La bataille « phagothérapie versus antibiothérapie » n'a pas lieu d'être : dans le cas où les deux approches thérapeutiques sont envisageables, le mieux est de les associer car elles agissent en synergie. A l'université Paul-Sabatier de Toulouse, André Comeau et ses collègues ont en effet démontré que les antibiotiques augmentent la capacité des phages à lyser les cellules bactériennes. Inversement, l'utilisation de phages pourrait accroître l'efficacité des traitements antibiotiques en permettant de diminuer rapidement la charge bactérienne à traiter.
Les phages présentent cependant plusieurs avantages par rapport aux antibiotiques : ils sont très faciles à isoler et à produire. Il suffit généralement de mettre en contact de l'eau souillée et les bactéries isolées chez le patient pour parvenir à isoler et à produire le phage approprié. Par ailleurs, les phages coévoluent avec les bactéries qu'ils infectent. Ainsi, si une souche bactérienne mute et devient résistante à son phage, l'évolution sélectionnera un phage lui aussi mutant, toujours capable d'infecter la bactérie. C'est un gros avantage des phages sur les antibiotiques.
De plus, alors que la concentration des antibiotiques dans l'organisme d'un patient ne peut que décroître, la concentration des phages augmentent tant que toutes les bactéries ciblées n'ont pas été détruites. Lorsque l'infection a été éradiquée, les phages sont éliminés de l'organisme par les voies naturelles.
Enfin, la phagothérapie ne semble pas induire d'effet secondaire : ce point a été vérifié par Harald Brüssow (centre de recherche Nestlé, Suisse) au cours d'un essai de phase I visant à évaluer la sécurité de l'administration orale d'un cocktail de phages destinés à traiter les diarrhées à Escherichia coli de l'enfant. L'étude a montré que le traitement ne détruit pas la flore intestinale commensale. Les phages administrés sont éliminés dans les selles. Ils ne sont pas détectables dans la circulation sanguine, n'induisent pas de réponse immunitaire et ne modifient pas le niveau des transaminases.
La phagothérapie a cependant un défaut : certains phages ont tendance à insérer leur matériel génétique dans le génome de leur bactérie hôte, mais cette insertion n'est que transitoire. Lorsque le génome du phage finit par s'exciser du génome bactérien, il lui arrive d'« emporter » avec lui des gènes bactériens alentour, éventuellement des gènes de virulence bactérienne. De ce fait, avant d'utiliser un phage en thérapie, il est absolument nécessaire de minutieusement vérifier son génome.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature