C'est « une coutume bien française », ainsi que le note Patrick Pelloux : dire que le problème est réglé en coupant quelques têtes. Pour autant, le président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMHUF), à l'instar du Dr François Aubart, président de la Coordination médicale hospitalière, approuve la décision du ministre Jean-François Mattei d'avoir accepté la démission du Pr Lucien Abenhaïm de la direction générale de la Santé, dès lors qu' « elle servira à tirer toutes les leçons du drame humanitaire que nous avons connu et à réorganiser une DGS marquée par des dysfonctionnements majeurs ».
Des dysfonctionnements que la DGS elle-même ne nie pas - « Quelque chose n'a pas marché dans les services de l'Institut de veille sanitaire qui n'a clairement pas identifié la montée de la mortalité ni la dynamique de l'épidémie à temps pendant les événements » - tout en affirmant que « la situation a fait l'objet d'une alerte ».
Pour sa part, Jean-François Mattei a expliqué qu'il avait compris le 11 août au soir la gravité de la situation quand il a eu « d'un côté un message de la DGS disant que la situation était maîtrisée et que, de l'autre, des lignes directes aux urgences des hôpitaux et la directrice générale de l'Assistance publique qui (lui) affirmaient que la situation était vraiment intenable ».
Hiatus
Le sort du Pr Abenhaïm a été scellé dans ce hiatus.
Epidémiologiste et spécialiste de santé publique, l'homme qui avait succédé en août 1999 au Pr Joël Ménard aura su maîtriser des dossiers délicats (nouveau variant de Creutzfeldt-Jacob, dépistage de l'hépatite C, risques liés au bioterrorisme et, en dernier lieu, SRAS), mais le pic épidémique de la canicule, qu'il compare à une secousse de degré 9 sur l'échelle de Richter, absolument imprévisible dans sa soudaineté, et jamais vue dans sa carrière d'épidémiologiste, lui aura été fatale.
C'est le Pr William Dab, son ancien directeur de cabinet de 1999 à 2001, responsable du pôle santé publique et sécurité sanitaire du cabinet de Jean-François Mattei depuis juillet 2002, qui lui succède. Le nouveau venu est donc bien du sérail, lui-même épidémiologiste et spécialiste en santé publique, titulaire d'un doctorat ès sciences en biostatistiques, informatique médicale et santé publique. Sa première intervention, au demeurant, est pour rendre hommage au travail accompli par son prédécesseur, tenant à inscrire son action dans sa continuité.
Dans ce contexte, les conclusions de la « mission d'estimation de la mortalité liée à la canicule » sont attendues d'ici à un mois, une mission confiée par le ministre, à la demande de Jean-Pierre Raffarin, à deux experts de l'INSERM : Denis Hemon, directeur de l'unité 170 INSERM (épidémiologie environnementale) et Eric Jougla (directeur du centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès à l'INSERM).
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