DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
AU DÉPART, face au thème de la sécurité sanitaire retenu par la présidence française, en l'occurrence par la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, les trente-deux ont affiché un certain scepticisme, note la ministre française. Qui se félicite de la prise de conscience qui, selon elle, s'est opérée à Angers, à la faveur de la réunion informelle. Malgré une certaine cacophonie.
Des travaux menés sur un mode pragmatique, avec deux exercices de mise en situation, histoire de mettre en lumière les progrès qui restent à faire en matière de coordination européenne dans le champ de la sécurité sanitaire.
Le premier scénario portait sur des symptômes de fièvre diagnostiqués chez une dizaine de participants à un forum réunissant 80 000 personnes dans un pays d'Amérique latine. Un cas était importé dans l'UE, qui contaminait une deuxième personne, aboutissant à un diagnostic confirmé de fièvre jaune. Selon la chronologie de la crise, les ministres ont dû répondre à des questions précises concernant la communication, la réglementation des déplacements, la constitution de stocks et l'utilisation des produits de santé.
Les mêmes questions leur ont été posées pour un deuxième scénario, autour d'infections respiratoires aiguës sévères diagnostiquées parmi de nombreux touristes européens qui passent les fêtes de fin d'année dans un pays du Sud-Est asiatique.
Dans les deux cas, l'analyse des réponses ministérielles enregistrées à l'aide de boîtiers électroniques est édifiante. Le désir d'informer le public et de communiquer de manière transparente n'est pas partagé par tous. Et quand on détaille les mesures de gestion retenues par les uns et les autres, «une très grande diversité d'options est retenue», constate, sibyllin, le communiqué final. Or, s'interrogent les animateurs de ces scénarios, dans un contexte où les stratégies de réponse se présentent souvent comme nationales, les mesures de gestion peuvent-elles être pleinement efficaces sans une concertation entre États membres ?
Évidemment, poser la question, c'est y répondre. Et le choix de faire jouer un exercice a certainement recelé plus de vertus pédagogiques que l'état des lieux dressé, en ouverture, par la Commission et le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), après le séminaire Eurogrippe qui s'est tenu la semaine dernière, en lien notamment avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Tirant les conclusions de la réunion, Roselyne Bachelot se félicitait d'avoir atteint ses objectifs : la majorité de ses collègues s'est accordée sur la nécessité, en cas de crise, de communiquer rapidement et de la manière le plus coordonnée possible au niveau européen. Surtout, le grande diversité des réponses apportées les a conduits à reconnaître la nécessité d'une concertation européenne plus étroite, gage de l'efficacité des actions mises en oeuvre.
Un consensus s'est dégagé, a expliqué la ministre présidente, autour du renforcement indispensable du rôle du Comité de sécurité sanitaire (HSC) et d'une optimisation de l'articulation entre les diverses instances compétentes en matière de sécurité sanitaires (HSC, ECDC, OMS et les organismes nationaux).
Les trente-deux ont encore insisté sur la nécessité d'une approche intersectorielle des crises sanitaires : l'activité économique, les transports et les services essentiels ne doivent pas s'arrêter en période pandémique, ainsi que l'avaient souligné les experts d'Eurogrippe. Au sujet des stocks d'antiviraux, une intervention du ministre luxembourgeois a rallié ses collègues : les dates de validité, compte tenu de la cherté de ces médicaments, devront être étendues. Et l'UE décide que ses propres services devront «prendre en main directement» ce dossier, plutôt que de s'en remettre aux industriels.
En marge de la réunion, le secrétaire d'État américain à la Santé, Michael Leavitt, invité d'honneur à Angers, a soulevé la problématique de la propriété juridique des souches de virus. Un dossier piloté par l'OMS et qui, déplore Roselyne Bachelot, se trouve actuellement en stand-by, du fait de l'obstruction de quelques pays du Sud-Est asiatique.
Des mesures en décembre.
Sur tous ces points, Angers aura permis de mobiliser les Européens. En principe, c'est dans trois mois, à l'occasion du Conseil des ministres de la Santé fixé les 15 et 16 décembre, que des mesures d'application devraient suivre.
Quatre autres dossiers compléteront l'ordre du jour : la lutte contre la maladie d'Alzheimer et les maladies dégénératives devrait être inscrite parmi les priorités européennes, avec un partage d'expériences et la facilitation de la coordination des programmes de recherche ; la finalisation du projet de directive sur «le droit des patients et les soins de santé transfrontaliers». Une directive qui devra clarifier le droit de se faire soigner à l'étranger et d'être remboursé jusqu'à concurrence de ce que prévoit son pays.
L'Europe de la santé devra répondre à des attentes concrètes tant du point de vue des patients que de celui des professionnels de santé.
Enfin, un « paquet médicament » devrait être adopté, alors que le Parlement européen examine actuellement les modifications de l'AMM. Il est censé faire progresser au plan européen la pharmacovigilance et l'information des patients, ainsi que l'avenir des produits pharmaceutiques, ou la lutte contre la contrefaçon.
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