LA SURDITÉ congénitale est un handicap fréquent qui touche une naissance sur mille, soit entre 600 et 700 nouveau-nés chaque année. « Ses répercussions ont une influence majeure sur les développements cognitifs, linguistiques et sociaux. Les données cliniques et les publications les plus récentes montrent qu'une prise en charge précoce et adaptée permet d'obtenir des résultats positifs en termes de communication, d'acquisition du langage et de scolarité, lorsque les actions entreprises après le diagnostic sont adaptées aux familles et aux besoins spécifiques de l'enfant sourd », a expliqué Annie Dumont, orthophoniste (hôpital Robert-Debré), lors d'un colloque organisé à Paris par l'association Acfos (Action Connaissance Formation pour la surdité)*.
Six sites pilotes.
Partant du constat qu'un nombre important de surdités congénitales sont aujourd'hui diagnostiquées tardivement (entre 18 et 24 mois), ce qui est préjudiciable au développement psychomoteur de l'enfant, le conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance-maladie a autorisé la mise en place, à partir du 1er janvier 2005 et pour une période de deux ans, d'un programme expérimental de dépistage néonatal systématique de la surdité en maternité sur six sites pilotes (Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Paris, Toulouse). Ce programme concernera 150 000 naissances. Son objectif est d'étudier la faisabilité d'un dépistage systématique de la surdité en maternité. L'organisation est la suivante : cinq ou six maternités volontaires (de taille, de statut et de niveau différents) participent au programme dans chacun des sites. Les tests sont effectués par le personnel de la maternité, préalablement formé à la méthode des potentiels évoqués auditifs automatisés. Si ce test de dépistage se révèle anormal, la maternité organise dans les quinze jours suivants un rendez-vous dans le centre de diagnostic ORL partenaire du programme pour procéder à des examens complémentaires. En cas de diagnostic de surdité, le centre organisera le suivi et la prise en charge de l'enfant.
Coordonné par l'Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l'enfant (Afdphe) et doté par l'assurance-maladie d'un budget de 3 millions d'euros, ce programme fera l'objet d'une évaluation à l'issue des deux ans. L'Afdphe et son réseau d'associations régionales sont chargés du recueil des données, de l'élaboration de documents d'information pour les professionnels et les familles. Enfin, l'assurance-maladie préconise une formation des personnels de maternités à l'annonce d'une suspicion de surdité, avant le lancement du programme.
« La mise en place d'une détection précoce va révolutionner notre façon de travailler. Il faut transmettre aux parents une sécurité et leur apprendre à développer une communication qui soit au même niveau que celle de leur enfant », a souligné Annie Dumont.
Dans les pays qui ont déjà mis en place ce dépistage, l'identification précoce du trouble permet une prise en charge rapide de l'enfant (entre 4 et 6 mois) et favorise l'émergence d'une communication initiale entre le bébé et son entourage, base indispensable au développement du langage. Ce dépistage néonatal permet également d'éviter ou de réduire la privation sensorielle, fondamentale pour le développement neurologique. Par l'appareillage, accompagné de l'éducation auditive menée par l'orthophoniste en même temps que l'accompagnement familial, la stimulation auditive se met en place sans délai et accompagne le développement de la motricité, de la vision et de toutes les fonctions qui permettent à l'enfant de se situer et d'exister dans son environnement.
La révélation du handicap d'un enfant constitue toujours un traumatisme pour les parents, mais « le stress diminue quand la prise en charge est rapide », a souligné quant à elle Adoracion Juarez Sanchez, du centre Entender y Hablar de Madrid. Les parents doivent recevoir une aide pour comprendre ce que vit leur enfant, une information claire et ajustée à leurs besoins, un soutien matériel et humain, et accéder à une formation aux systèmes de communication alternatifs ou augmentatifs. En l'absence de ce type de guidance familiale, on constate parfois l'apparition de conduites parentales plus rigides, peu flexibles et très didactiques, et une réduction des interactions fonctionnelles préjudiciables à l'enfant.
* Site acfos.org.
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