Difficile de trouver un professionnel de santé qui ne soit pas en grève au moins un jour de cette semaine. Les médecins de ville - généralistes et spécialistes - frappent un grand coup en organisant mercredi leur « Journée sans toubib ». Les pharmaciens et les dentistes se rallient à leur panache blanc : ils ne travailleront pas non plus après-demain. D'autres métiers du secteur préfèrent agir de leur côté. Pour les agents de l'hôpital public, c'est aujourd'hui que la fête commence, tandis que les infirmières libérales attendent demain pour entrer dans la danse. Les kinés fermeront leurs cabinets jeudi. Tour de piste.
Les généralistes : mercredi « sans toubibs »
La ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Elisabeth Guigou, a eu beau insisté - « Je souhaite ardemment que l'UNOF se joigne à la table des négociations » -, le président (CFDT) de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), Jean-Marie Spaeth, a eu beau tempêter contre les organisations qui « refusent de négocier », les deux syndicats qui orchestrent depuis le 15 novembre la grève des gardes des généralistes afin d'obtenir le C à 20 euros et le V à 30 euros n'ont pas plié.
Pas question pour l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF, branche généraliste de la CSMF), ni pour le Syndicat des médecins libéraux (SML) de reprendre le chemin des négociations avec les caisses.
MG-France continue de discuter seul, au cours de deux réunions techniques qui doivent avoir lieu demain, le « contrat de progrès » (600 millions d'euros en trois ans) proposé par les caisses d'assurance-maladie. Mais le syndicat du Dr Pierre Costes ne se fait plus beaucoup d'illusions sur l'issue de ces débats (voir ci-contre). Il n'est même plus exclu qu'il participe, mercredi, à la « Journée sans toubib » programmée depuis quinze jours par l'UNOF et le SML. Une action qui fait franchir un nouveau pas aux généralistes, selon un mot d'ordre on ne peut plus clair (grève des soins de mercredi 8 heures à jeudi 8 heures), et qui séduit tous azimuts chez les omnipraticiens de ville.
Le Syndicat national des médecins de groupe (SNMG, qui vient de se choisir une nouvelle présidente, le Dr Anne Serret) demande à ses adhérents de fermer leurs cabinets pour défendre les honoraires, ainsi que l'Association des médecins ostéopathes de France.
La Garde médicale de Paris, pour laquelle la grève ira jusqu'à cesser, mercredi, de transmettre les appels urgents, et les médecins sapeurs-pompiers généralistes libéraux participeront également au mouvement, ainsi que SOS-Médecins.
Si elles vont souvent au-delà des consignes syndicales, notamment par la pratique des tarifs sauvages ou par l'organisation de journées de grève spécifiques (ce sera le cas les 30 et 31 janvier en Ile-de-France), les « coordinations » de généralistes, qui se créent depuis plusieurs semaines (la dernière-née a vu le jour vendredi soir dans l'Oise), participent toutes à la journée de mercredi.
Très contagieux, le mouvement atteint les spécialistes, toujours sous l'impulsion de la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français) et du SML. La Fédération des médecins spécialistes de France (FMSF) les pousse à utiliser le biais de la fermeture des cabinets pour faire comprendre aux pouvoirs publics « que l'on ne peut pas faire de médecine sans médecins ».
Le Syndicat des néphrologues libéraux appelle ses adhérents « à cesser toute activité de consultation (ou de visite) pendant 24 heures », tout comme le Syndicat national des dermatologues-vénérologues ou la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR). Même mot d'ordre du côté de l'Union des chirurgiens français (UCF), du Syndicat national des médecins biologistes (SNMB) et du Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof).
La fièvre de la « Journée sans toubib » gagne même l'hôpital, où le SNJMG (Syndicat des jeunes médecins généralistes), l'ISNCCA (Intersyndicat national des chefs de clinique assistants des hôpitaux), le SNDELMH (Syndicat national de défense de l'exercice libéral de la médecine à l'hôpital) appellent leurs adhérents à cesser le travail. Sans demander aux médecins qu'il représente de se mettre en grève, l'INPH (Intersyndicat national des praticiens hospitaliers) apporte son « soutien » aux libéraux.
Les pharmaciens : mercredi et peut-être au-delà
Non content de s'associer à la journée de mercredi, le Collectif des groupements des pharmaciens, qui réunit la moitié des officines françaises, menace d'organiser à son tour diverses réjouissances. Une grève des gardes, la suspension des télétransmissions, un blocage des transmissions de statistiques... sont à l'étude. Les pharmaciens demandent au gouvernement de leur donner « les moyens nécessaires à l'accomplissement de (leurs) missions de santé publique ».
Les chirurgiens-dentistes : mercredi et le 1er février
Les dentistes appliquent depuis le début de l'année le dépassement d'honoraires exceptionnel pour exigence particulière du patient (DE) pour les extractions et les actes d'urgence. Afin de donner davantage de poids à leur demande de réforme du financement des soins dentaires, les chirurgiens-dentistes ont le choix. La Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) leur recommande de faire grève mercredi en même temps que les médecins, tandis que l'Union des jeunes chirurgiens-dentistes (UJCD) les invite à se préparer à une grève des extractions qui démarrerait le 1er février.
Les kinésithérapeutes : jeudi
Le Syndicat national des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (SNMKR) appelle jeudi à la fermeture des cabinets pour protester contre le rationnement des actes et réclamer une hausse des tarifs. En revanche, la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR) préfère considérer comme un point de départ la parution au « Journal officiel » du 13 janvier du texte rétablissant les lettres clés des kinés au tarif (2,04 euros) qui étaient les leurs il y adix-sept mois, avant que les caisses ne les baissent
Les infirmières : demain, puis en février
Réclamant des revalorisations salariales et tarifaires, les infirmières libérales sont en grève des soins demain et manifestent à Paris à l'appel de Convergence Infirmière (qui revendique 8 000 adhérentes), de l'Organisation nationale des infirmiers libéraux (Onsil), des infirmières scolaires de la FSU et de la Coordination priorité santé des hôpitaux publics.
La Fédération nationale des infirmiers (FNI, 7 000 adhérentes) durcit son mouvement en cours de grève des soins à domicile en appelant à la fermeture des cabinets du 2 au 12 février. Elle lance aussi un mot d'ordre d'application de tarifs d'honoraires libres à partir du 13 février, date effective de la résiliation de la convention nationale.
Les hôpitaux : aujourd'hui
A l'hôpital, l'agitation redémarre. Majoritaires dans les établissements où elles y représentent 65 % des personnels, la CGT, FO, la CFTC et SUD orchestrent aujourd'hui une grève nationale reconductible. Ces quatre organisations n'ont pas signé, en septembre dernier, le protocole d'accord régentant le passage aux 35 heures de la fonction publique hospitalière et ce texte leur reste décidément en travers de la gorge : elles annoncent un « désastre », tandis que, localement, l'agitation liée aux négociations sur la réduction du temps de travail grignote le parc hospitalier (l'hôpital de Saint-Gaudens, le CHU de Clermont-Ferrand étaient en grève la semaine dernière).
Médecins urgentistes
L'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMUHF) ne participera pas à la « Journée sans toubibs ».
En revanche, le syndicat veut « interpeller les candidats à l'élection présidentielle » par « une journée nationale d'action début février », au côté de syndicats d'internes et de personnels hospitaliers. Reçue vendredi par Bernard Kouchner, l'AMUHF a réclamé 40 % d'effectifs supplémentaires en médecins et infirmières aux urgences, compte tenu de leur manque de moyens chronique et de l'application des 35 heures.
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