LA COLOSCOPIE virtuelle, consistant à visualiser l'intérieur de la lumière intestinale par scanner, représente-t-elle une méthode fiable de détection des tumeurs coliques ? Cette question, qui demeure sujette à débats, trouve une nouvelle argumentation positive, à la faveur du travail de l'équipe de Daniel Johnson. Elle publie la plus grande étude comparative entre la coloscopie virtuelle et la fibroscopie colique classique réalisée à ce jour.
Le National CT Colonography Trial, mené sous les auspices de l'American College of Radiology, a permis de réaliser les deux examens chez 2 531 personnes, recrutées dans 15 centres américains. Les participants étaient tous des sujets de plus de 50 ans, sans facteur de risque ni symptomatologie évocatrice.
Préparation colique classique.
Ils ont eu une préparation colique classique pour ce dépistage, consistant en une évacuation colique par prise d'un laxatif, marquage des selles au baryum, marquage des liquides au produit de contraste iodé et insufflation mécanique du côlon. Les patients ont eu le même jour la coloscopie virtuelle, effectuée par un radiologue entraîné, et la fibroscopie colique, réalisée selon les standards classiques par le gastro-entérologue.
La coloscopie virtuelle a identifié 90 % des patients porteurs de tumeurs (adénome ou cancer) dites de grande taille, c'est-à-dire d'un diamètre supérieur à 10 mm ; mais elle n'est pas parvenue à détecter des tumeurs de plus de 10 mm chez 10 % des patients, chez qui la détection avait été faite par coloscopie.
La sensibilité de la coloscopie virtuelle à identifier les lésions colo-rectales plus petites (de 6 à 9 mm) est moins bonne.
«Nos estimations de la sensibilité de la coloscopie virtuelle à détecter des lésions trouvées sur la coloscopie classique est plus élevée que dans d'autres travaux», remarquent les auteurs. Ils attribuent cette situation à des différences de techniques. Ils rappellent que l'intérêt de la détection des polypes de plus petite taille n'est pas confirmé.
La coloscopie virtuelle est-elle suffisamment fiable pour être substituée à la coloscopie classique en dépistage du cancer colique, demande un commentateur (Robert Fletcher, Harvard) ? S'il s'agit de simplement dépister des polypes, « je répondrai oui », poursuit-il. La coloscopie par scanner possède une sensibilité nettement plus élevée que d'autres méthodes de dépistage couramment utilisées, comme l'usage de l'Hémoccult ou de la sigmoïdoscopie. Mais les patients et les praticiens ne doivent pas méconnaître les inconvénients de cette méthode. Dans l'étude de Johnson et coll., on a trouvé, chez 17 % des patients, un polype ou plus de 1 cm de diamètre, mais en réalité, seulement un quart d'entre eux présentaient cette tumeur. Les découvertes extra-coliques sont fréquentes, elles génèrent une inquiétude et des explorations supplémentaires, alors que peu d'entre elles sont traitables (à l'exception des anévrismes aortiques méconnus).
Une dose cumulative non négligeable.
Par ailleurs, l'irradiation provoquée par un scanner unique est acceptable, mais si l'examen doit être répété tous les cinq ans tout au long de la vie adulte, il en résulte une dose cumulative non négligeable, dont les effets doivent être mesurés.
Et enfin, la coloscopie virtuelle peut méconnaître des adénomes de forme aplatie ou déprimée, ce qui concerne environ 10 % des adénomes précancéreux.
Ces considérations ne doivent pas faire exclure la coloscopie virtuelle, mais doivent être prises en compte dans le bilan final de la validation de l'examen.
« New England Journal of Medicine », 355 ; 12, pp. 1207-1217, et éditorial pp. 1285-1287.
Le risque à cinq ans
Imperiale et coll. (Indianapolis) ont étudié le risque de trouver une coloscopie positive cinq ans après un résultat négatif à une précédente coloscopie. Le premier examen a été réalisé à un âge moyen de 57 ans. Chez 1 256 patients, ils ne trouvent pas de cancer lors du deuxième examen et des adénomes avancés chez 1,3 % des patients. Ils en déduisent que «chez des patients n'ayant pas de néoplasie lors d'un premier dépistage, le risque à cinq ans est extrêmement bas».
En réalité, le taux aurait dû être un peu supérieur, sans doute en raison d'un effet dû au hasard. Mais il est peu probable qu'il dépasse 2,4 pour 1 000 personnes à cinq ans, ce qui correspond aux résultats habituels. «Nos observations confortent la notion d'un intervalle de cinq ans ou davantage entre les coloscopies de dépistage du cancer colique.»
« New England Journal of Medicine », 18 septembre 2008, 1218-24.
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