Comment est-on saisi par la politique ? Est-ce un virus ou une addiction ? Doit-on rechercher un facteur génétique ? Si l’on retient cette dernière hypothèse, un grand-oncle a bien été conseiller général. En vérité, chez Catherine Lemorton, née en 1961, aujourd’hui présidente de la Commission des affaires sociales, l’attachement commence très tôt, dans l’enfance. Non par la révolte, le sentiment d’injustice mais par les chuchotements, le respect qui enveloppe l’arrivée d’un député dans sa DS noire au domicile des grands-parents... À l’époque, la petite Catherine a 8 ans. C’était juste avant 1968. Dans la belle demeure du Nord de la France située près des champs labourés par le souvenir des deux guerres mondiales et les obus, l’engagement dans la résistance, on ne jure que par le Grand Charles. On est à droite par évidence.
Il y a pourtant des indices qui ne trompent pas. La jeune Catherine, année après année, est toujours élue déléguée de classe. Mais cela ne suffit pas pour expliquer un engagement. Et surtout une conversion. Pour précipiter la cristallisation, une collision est indispensable. En France, dans ces années-là, c’est souvent le prof de philo qui joue le rôle de prophète, d’ouverture des consciences. 1978, premier cours de l’année, la classe planche sur le Manifeste du parti communiste de Marx. C’est la révélation. La jeune Catherine, excellente élève dans toutes les disciplines, obtient un 18/20 et la reconnaissance de son professeur. Dans les mêmes mois, c’est aussi le début d’un flirt avec celui qui est toujours son mari. Choc de classe avec la vie quotidienne d’une famille ouvrière riche surtout de ses sept enfants et de sa dignité. « Pour moi c’est alors l’évidence, les bonnes idées sont à gauche », s’exclame Catherine Lemorton dans son vaste bureau parisien. Et aussi la croyance en la rédemption. Il n’y aura plus de retour dans le giron familial. La gauche devient une famille d’accueil. Une thérapeutique contre toutes les blessures de l’enfance. Et le combat politique dans ses batailles minuscules, une arme pour inscrire son nom, justifier une vie à la manière d’un engagement artistique. La jeune étudiante s’inscrit en khâgne pour devenir archiviste. Elle deviendra pharmacienne un peu par hasard. Et s’investira dans les réseaux d’aides aux toxicomanes. Mais c’est la nécessité qui lui fait prendre la carte du parti socialiste le 22 avril 2002 après la déroute de Lionel Jospin. Elle sera élue par surprise pour la première fois il y a cinq ans en conquérant une circonscription sur les conseils d’Arnaud Montebourg à Toulouse acquise à la droite.
Catherine Lemorton est de cette génération qui n’aura connu aucune révolution. Et traversé l’histoire comme par procuration. Son héros sera donc Robespierre. Elle en est aujourd’hui la meilleure avocate.
Pourquoi à la fin fait-on de la politique ? lorsque l’on est extravertie, on peut aussi rêver d’une carrière sur les planches et jouer Tchekhov, l’auteur préféré. Il faudrait alors sonder sa propre mélancolie et la révéler au public. Cela peut être douloureux. Il est parfois plus simple de contribuer à changer la vie des autres…
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