Y a-t-il eu beaucoup de médecins libéraux parmi les manifestants qui ont battu le pavé mardi dans toute la France pour demander le retrait du projet de loi de réforme des retraites, dont l’examen à l’Assemblée nationale est en train de débattre ? Ce n’est pas certain. Pourtant, les généralistes sont concernés au même titre que les autres assurés par la réforme. Ce qui est un peu passé inaperçu jusqu’à présent. Il est vrai que le report de l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans, la mesure la plus controversée du projet de loi, touche la profession de manière assez théorique. Si les médecins libéraux peuvent prétendre à une pension au même âge que les autres Français, peu le font car cela implique des minorations très dissuasives pour le régime complémentaire et l’ASV : 5 % par année d’anticipation avant 65 ans avec un maximum de 25 %. Mais toujours est-il que les généralistes qui le voudront ne pourront bientôt plus prendre leur retraite à 60 ans. Ce curseur sera progressivement relevé pour atteindre 62 ans en 2018, en l’augmentant à partir de 2011 de quatre mois par an. La première génération concernée est celle qui est née en 1951.
Actuellement, l’âge moyen de départ à la retraite des médecins est, selon la CARMF, de 65,7 ans. Mais avec la réforme pour garder le même montant de pension, il faudra probablement décaler son départ jusqu’à 67 ans. En effet, le projet de loi du gouvernement prévoit également un report de deux ans du deuxième curseur d’âge dans le système des retraites : celui de l’âge du « taux plein ». Le cabinet d’Éric Woerth a confirmé que « le report de l’âge du taux de plein de 65 à 67 ans concerne également et directement le régime de base de la CARMF ».
Quelle sera la conséquence de cette mesure si le projet de loi est adopté dans l’état ? Le médecin libéral pourra toujours prendre sa retraite à 65 ans. Mais dans ce cas, une décote pourra lui être appliquée : la retraite de base sera minorée de 1,25 % par trimestre manquant dans la limite de vingt trimestres. Pour mémoire, il faut actuellement 162 trimestres de cotisations pour prétendre à une retraite complète. Ce seuil sera porté à 163 en 2011, 164 en 2012, puis continuellement rallongé les années suivantes.
Mais bonne nouvelle pour les médecins libéraux, ce report ne concerne que le régime de base, qui ne représente aujourd’hui qu’un peu moins du cinquième du montant de la pension. La réforme n’a un impact que sur ce premier étage du régime de retraite de la CARMF. Cette dernière reste maître des règles du jeu pour le régime complémentaire et pour l’ASV.
Or pour le régime complémentaire (qui représente 42 % du montant de la pension en moyenne), il n’y a pas d’inquiétude à avoir. Ce régime est toujours à l’équilibre financier, a confirmé le président de la CARMF, le Dr Gérard Maudrux. En revanche, la situation de l’ASV (39 % du montant de la pension) est beaucoup plus inquiétante. Ce dernier régime a connu pour la dernière fois une situation d’équilibre en 2009 et cette année il a dû puiser dans ces réserves pour assurer quatre mois de financement. Malgré les appels répétés du Dr Maudrux, l’ASV des médecins n’a toujours pas été réformée. Ce sujet devrait faire partie des négociations en vue de la prochaine convention médicale. Les perspectives sont sombres car, si rien n’est fait d’ici là, l’ASV connaîtrait une situation de cessation de paiement au tournant de 2012/2013. La situation de la démographie est très défavorable car les baby-boomers en blouse blanche commencent à faire valoir leur droit à la retraite. Hausse des cotisations retraites et baisses des montants des pensions sont à craindre dans les prochaines années.
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