CLASSIQUE
Le must absolu de cette année discographique dans ce répertoire ancien est sans aucun doute pour la rareté de la musique et la qualité de l'interprétation,
« Alfons V el Magnanim - El Cancionero de Montecassino » (1). C'est Jordi Savall, avec La Capella Reial de Catalunya, le maître-d'uvre de cette réussite absolue, par laquelle on voyage dans le temps, au quinzième siècle à la cour du premier roi aragonais de Naples, Alphonse V dit le Magnanime...
Peu d'uvres lyriques du dix-septième siècle auront été autant enregistrées que le « Didon et Enée », de Purcell. René Jacobs en donne une interprétation brillante à la tête de l'Orchestre de l'Age des Lumières (2). Le choix des solistes, de Lynne Dawson à Dominique Visse, est judicieux, le contraste entre le tragique et le comique très réussi. Le chur du Clare College est superlatif. Une belle réussite !
Sur Marie Keyrouz continue son exploration du répertoire oriental avec « Psaumes pour le troisième millénaire ». La voix de la religieuse est toujours un phénomène étonnant et son recueillement dans des pièces des liturgies byzantine et maronite inégalé (3).
Un classique du catalogue Virgin que ce « O Lusitano - Portuguese vilancetes, cantigas & romances », par Gérard Lesne. Déchiffreur inlassable de nouvelles musiques à ressusciter, Gérard Lesne a conçu cet album en 1989. L'altiste français chante avec la foi des grands découvreurs ces chants portugais du XVI° siècle. Ceci avec la complicité de Circa 1500 de Nancy Haden, un ensemble d'instruments anciens aux sonorités magiques. Le timbre étrange de sa voix d'altiste alterne avec luth, vielle, harpes dans des compositions anonymes. Il chante aussi deux compositeurs qui ont fait la gloire du Portugal pour la musique d'église : Pedro de Escobar et Manuel Machado. Un disque de musique érudite pour curieux et connaisseurs (4).
Le dernier enregistrement de Paul McCreesh concerne Jean-Sebastien Bach avec l' « Oratorio de Pâques » BWV 249 et le « Magnificat » BWV 243 (5). Austérité et minimaliste garantis avec, selon la théorie de Andrew Parrot faisant aujourd'hui autorité, un chanteur par voix. Kimberly McCord et Paul Agnew sont les solistes inspirés de ces deux uvres majeures de la liturgie luthérienne.
Bach encore avec la « Passion selon Saint-Matthieu » que remet pour la troisième fois sur le métier Nikolaus Harnoncourt. Après le King's College en 1971 et l'Orchestre du Concertgebouw en 1985, c'est le Concentus Musicus Wien et le Chur Arnold Schönberg que dirige le chef allemand. Les solistes sont extraordinaires avec Christophe Prégardien, Evangéliste d'un très grand raffinement, Matthias Goerne (Jesus), Dietrich Henschel et Christine Schäfer. Les rôles d'alto reviennent à des voix féminines (Bernarda Fink, Dorothea Röschmann) et c'est bien la seule réserve que l'on peut faire en cette période si riche en altos, à ce magnifique enregistrement (6).
Une première au disque que ce « Gloria » de Haendel récemment retrouvé à Londres et identifié par le professeur Hans Joachim Marx, uvre superbe et hautement spirituelle que viennent d'enregistrer Laurence Cummings et le Royal Academy of Music Baroque Orchestra et la spécialiste de Haendel Emma Kirkby. L'enregistrement (7) est complété par le « Dixit Dominus » réalisé en 1986 à Stockholm par Anders Öhrwall et l'Ensemble baroque de Drottningholm, avec et une distribution impeccable comprenant Hillevi Martinpelto et Anne Sofie von Otter. Belle réussite que ce couplage.
Vivaldi enfin avec le violoniste italien Fabio Biondi et son ensemble Europa Galante qui remet sur le métier les célèbrissimes « Quatre Saisons » et même tout l'opus 8 du Prêtre Roux de Venise « Il cimento dell'armonia e dell'invenzione », interprété « suivant les manuscrits originaux » (8). Bien que ce ne soit plus le choc de la découverte, on reste bouche bée devant la liberté et l'invention des phrasés tant dans la partie soliste qu'orchestrale, les couleurs, la fantaisie dans l'ornementation et la poésie de l'ensemble. S'il est encore des mélomanes qui ne connaissent pas le travail de Fabio Biondi, une visite de ces relectures décapantes de Vivaldi reste hautement recommandée.
(1) 2 CD Alia Vox. DDD. Durée : 71 min.
(2) 1 CD Harmonia Mundi. Durée : 60 min.
(3) 1 CD Virgin. DDD. Durée : 63 min.
(4) 1 CD Virgin Classics/Galleria. DDD. Durée : 65 min.
(5) 1 CD Archiv//Universal. DDD. Durée : 65 min.
(6) 3 CD Teldec « Das alte Werk ». DDD. Durée : 162 min.
(7) 1 CD Bis (distribution Codaex). DDD. Durée : 49 min.
(8) 2 CD Virgin Veritas (EMI) DDD. Durée : 1 h 42 min.
M.-A. Charpentier par Gérard Lesne sur CD
M ARC-ANTOINE CHARPENTIER (1643-1704) a composé pour la Maison professe des Jésuites trois histoires sacrées : « Mors Saülis et Jonathae », « Sacrificium Abrahae », « Dialogus inter Angelum et Pastores », les deux dernières n'ayant jamais eu les honneurs de l'enregistrement.
Une interprétation tout à fait convaicante du haute-contre Gérard Lesne (photo DR)
Gérard Lesne en a gravé avec son ensemble Il Seminario Musicale une interprétation tout à fait convaincante tant sur le plan dramatique, car à l'écoute on vit vraiment ces drames bibliques, véritables dialogues entre Ciel et Terre, que pour sa beauté vocale et instrumentale.
On laissera les musicologues se quereller sur l'opportunité d'avoir doublé telle partie ou l'attribution de telle voix à tel rôle pour admirer la grande réussite d'ensemble. Félicitations aussi à Naïve de renouer avec la tradition des livrets cartonnés et des notices bien faites !
1 CD Astrée/Naïve. DDD. Enregistrement : 2000. Durée : 68 minutes.
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