La vitamine B3 majore l'action d'une statine en prévention cardio-vasculaire

Publié le 28/11/2001
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« A moins qu'une évidence plus flagrante n'apparaisse, nous voyons peu de justification à l'utilisation de vitamines antioxydantes en prévention des événements cardio-vasculaires, notamment parce qu'ils abaissent les taux de HDL2 et interfèrent avec l'élévation des HDL2 générée par une thérapeutique hypocholestérolémiante concomitante. » Affirmation forte d'une équipe américano-canadienne, publiée dans le « New England Journal of Medicine ». Elle conclut une étude destinée à vérifier une hypothèse : les hypolipémiants et les antioxydants fournissent des bénéfices indépendants et additifs chez les patients coronariens au taux de HDL bas.

B. Greg Brown et coll., partant de l'apport connu de ces deux types de thérapeutique sur la maladie coronarienne, ont testé trois protocoles fondés sur leur association. Au cours d'un essai, en double aveugle, sur trois ans, ils ont enrôlés 160 patients coronariens, aux taux de HDL cholestérol bas et de LDL élevés. Après tirage au sort, ils ont reçu soit simvastatine + niacine (dénommée aussi vitamine B3, ou PP ou acide nicotinique - en doses croissantes de 0,5 à 4 g par jour selon HDL), soit des antioxydants (deux fois par jour : 800 UI de vitamine E, 1 g de vitamine C, 25 mg de bêta-carotène et 100 microgrammes de sélénium), soit l'association des trois. Un quatrième groupe, enfin, a reçu un placebo.

La sténose coronarienne a régressé lentement

« Chez les patients... traités pendant trois ans par simvastatine plus niacine, la sténose coronarienne proximale a régressé lentement, en moyenne, et le taux d'accidents cliniques majeurs a été 90 % plus bas que dans le groupe placebo. » A l'inverse, dans le groupe sous haute dose d'antioxydants, malgré une augmentation des taux plasmatique de vitamines et une résistance des LDL à l'oxydation, aucun bénéfice significatif n'a été enregistré. Bien que les antioxydants soient réputés procurer les bénéfices les plus élevés sur des lésions récentes, ils n'ont eu aucun effet sur les sténoses inférieures à 29 %.
Les résultats de l'association simvastatine- niacine ont été supérieurs à ceux attendus avec des statines seules, par la régression (et non le ralentissement) des sténoses et une réduction de 60 à 90 % d'un premier événement cardio-vasculaire (décès, infarctus, AVC ou revascularisation) au lieu des 24-34 % attendus. La fréquence de ces accidents a été de 3 % sous simvastatine-niacine, 21 % sous antioxydants, 14 % sous triple thérapeutique et de 24 % sous placebo.

Baisse des LDL de 42 %, HDL augmentés de 26 %

Les auteurs s'attendaient à un résultat positif, mais non de cette ampleur. Selon les données épidémiologiques, en effet, il existe une réduction du risque cardio-vasculaire de 1 % pour chaque augmentation de 1 % du HDL et de 1 % pour chaque baisse de 1 % du LDL. Les LDL ont de fait diminué de 42 % et les HDL ont augmenté de 26 %. Quant aux sténoses, alors qu'elles ont régressé de 0,4 % en moyenne sous la double thérapeutique, elles ont progressé de 3,9 % sous placebo, de 1,8 % sous antioxydants et de 0,7 % sous triple thérapeutique.
Une explication est proposée : les statines sont connues pour réduire le nombre de particules de LDL et la vitamine PP augmente principalement le taux de HDL2 et la flottabilité des particules de LDL, en diminuant l'activité de la lipase hépatique.
Autre surprise de l'étude, l'adjonction du cocktail antioxydant à la simvastatine et la niacine a fait diminuer les performances des deux derniers : significativement au plan de l'imagerie (p = 0,02), non significativement au plan clinique (p = 0,13). Cela s'expliquerait par une atténuation substantielle et spécifique de l'augmentation attendue de la fraction protectrice du HDL2.

« New England Journal of Medicine », vol. 345, 29 novembre 2001, pp. 1583-1592.

Dr Guy BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7020