Six ans après la signature de la charte de qualité, la visite médicale a changé. C’est en tout cas l’avis des principaux intéressés, médecins et industriels, qui ont été interrogés par la Haute Autorité de santé à l’occasion du bilan de la certification des réseaux. Les premiers ont été sollicités à deux reprises, via deux sondages IPSOS menés en mai 2007 et en janvier 2009. En deux ans la proportion de médecins qui ouvrent leur porte aux VM n’a guère bougé : 80% des généralistes et 70% des spécialistes. Tout juste la durée accordée aux visiteurs a-t-elle légèrement diminué : à raison de cinq VM vus par semaine, le médecin de famille accorde à chacun une douzaine de minutes, soit 4 minutes de moins que pour une consultation. Mais c’est surtout le contenu de la visite médicale qui a changé : seuls 20% des généralistes déclarent encore avoir reçu des cadeaux de faible valeur en 2009, ils étaient 93% dans ce cas deux ans auparavant; seul un généraliste sur deux s’est vu proposer une étude clinique par un VM, contre 71% en 2007; enfin, les échantillons distribués lors d’une visite ont sensiblement diminué. Et globalement, les médecins ont une opinion assez positive sur la qualité de la VM.
Cette perception des praticiens est corroborée par les industriels. Contactés sur la base de l’anonymat, les pharmaciens responsables déclarent à 94% avoir supprimé la remise d’échantillons et 100% la remise de cadeaux. Enfin, 90% ont arrêté d’utiliser la VM pour le recrutement des médecins pour des études post-AMM. Au total, ces pratiques interdites par la charte semblent donc en voie de disparition. La mise en œuvre de ce référentiel de bonnes pratiques a aussi été l’occasion de renforcer la formation des délégués médicaux: évaluation systématique des connaissances avancée par 86% des pharmaciens responsables, création de nouveaux modules de formation annoncée par 85%. Dans l’ensemble, 63% des pharmaciens responsables estiment eux aussi que la qualité de la VM sort gagnante de ces changements, mais la quasi-totalité déplorent un alourdissement des process.
En progrès, mais peu mieux faire: c’est aussi l’impression que retire la HAS, qui s’est penchée sur l’analyse des audits des organismes certificateurs: en juin 2009, 105 laboratoires et 32 réseaux prestataires de service avaient en effet été certifiés. La Haute Autorité estime que "des efforts ont été réalisés" dans tous ces domaines, mais qu’il règne encore une assez grande opacité sur certains points d’application de la charte. Comment, par exemple, se faire une idée de la remise effective aux médecins de documents officiels, tels que avis de la Commission de Transparence ou RCP (résumé de caractéristiques du produit) ou du contenu des argumentaires remis aux VM ? "Il est difficile de mesurer objectivement de la qualité d’information mesurée par ce canal", observe Etienne Caniard, membre du Collège de la Haute Autorité chargé de l’information, qui estime que "la procédure actuelle ne crée pas une véritable incitation à la qualité."
Au-delà de ce constat, le rapport de la HAS estime que la charte actuelle appréhende mal les évolutions récentes de la VM. Ainsi des sollicitations des médecins par téléphone. Sur six mois, 73% des médecins ont été contactés ainsi, que ce soit pour la promotion d’un produit (26%) ou pour participer à une enquête, à un congrès ou à une séance de FMC. La HAS estime que le contrôle qualité est malaisé dans ce cadre et que la distinction est délicate entre démarche promotionnelle ou non. La même remarque vaut pour le développement de la promotion en officines par des délégués pharmaceutiques, qui, selon la HAS n’offrent pas les mêmes garanties de formation que les délégués médicaux.
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