UNE ÉQUIPE du département d'hématologie du Royal Bournemouth Hospital (Bournemouth, Royaume-Uni) vient de mettre au point un test facile à utiliser qui permet d'identifier les patients atteints de leucémie lymphoïde chronique encore asymptomatique qui doivent être traités au plus vite.
La leucémie lymphoïde chronique (LLC) se manifeste différemment selon les individus qu'elle touche. En conséquence, la prise en charge de cette maladie varie en fonction des individus : chez certains, la maladie est si peu évolutive qu'elle ne nécessite aucun traitement. Mais chez d'autres, la LLC se manifeste sous une forme très agressive. Dans ce cas, l'espérance de vie des sujets non traités est faible.
Des thérapies très efficaces.
Cependant, il existe des thérapies très efficaces pour cette deuxième catégorie de patients (fludarabine et alemtuzumab) : si le traitement est démarré suffisamment tôt, de préférence au stade asymptomatique de la maladie, il peut conduire à une rémission complète. Mais la mise en œuvre d'un tel traitement nécessite des outils permettant aux médecins de distinguer les patients asymptomatiques atteints de LLC qui s'aggrave, de ceux chez qui la maladie reste stable.
Plusieurs marqueurs génétiques associés à la forme agressive de la LLC ont été découverts. Le plus fiable d'entre eux est le gène IgVH. L'absence de mutation dans cette région variable du gène codant pour la chaîne lourde des immunoglobulines est en effet associée à un mauvais pronostic pour les malades atteints de LLC. Hélas, les techniques de biologie moléculaire permettant de connaître le statut IgVH d'un patient sont coûteuses et difficiles à mettre en œuvre.
Il était donc nécessaire d'identifier d'autres marqueurs aussi fiables, mais plus simples à analyser. Dans cette optique, plusieurs équipes ont utilisé la technique des puces à ADN. Ce système leur a permis de découvrir divers gènes dont l'expression diffère en fonction du statut IgVH (mutée ou non). Parmi ces gènes, celui permettant la meilleure discrimination entre les deux formes de IgVH est ZAP-70. Ce gène code pour une protéine-kinase essentielle aux lymphocytes T, normalement absente des lymphocytes B. Il est cinq fois plus exprimé chez les individus portant une version non mutée de IgVH que chez les autres sujets.
La cytométrie en flux.
Orchard et coll. se sont alors employéS à vérifier que la protéine ZAP-70 pouvait constituer un bon outil pour distinguer les malades atteints d'une LLC exigeant un traitement précoce. Ils ont développé une technique pour mesurer très facilement le niveau d'expression de ZAP-70 par cytométrie en flux.
Les chercheurs britanniques se sont ensuite assurés qu'il existait bien une corrélation entre le niveau d'expression de la protéine ZAP-70, le statut IgVH et le pronostic de survie des patients atteints de LLC.
Dans ce but, l'expression de ZAP-70 a été mesurée chez 167 malades dont le statut IgVH était connu. Les résultats de cette expérience ont été très concluants. Une corrélation entre l'expression de ZAP-70 et le statut IgVH a été observé dans 93 % des cas (108 patients avec un IgVH muté et un faible niveau d'expression de ZAP-70 et 46 patients avec un IgVH non muté et un fort niveau d'expression de ZAP-70). De plus, la survie médiane des patients à niveau d'expression de ZAP-70 bas est de 24,4 années alors qu'elle n'est que de 9,3 années chez les patients qui expriment fortement la protéine.
Le niveau d'expression de la protéine ZAP-70 semble donc constituer un bon outil pour le diagnostic des formes agressives de LLC. C'est une variable simple à mesurer grâce à la technique mise au point par Orchard et coll. et sa valeur pronostique est fiable à 93 %. Bien sûr, des études complémentaires réalisées sur des cohortes de taille plus importante seront nécessaires pour confirmer le niveau de fiabilité de ce test innovant.
Orchard J. A. et coll., « The Lancet » du 10 janvier 2004, pp. 105-111.
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