Démembrement des cancers du sein

À la recherche de la signature idéale

Publié le 28/06/2018
Article réservé aux abonnés
génomique sein

génomique sein
Crédit photo : PHANIE

Le cancer du sein recouvre en fait de nombreuses maladies différentes. À chaque femme son cancer du sein, pourrait-on dire, avec des anomalies propres au niveau des gènes de la tumeur. Le but de la génomique va être, par l’analyse des gènes, d’avoir une valeur pronostique de l’évolution de chaque tumeur de chaque patiente, si possible prédictive de l’efficacité des thérapeutiques à notre disposition. Encore actuellement, 30 % des patientes dites de bon pronostic vont rechuter, et nous ne sommes pas capables de définir avec certitude qui elles sont.

La classification moléculaire des cancers du sein a permis de différencier quatre groupes principaux : les cancers luminaux A, fortement hormonodépendants (RE+++, RP+++) et peu proliférants, avec un Ki-67 faible, inférieur à 15 % ; les cancers luminaux B, hormonodépendants, mais moins que les précédents, les récepteurs de la progestérone étant souvent négatifs, qui s’accompagnent d’une prolifération plus importante, avec un Ki-67 supérieur à 15 % ; les cancers qui surexpriment HER 2 (facteur de croissance des épithéliums de type 2), et les cancers « triples négatifs », qui n’expriment ni les récepteurs hormonaux ni HER 2 et qui sont complètement indifférenciés et très proliférants.

Pour les cancers luminaux A, nous proposons généralement une hormonothérapie de type tamoxifène ou inhibiteurs de l’aromatase, ces tumeurs ne nécessitant pas de chimiothérapie. Pour les cancers triples négatifs, la chimiothérapie sera au contraire quasi systématique. Pour les cancers qui surexpriment HER 2, nous proposons l’association d’une chimiothérapie et d’un anticorps monoclonal anti-HER 2, le trastuzumab (Herceptine).

Éviter une chimiothérapie inutile

Par contre, pour les cancers luminaux B, on peut hésiter entre une hormonothérapie seule ou associée à une chimiothérapie. Nous proposons dans ce cas l’utilisation d’une signature moléculaire, afin d’éviter une chimiothérapie inutile à certaines patientes. Nous avons actuellement plusieurs signatures multigéniques pour nous aider dans nos propositions thérapeutiques. Oncotype DX et MammaPrint sont des tests centralisés, les prélèvements sont envoyés aux États-Unis pour l’un et aux Pays-Bas pour l’autre ; Prosigna (PAM50) et EndoPredict sont des tests décentralisés effectués dans les laboratoires locaux.

Ces signatures ont été majoritairement évaluées pour des cancers du sein sans envahissement ganglionnaire. Elles vont donc définir un risque de rechute, faible ou fort pour EndoPredict et MammaPrint, faible, intermédiaire ou fort pour Oncotype DX et Prosigna. EndoPredict et Prosigna semblent apporter un bénéfice supplémentaire pour les rechutes tardives.

Toutes ces signatures comprennent peu ou prou des gènes impliqués dans la voie des récepteurs hormonaux, de HER 2, de la prolifération, de l’aptitude à métastaser et du stroma. Il est important de combiner les paramètres cliniques classiques : la taille, l’envahissement ganglionnaire, les emboles tumoraux… et ces signatures. Elles vont donc « prédire » un risque de rechute, mais malheureusement pas la chance d’efficacité de nos traitements.

exergue : Il est important de combiner, aux informations génétiques, les paramètres cliniques classiques : la taille, l’envahissement ganglionnaire, les emboles tumoraux…

Sénopôle Hôpital Saint-Louis, APHP, Université Denis Diderot

Pr Marc Espié
En complément

Source : Bilan Spécialiste