«ÊTES-VOUS capable de vous concentrer sur ce que vous faites?» La question est posée avec quatre réponses au choix : «Mieux que d'habitude» (1 point) , «Comme d'habitude» (2 points), «Moins que d'habitude» (3 points) , «Beaucoup moins que d'habitude» (4 points). Onze autres questions suivent avec de même quatre réponses possibles, notées de 0 à 3 ou de 1 à 4 : «Avez-vous eu des problèmes de sommeil à cause de vos soucis?», «Vous sentez-vous constamment sous tension?», «Vous sentez-vous mal à l'aise ou déprimé?», «Avez-vous pensé que vous ne valez rien?»… C'est le GHQ (General Health Questionnaire) simplifié de Goldberg, l'un des questionnaires standardisés et validés utilisés pour évaluer le bien-être au travail. La plupart de ces questionnaires, adaptés de l'anglais et comportant de nombreuses questions, sont souvent lourds à utiliser en médecine du travail, notamment à l'hôpital, où le temps de consultation est compté. C'est pourquoi le Dr Chantal Delmas (service de santé au travail, Hôtel-Dieu, Paris) a eu l'idée de mettre au point une échelle visuelle, comme celles qui mesurent la douleur (Visual Analogic Scale).
L'EVA-BT (échelle visuelle analogique du bien-être au travail) est une réglette toute simple : pour répondre à la question «Comment vous sentez-vous au travail?», le salarié est invité à déplacer un curseur qui peut aller de «Très bien au travail» à «Très mal au travail». Du côté du salarié, la réglette n'a pas de marque ; du côté du médecin du travail, elle est graduée de 0 à 10.
Facilitateur de dialogue.
Et ça marche ! Ainsi, pour les 205 personnes (100 médecins, 84 personnels paramédicaux et 21 administratifs) vues entre janvier et mars 2006 par le même médecin lors de la visite systématique de santé au travail, le GHQ et l'échelle visuelle donnent globalement le même résultat, témoignant d'une relative satisfaction au travail. Au questionnaire, la moyenne des points est de 16,44 (sur 42 au total si tout va mal) et à l'EVA-BT de 2,89 (9 si l'on se sent très mal au travail). Les femmes se sentent un peu moins bien que les hommes (3,11 contre 2,51 à l'échelle visuelle) et les personnels administratifs et paramédicaux moins bien que les médecins (3,61 et 3,34 contre 2,36). Il existe en outre une corrélation négative entre le niveau de bien-être et l'âge.
L'étude, publiée dans les « Archives des maladies professionnelles et de l'environnement », montre donc «l'excellente corrélation» entre les deux instruments de mesure. A ce jour, Chantal Delmas a utilisé son échelle visuelle auprès de plus de 400 personnes, sans jamais se heurter à un refus. Outre la rapidité et la facilité d'utilisation, qui permet de réaliser des évaluations prospectives, l'EVA-BT joue un rôle de signal d'alerte et, surtout, de facilitateur du dialogue. Certains osent dire qu'ils ne vont pas bien. Et dans le milieu hospitalier, c'est peut-être plus difficile qu'ailleurs à avouer.
* Avec G. Plu-Bureau (unité de gynécologie endocrinienne, Hôtel-Dieu), « Décembre 2007 », vol. 68, 5-6 (Elsevier Masson).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature