Les relations franco-ivoiriennes au plus bas

La seule politique possible

Publié le 16/11/2004
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LAURENT GBAGBO est responsable et du raid qui a coûté la vie à neuf de nos soldats (plusieurs dizaines de blessés) et des émeutes qui ont suivi la riposte française. La France ne peut accepter aucune provocation, si c'en est une, pas plus qu'une « bavure » qui fait autant de victimes. La destruction de « flotte » aérienne ivoirienne aurait dû être considérée comme un moindre mal par M. Gbagbo ; après tout, les militaires français n'ont tué aucun soldat ivoirien.
Le président Gbagbo a cru ensuite qu'il pouvait tenir la dragée haute à M. Chirac en déchaînant ses « Jeunes patriotes », mouvement prétendument politique mais composé de pillards et de violeurs. Comment peut-on admettre que les « Jeunes patriotes » s'en soient pris aux biens de la communauté française, donc aux infrastructures ivoiriennes, et surtout que plusieurs de nos concitoyennes aient été violées ? Si on compte 62 morts et 1 200 blessés dans la population ivoirienne, c'est bien parce que nos soldats et nos civils étaient en danger.

LA CRISE IVORIENNE DÉMONTRE QU'IL FAUT PARFOIS FRAPPER FORT

Démagogie.
Ce lourd bilan donne la mesure de la démagogie de Laurent Gbagbo dans un pays qui était naguère un modèle de stabilité et de développement. Le gâchis est immense.
Les propos de Jacques Chirac, indiquant que la France ne laisserait pas la Côte d'Ivoire dériver vers un « régime de nature fasciste », n'étaient nullement excessifs par rapport aux horreurs qui viennent de se produire à Abidjan et pour lesquelles le gouvernement ivoirien a une extrême indulgence. Certes, le choix offert à la France, entre les séparatistes du Nord et les excités du Sud, n'est pas brillant. La situation, hélas, n'est pas en train d'évoluer dans le sens des intérêts ivoiriens. Un tiers de la population française du pays a déjà été rapatrié et il est probable que, à terme, les Ivoiriens seront livrés à eux-mêmes. C'est-à-dire à l'anarchie.
Car M. Gbabgo, quoi qu'il en dise, est incapable de mater la rébellion, il n'a aucun plan crédible et, tout ce qu'il sait faire, c'est de s'en prendre aux Français sous le prétexte qu'ils ne lui facilitent pas la tâche : en réalité, la France nourrit d'égales suspicions envers les rebelles et le régime, dont la légitimité est discutable.
Une majorité d'Ivoiriens regrettera le départ des Français ; elle préfère le travail et le calme et elle n'aurait pas voulu que les liens si étroits qui unissaient les deux pays fussent brisés à l'occasion d'une crise tout à fait artificielle : ce sont les médias ivoiriens, avec l'aide du régime, qui ont déchaîné les émeutes des « Jeunes patriotes », complètement manipulés par le gouvernement.

« Impérialisme ».
Ce désastre est l'occasion, pour la France, d'une méditation sur les limites de la diplomatie et de l'internationalisation des conflits. M. Chirac poursuit depuis deux ans avec la Côte d'Ivoire une politique rationnelle qui fait appel au pouvoir de persuasion. Il a cru, il y a un an, que les accords dits de Marcoussis ramèneraient le calme. De toute évidence, M. Bgagbo n'a eu aucun scrupule à désavouer sa propre signature, ce qui en dit long sur la qualité du personnage.
La France a ensuite fait appel à l'ONU qui a envoyé sur place un contingent constitué par des forces africaines. Mais c'est sur le dos de la France que M. Gbagbo a tenté de refaire l'unité du pays ; c'est la France qu'il a désignée aux « Jeunes patriotes », c'est la France qu'il accuse de tous les malheurs qui s'abattent sur son pays alors qu'il en est le seul responsable.
Il est vrai que les Ivoriens, scandalisés par une rébellion qu'ont fomentée des militaires mécontents, ont vu dans ce mouvement un phénomène étranger à leur propre mentalité et qu'ils ont été agacés par le souci d'équilibre de la France.
Mais M. Gbagbo lui-même et les hommes qui l'entourent, comme l'irresponsable Mamadou Koulibaly, président de l'Assemblée nationale, n'ont pas, au fond, une légitimité plus grande que celle des insurgés. En tout cas, ils viennent de faire la démonstration qu'ils sont nuisibles et dangereux. Et de prouver à M. Chirac que lorsque l'on a épuisé les moyens de la concertation, il faut savoir frapper fort. On est toujours l'impérialiste de quelqu'un.

> RICHARD LISCIA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7633