. En outre, les extraits obtenus ne contiennent que les allergènes déterminés, sans substances contaminantes : autre allergène ou protéine étrangère ou infectieuse. Enfin, il est possible de mettre au point une standardisation des méthodes de dosage.
Néanmoins, il est indispensable de confirmer la pureté, l'absence de toxicité et la stabilité de ces nouveaux allergènes recombinants, et d'établir leur activité immunologique et de la comparer à celle de l'allergène naturel.
Une nouvelle immunothérapie spécifique.
L'utilisation des allergènes recombinants modifiés devrait permettre des immunothérapies spécifiques efficaces et sans risque. En effet, l'immunothérapie spécifique occupe une place de choix dans le traitement de l'allergie. L'injection d'extraits allergéniques à faibles doses, à intervalles réguliers, permet une désensibilisation, mais au prix de risques anaphylactiques parfois graves. Or il est possible de modifier la structure et la composition de la protéine recombinante en préservant sa capacité immunologique, tout en diminuant son activité allergénique, c'est-à-dire renforcer l'efficacité de l'immunothérapie spécifique en réduisant les risques anaphylactiques. Ces protéines recombinantes doivent répondre aux critères de préservation des épitopes T et de faible antigénicité vis-à-vis des IgE.
Les différents types d'allergènes recombinants modifiés à l'étude actuellement sont obtenus par différentes voies : synthèse de polypeptides recombinants correspondant aux épitopes T, production d'allergènes recombinants à activité allergénique réduite ou d'allergènes recombinants de molécules allergéniques modifiées par comutations dirigées ou, enfin, production de recombinants de fragments de molécules allergéniques.
Plusieurs molécules hypoallergéniques sont des candidates pour une désensibilisation efficace et sans danger, et l'objet de travaux expérimentaux in vitro et in vivo. Une étude multicentrique européenne de désensibilisation réalisée avec l'allergène recombinant de l'allergène majeur du bouleau est en cours.
D'après les interventions des Prs Anne Monneret-Vautrin (Nancy) et Gabrielle Pauli (Strasbourg), lors de la 5e édition de BioMedec « Maladies allergiques : de l'épidémiologie aux biotechnologies », organisée par Centrale-Santé (association des centraliens) et parrainée par l'Académie nationale de médecine.
Pour en savoir plus : www.centrale-sante.net.
* La nomenclature des allergènes utilise les trois premières lettres du taxon, la première lettre du genre et le numéro de groupe.
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