ELLE EST PLUTÔT SYMPATHIQUE. Le genre avenant, bourgeoise tendance Côte d'Azur, 57 printemps bien assumés, et un petit air de ressemblance avec Marine Le Pen. En revanche, elle n'est pas ponctuelle : 25 min de retard pour le rendez-vous qu'elle avait fixé, c'est beaucoup. Mais elle ne s'en sort pas mal, avec un refrain du style : «désolée, mais mes journées font 48heures, vous savez ce que c'est. »
Médecin spécialiste en rééducation fonctionnelle, Joëlle Mélin exerce à Aubagne, près de Marseille. C'est d'ailleurs dans cette ville portuaire qu'elle a fait ses études de médecine. Elle est également conseiller régional FN pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Joëlle Mélin ne cache pas qu'elle est mariée, mais ne souhaite pas se confier plus avant au sujet de sa vie privée : «J'essaie de séparer l'action politique de ma vie familiale qui ne regarde que moi», dit-elle.
Un engagement lié à l'affaire du sang contaminé.
Tout au plus apprendra-t-on que son engagement en politique l'a empêchée d'avoir des enfants, mais c'est à mi-voix qu'elle le confesse.
C'est très jeune qu'elle a rejoint le Front national : «J'ai d'abord commencé par une simple adhésion à titre privé, précise-t-elle. Un peu plus tard, il y a eu un facteur déclenchant dans mon engagement politique, c'est l'affaire du sang contaminé. Ça a provoqué en moi un déclic d'indignation majeur.»
Joëlle Mélin avait bien, jusqu'à cette date, adhéré à différents syndicats professionnels, mais elle s'aperçoit que «le syndicalisme a ses limites: si on veut inverser le plus vite possible la dynamique actuelle, il faut changer les lois, et donc s'engager politiquement».
Pendant trois ans, Joëlle Mélin joue les utilités au FN, jusqu'à l'année 1996, au cours de laquelle Jean-Marie Le Pen lui propose d'animer le pôle santé de son mouvement. Avec une mission : «Aider Jean-Marie Le Pen à élaborer un programme complet de sauvetage de notre système de santé, depuis son financement et sa gestion par la Sécurité sociale jusqu'à la distribution de soins et la participation de tous les professionnels de santé.» Vaste programme, d'autant que Joëlle Mélin ajoute aussitôt que «le système de santé actuel fonctionne mal car son mode de gestion est celui de la gestion de la pénurie. Pénurie des acteurs de santé et pénurie financière pour cause de gestion calamiteuse, imprévoyante et opaque».
De plus, ajoute-t-elle en substance, il est impossible de faire les comptes exacts de la Sécu, «car la commission permanente des comptes n'en a pas les moyens légaux».
Le pôle santé du FN est composé d'une vingtaine «d'experts» – mais on n'en connaîtra pas les noms – avec lesquels Joëlle Mélin a des contacts réguliers, soit réels, soit virtuels, par le biais d'Internet ou par téléphone.
Audit des comptes de la Sécu.
Dès qu'elle parle de Jean-Marie Le Pen, Joëlle Mélin s'anime. Elle l'appelle «le patron» et lui voue une admiration sans bornes : «C'est un homme d'abord très facile et très attentif à toutes les suggestions», précise-t-elle. Reprend-il à son compte les travaux du pôle santé du FN, ou y met-il sa patte personnelle ? «Il fait ce qu'il doit faire de ce que nous lui fournissons», répond-elle, sibylline. Et le militantisme, dans tout ça ? «C'est une sorte de longueur d'onde interne, faite de convictions. D'ailleurs, la politique, c'est assez féminin, un peu comme la protection qu'apporte la mère de famille à son enfant.»
Joëlle Mélin se doute bien que son « patron » n'a que de modestes chances d'être élu président, mais elle répond néanmoins volontiers à la question de savoir si, dans cette hypothèse, elle aimerait se retrouver au ministère de la Santé : «Ce n'est pas mon principal objectif, assure-t-elle, mais tout ce qui peut aller dans le sens de la concrétisation de mes attentes doit être accepté.» Sans doute pour pouvoir «faire l'audit des comptes de la Sécu», première mesure qu'elle déciderait si elle accédait à ce poste ministériel. Sans doute aussi pour tenter de lutter contre l'eugénisme, que les rapides progrès de la médecine rendent, selon elle, inéluctable. Car cette femme plutôt dynamique semble finalement assez pessimiste, par exemple quand elle assure que «les dysfonctionnements actuels de notre système de santé ont des causes très anciennes, dont le but véritable est sa marchandisation».
Ou quand elle se lance dans une longue explication des dangers qui guettent la France en matière d'immigration, en faisant une froide addition de l'ensemble des populations sous-développées de la planète.
Pour ces populations, ajoute-t-elle en substance, l'Europe est un pays de cocagne ; on peut comprendre qu'ils souhaitent venir y vivre. Mais Joëlle Mélin est pressée car elle doit intervenir à la tribune d'un congrès de pharmaciens. Au moment de partir, elle a un dernier mot sur Jean-Marie Le Pen : «Il n'a pas changé de discours, ce sont les médias qui ont un angle moins incisif à son égard. Car plus nos idées sont reprises, moins elles heurtent.»
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