La fin de l'obligation vaccinale par le BCG a été décidée par les autorités sanitaires en raison de l'évolution épidémiologique de la tuberculose, mais vacciner tous les enfants à risque dès le premier mois reste indispensable si l'on veut éviter une recrudescence des formes graves chez les jeunes enfants. Cette vaccination ciblée ne saurait être efficace sans le dépistage et le traitement de la maladie tuberculeuse.
«CONFORMÉMENT à l'avis du Comité technique des vaccinations et du Conseil supérieur d'hygiène publique de France du 9mars 2007, la suspension de l'obligation vaccinale par le BCG a été effectuée au moment de la mise en oeuvre du programme national de lutte contre la tuberculose», rappelle le Pr Joël Gaudelus (hôpital Jean-Verdier, Bondy). L'arrêt de la vaccination systématique par le BCG est en effet indissociable du dépistage effectif et efficace des cas de maladie tuberculeuse et de leur traitement, ainsi que de la mise en place de la vaccination des enfants à risque.
En effet, si l'incidence moyenne de la tuberculose était de 8,9 pour 100 000 habitants en 2005, chiffre le plus bas jamais atteint dans notre pays, ce taux masque une grande disparité régionale. En région Île-de-France, il est de 19,7 pour 100 000, avec deux départements particulièrement touchés : la Seine-Saint-Denis avec 32,6 pour 100 000 et Paris avec 28,7 pour 100 000. Il faut y ajouter la Guyane où l'incidence est de 44 pour 100 000. Par ailleurs, le taux d'incidence est beaucoup plus élevé chez les personnes nées à l'étranger (41,5 pour 100 000) que chez celles nées en France (5 pour 100 000). Le taux le plus élevé est enregistré chez les personnes nées en Afrique subsaharienne (160 pour 100 000), il est de 53,2 pour 100 000 chez les sujets nés en Asie, de 28,5 chez ceux nés en Afrique du Nord et de 13,7 pour 100 000 chez les personnes nées en Europe (hors France). Il est donc indispensable de vacciner les enfants nés dans ces régions de forte endémicité (voir encadré) et ceux dont au moins un des parents est originaire de l'un de ces pays. Sont également considérés comme à risque et devant bénéficier de la vaccination ciblée par le BCG les enfants devant séjourner au moins un mois d'affilée dans l'un de ces pays et, bien entendu, tous les enfants ayant des antécédents familiaux de tuberculose (collatéraux ou ascendants directs), ainsi que les enfants vivant dans la région Île-de-France et en Guyane et enfin tous les enfants que le médecin considère à risque, notamment en raison de ses conditions de vie.
Il faut continuer à vacciner ces enfants et à conserver une couverture vaccinale proche du taux actuel (supérieur à 90 %) dans la population cible si l'on veut limiter l'augmentation des cas de tuberculose chez les moins de 15 ans. En effet, si l'on estime que le BCG est efficace à 75 % vis-à-vis de formes graves et à 50 % pour les autres formes, l'arrêt total du BCG entraînerait 320 cas supplémentaires par an de tuberculose chez les moins de 15 ans dont 10 méningites. Si la couverture vaccinale de la population à risque chute à 50 %, le nombre de cas supplémentaires dans cette tranche d'âge est estimé à 195 dont 6 méningites. Si ce taux chute à 10 %, les cas en excès seraient sensiblement identiques à ceux estimés, en cas d'abandon total du BCG. «Il ne faut pas nier que la voie d'administration de ce vaccin (intradermique seulement depuis la suppression du Monovax fin 2005) est un obstacle à l'obtention d'une bonne couverture vaccinale, au moins dans notre pays où plus de 90% des enfants étaient vaccinés par multipuncture, note le Pr Gaudelus. Il apparaît donc fondamental que lorsqu'un médecin ne sait pas faire et/ou ne veut pas faire un BCG intradermique, il puisse proposer à ces enfants à haut risque un accès à la vaccination à laquelle ils ont droit. Le rôle des PMI est ici très important», ajoute-t-il.
D'après la communication du Pr Joël Gaudelus, hôpital Jean Verdier, Bondy
Les pays à risque
– L'ensemble des continents africain et asiatique, y compris les pays du Proche- et du Moyen-Orient ;
– les pays d'Amérique centrale et du Sud ;
– les pays d'Europe centrale et de l'Est, y compris les pays de l'ex-URSS ;
– dans l'Union européenne : Bulgarie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Portugal, Roumanie.
Du premier mois de vie et jusqu'à 15 ans
Pour les enfants vivant dans un milieu à risque élevé de tuberculose, la vaccination par le BCG est recommandée dès le premier mois de vie. En effet, il faut vacciner ces enfants tôt, d'une part, parce que le risque de passage de l'infection à la maladie tuberculeuse est d'autant plus élevé que l'enfant est plus jeune : 43 % avant l'âge de 1 an, 24 % de 1 à 5 ans, 15 % chez l'adolescent, alors qu'il n'est que de 5 à 10 % chez l'adulte. D'autre part, parce que ce sont les nourrissons qui sont les plus à risque de faire des formes graves. Les enfants de moins de 3 mois sont vaccinés sans test tuberculinique préalable. Chez les enfants à risque non vaccinés, la vaccination peut être réalisée jusqu'à l'âge de 15 ans.
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