Faut-il étendre la vaccination anti-HPV à tous les jeunes garçons, comme l’ont déjà fait les Etats Unis, l’Australie ou encore le Canada ? Alors que la question taraude depuis plusieurs années le milieu de la vaccination, un avis du HCSP vient de trancher par la négative pour la population générale. En revanche, les experts préconisent de proposer cette vaccination aux jeunes homosexuels masculins.
Un risque de cancer anal 20 fois plus élevé chez les HSH
Pour conclure dans ce sens, le HCSP a pris en compte l’épidémiologie des lésions liées aux HPV chez l’homme, l’efficacité des vaccins sur ces lésions ainsi que leur tolérance chez l’homme, les aspects médico-économiques et l’acceptabilité de la vaccination en population masculine.
D’un point de vue épidémiologique, les données analysées montrent qu’en population générale masculine le cancer anal est en progression mais reste rare; les cancers du pénis sont très rares alors que les verrues ano-génitale sont fréquentes et souvent récidivantes. Cependant « l’infection anale par les HPV et ses manifestations cliniques (lésions pré-cancéreuses, cancers, condylomes anaux) sont plus fréquentes chez les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes ou HSH (par exemple risque de cancer anal multiplié par 20), en particulier chez ceux infectés par le VIH » soulignent les experts. Quant aux cancers de la sphère ORL dus aux HPV « les données internationales disponibles sont hétérogènes et non transposables à la France ».
En termes d’efficacité, un impact a été démontré contre les verrues génitales et dans les populations HSH contre les lésions précancéreuses anales. Côté tolérance « les données disponibles sur la réactogénicité de Gardasil® dans l’étude pivot multicentrique et les données de pharmacovigilance confirment la sécurité d’emploi chez l’homme ».
Pas tous les hommes
Concernant l’aspect médico-économique, les études conduites dans les pays développés montrent que l’extension de la vaccination aux hommes hétérosexuels est très rarement une stratégie coût-efficace lorsque la prévention des maladies pour lesquelles l’AMM des vaccins a été octroyée (prévention des lésions anales précancéreuses et cancéreuses) est considérée. Le rapport coût-efficacité devient favorable lorsque l’ensemble des pathologies liées aux HPV sont considérées et lorsque la couverture vaccinale chez les filles est faible ( < 40%) sous réserve d’une couverture vaccinale élevée chez les garçons. En revanche, « la vaccination ciblée des hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes pourrait être une stratégie efficiente du point de vue médico-économique ».
Enfin sur le plan de l’acceptabilité de la vaccination « les HSH ont un taux d’acceptabilité significativement plus élevé que celui des hommes hétérosexuels ». Les facteurs qui influencent positivement l’acceptabilité de la vaccination sont la connaissance des maladies liées à l’HPV, la connaissance du vaccin, sa gratuité et l’existence de recommandations des autorités de santé.
Une protection « justifiée »
Dans ce contexte, « la vaccination universelle des garçons selon des modalités comparables à celles des filles n’est pas pertinente d’un point de vue santé publique » conclut le HCSP. En revanche, « la protection des HSH apparaît justifiée : ils sont exposés à un risque plus élevé de cancer anal alors qu’ils ne bénéficient pas de la protection indirecte de la vaccination des filles. De plus, la vaccination HPV de cette population semble une stratégie coût-efficace. Par contre, il existe une difficulté à atteindre ces personnes avant qu’elles ne soient infectées ».
Les experts recommandent donc : « qu’un accès au vaccin HPV soit proposé dans les Cegidd et dans les centres de vaccination aux hommes jusqu’à l’âge de 26 ans (limite des études de phase III) qui ont ou ont eu des relations sexuelles avec un homme ».
Vaccination tardive
Contrairement à la stratégie précoce « préconisée » chez la jeune fille, le HCSP retient donc pour la population masculine, une vaccination ciblée et relativement tardive. Pour autant, « le bénéfice de cette vaccination sera d’autant plus important que le début de l’activité sexuelle sera récent et que le nombre de partenaires passés sera faible » soulignent les experts qui rappellent par ailleurs que « la vaccination contre les infections à papillomavirus humains est recommandée aux personnes immunodéprimées des deux sexes » et que « l’augmentation de la couverture vaccinale des jeunes filles reste la priorité pour la prévention des maladies liées à l’infection par les HPV »…
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