CRISE DÉMOGRAPHIQUE, crise de reconnaissance, crise d'identité, crise financière : la pédiatrie libérale ne vit pas une époque formidable.
Le Dr Francis Rubel, président du Syndicat des pédiatres français (Snpf, adhérent à l'Umespe-Csmf), sonne l'alarme pour «l'avenir de cette spécialité» en ville.
Alors que la moyenne européenne est de 1 pédiatre de ville pour 2 094 enfants, on compte 1 pédiatre pour 5 300 enfants en France ; près de la moitié des pédiatres installés en ville (environ 2 600) partiront à la retraite dans les quinze ans à venir, départs non compensés par le niveau actuel de recrutement. Face à cette «pénurie», déjà réelle dans de nombreuses villes petites ou moyennes, le Snpf demande de «relancer la filière pédiatrique» en formant au minimum 400 pédiatres par an (deux fois plus qu'aujourd'hui) «pour assurer les besoins vitaux».Encore faudrait-il redorer le blason de la pédiatrie libérale, discipline au bas de l'échelle des revenus (63 000 euros en secteur I, soit 40 % de moins que la moyenne des autres spécialités). Pour le Snpf, plusieurs pistes doivent être explorées.
En attendant la réforme des consultations (Ccam clinique), le syndicat réclame une majoration (de 10 euros) pour les consultations des enfants «vulnérables», terminologie large qui pourrait couvrir environ 30 % des actes pédiatriques. On est loin, ici, de l'avenant 23 à la convention qui a revalorisé quelques actes pédiatriques extrêmement ciblés (consultation de synthèse annuelle pour les enfants en ALD). «Cela ne représente rien», se désole le Dr Rubel.
La reconnaissance de «l'acte de consultant du pédiatre» est une autre revendication. Aujourd'hui, le C2 (44 euros) n'est presque pas utilisé par les pédiatres. Or, selon le Dr Jean-François Rey, président de l'Umespe (branche spécialiste de la Csmf), il serait «tout à fait possible de définir des actes de consultant, traçables, dans le cadre de pathologies de l'enfant».Autre piste : la création d'actes de «dépistage et de prévention». Enfin, le Snpf demande la «fin du bénévolat» en matière de permanence des soins.
Sur le fond, à écouter leurs représentants, les pédiatres libéraux ne parviennent plus à trouver leur place dans le système de soins, faute d'explicitation sur leur «périmètre» de compétence. En ville, l'activité est grignotée par les médecins généralistes qui réalisent déjà 75 % des actes pour les plus de 2 ans. «Nous sommes les spécialistes de la tranche d'âge de0 à 18ans, médecins internistes de l'enfant et pilotes de la santé publique, argumente le Dr Rubel. Mais on se demande s'il n'y a pas une stratégie politique pour organiser la sous-représentation de la pédiatrie de proximité.»
Pourtant, affirme le Snpf, études à l'appui, les pays européens où les enfants font l'objet d'un suivi pédiatrique exclusif sont ceux qui affichent les meilleurs indicateurs de santé publique, la meilleure prévention et un moindre recours aux antibiotiques. Une pierre dans le jardin des médecins généralistes même si, affirme le Dr Rubel, «il ne s'agit pas de faire la guerre avec les médecins de famille».
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