Arguments épidémiologiques.
C'est actuellement souvent au stade de syphilis secondaire que l'on est amené à évoquer le diagnostic de syphilis, devant une éruption cutanée. Les lésions primaires sont moins fréquentes, un certain nombre d'entre elles, anales ou buccales, passent vraisemblablement inaperçues. Ce sont des arguments épidémiologiques qui doivent alerter, les examens bactériologiques et surtout sérologiques confirment le diagnostic pour une maladie facilement curable à ce stade avec un traitement simple.
La lésion primaire.
La lésion primaire survient en moyenne trois semaines après le contact infectant. C'est typiquement une érosion assez superficielle, propre, indurée, non douloureuse, non inflammatoire, s'accompagnant d'une adénopathie unilatérale elle aussi indolore et indurée, non inflammatoire. La localisation au sillon balano-préputial est classique, mais de nombreuses topographies sont possibles dont certaines cachées : la bouche, le canal ou la marge anale, le col de l'utérus...
L'examen clé du diagnostic, à ce stade, est la recherche du tréponème au microscope à fond noir. Le tréponème n'est pas cultivable et les examens sérologiques peuvent être en défaut puisqu'il faut attendre au moins dix jours après le début du chancre pour voir le FTA se positiver, douze à quinze jours pour le Vdrl et le Tpha. L'interprétation est souvent difficile du fait de la faiblesse des taux au début et de la méconnaissance des sérologies antérieures. La positivité du FTA IgM est un argument diagnostique supplémentaire.
En l'absence de positivité du fond noir, le diagnostic repose sur la confrontation d'arguments :
- épidémiologiques : notion de rapport à risque ;
- cliniques : présence d'une ulcération ;
- bactériologiques : négativité des autres examens, notamment la recherche d'herpès ;
- sérologiques : positivité d'une des réactions sérologiques, du FTA IgM.
La répétition des examens sérologiques montrerait une élévation des taux, mais il est préférable de traiter. La guérison rapide après une injection intramusculaire de 2,4 millions d'unités de Benzathine pénicilline (ou quinze jours de doxycycline, 200 mg/j, en cas d'allergie à la pénicilline) peut être un argument diagnostique supplémentaire. A ce stade, la négativation des examens sérologiques après traitement est habituelle.
Au stade secondaire.
Au stade secondaire, le problème est clairement de penser à la syphilis face à une éruption cutanée qui, bien souvent, persiste et résiste aux différents traitements proposés. A partir du moment où l'on y pense, on peut retrouver une prise de risque, pour peu qu'on la recherche dans les délais habituels, c'est-à-dire trois à six mois avant le début de l'éruption ; la prescription des examens sérologiques permet alors de confirmer le diagnostic.
La roséole qui, chronologiquement, apparaît la première, six semaines à trois mois après le chancre, est faite de macules rosées, pâles, non prurigineuses, prédominant sur le tronc et la racine des membres. Elle peut passer inaperçue et disparaît spontanément. A ce stade, deux autres manifestations cutanées sont possibles, associées ou non à la roséole : les plaques muqueuses, érosions superficielles, souples et indolores qui fourmillent de tréponèmes, classiques plaques fauchées de la langue ; elles existent sur toutes les muqueuses et l'alopécie en clairière temporo-occipitale.
Les syphilides papuleuses apparaissent à partir du troisième mois. L'éruption est faite de papules rouges, non prurigineuses, entourées d'une collerette desquamative, parfois même très squameuses, atteignant surtout le visage et le tronc.
De nombreuses variantes cliniques existent, séborrhéiques, acnéiformes, pustuleuses ou érosives (notamment sur les muqueuses) qui peuvent égarer. Il faut penser à regarder les paumes et les plantes ; leur atteinte est fréquente et très évocatrice. En l'absence de diagnostic, ces lésions évoluent par poussées sur plusieurs mois.
Face à ces différentes manifestations cutanées, ce sont les examens sérologiques qui permettront le diagnostic. A ce stade, le Tpha et le Vdrl, qui sont les deux tests utiles de première intention en cas de suspicion de syphilis, sont tous les deux positifs à des titres élevés (à titre d'exemple, le Tpha peut atteindre des titres supérieurs au 1/10 000 et le Vdrl au 1/64 ou 1/128). Le FTA, s'il est demandé, est lui aussi très positif, avec ou sans IgM. Ces examens suffisent au diagnostic. Dans quelques très rares cas, le Vdrl peut être faussement négatif du fait d'un excès d'anticorps (phénomène de zone) ; il faut alors répéter les examens, s'il y a des lésions muqueuses, rechercher le tréponème au microscope à FN, voire faire une biopsie cutanée, évocatrice par la présence de nombreux plasmocytes dans l'infiltrat dermique.
Traitement : 2,4 millions d'unités de Benzathine pénicilline par voie intramusculaire profonde suffisent au traitement d'une syphilis secondaire sans manifestation neurologique. Les lésions cutanées disparaissent en quelques semaines. Le titre du Vdrl doit baisser de 2 dilutions (être divisé par 4) à trois mois, il peut se négativer après deux ans, ce qui n'est pas le cas du Tpha qui, en général, reste positif, parfois à des titres assez élevés. En cas d'allergie à la pénicilline, on a recours, là aussi, aux cyclines ou à la désensibilisation à la pénicilline.
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