« La Petite Arabe », d'Alicia Erian

La solitude de l'enfant-femme

Publié le 09/04/2007
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L'AUTEURE EST NÉE à New York, elle est professeur de « creative writing » et auteure d'un recueil de nouvelles. Son héroïne, Jasira, est née elle d'une mère irlandaise et d'un père libanais qui lui a transmis sa peau mate et son type oriental. Elle connaît mal ce père car ses parents ont divorcé lorsqu'elle était petite, mais sa mère, trouvant qu'elle plaisait trop à son petit ami, l'envoie vivre chez lui à Houston. Elle n'a que treize ans mais elle est déjà, en apparence du moins, une femme.

A Houston, elle partage son temps entre le lycée, où on la traite d'« enturbannée » et de « négresse des sables » - on est au début de la guerre du Golfe –, et la maison, qu'elle tient comme une grande et où elle doit respecter à la lettre des règles et des interdictions souvent non dites, sous peine d'être frappée.

Le drame se noue peu après que M. Vuoso l'a embauché pour s'occuper de son fils après l'école. Le voisin est un monsieur très bien, un réserviste qui chaque matin, hisse les couleurs dans son jardin – mais qui cache à peine sa collection de « Playboy ». L'adolescente et le gamin les parcourent ensemble et Jasira découvre ainsi les plaisirs solitaires du sexe. Que M. Vuoso s'empresse de partager avec elle, consentante comme on peut l'être à treize ans. «C'était lui qui, en tant qu'adulte, faisait avec moi des choses qu'il n'était pas censé faire –des choses agréables. Et ça, c'était la preuve que j'étais exceptionnelle. Voilà pourquoi je ne voulais pas le perdre. »

Des mains de M. Vuoso elle passe aux bras d'un camarade de classe, comme par hasard un Noir, qui la persuade qu'elle ne demande que cela. «J'adorais qu'on se fasse de fausses idées sur moi. Ça me donnait l'impression qu'on avait envie de me connaître. Peu m'importait qu'on se trompe. Ce qui comptait, c'était qu'on s'intéresse à moi

Cela aurait pu se terminer très mal. Heureusement, Alicia Erian met sur le chemin de Jasira une jeune femme qui s'intéresse vraiment à elle et qui, bravant le père et le voisinage, lui apprend à ne plus se laisser manipuler. Après cela, la question de savoir si l'adolescente est coupable ou innocente n'a plus beaucoup d'intérêt.

Editions de l'Olivier, 355 p., 21 euros.

> MARTINE FRENEUIL

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8143