Les AAC antitissus (Acat)
Sur la même lame, on dispose une coupe de foie, une coupe de rein et une coupe d'estomac de rat. L'identification de l'auto-anticorps (AAC) repose sur l'aspect en immunofluorescence sur les trois coupes d'organe.
•Les AAC des hépatites auto-immunes (HAI) (tableau 1) sont dépistés par IFI, antimuscle lisse dont la sensibilité dans l'HAI type I est de 80 % et qui disparaissent habituellement sous traitement. Les anti-LKM1, présents aussi dans 3 % des infections à VHC, orientent vers une HAI de type II. En cas d'HAI « séronégative », il faudra rechercher les Ac anti-LC1 (Liver Cytosol) dans les HAI de type II, qui ont un intérêt pronostique et dont le titre varie selon le stade et le traitement ou les AC anti-SLA (Soluble Liver Antigen) par immunodot ou Elisa en centre spécialisé, qui rattrapent le diagnostic d'HAI de type I en cas de négativité des AC antimuscle lisse.
L'HAI de type I est surtout rencontrée chez la femme (2 pics à 20 et 40 ans) avec 25 % de cirrhose au diagnostic. L'HAI de type II est essentiellement la forme de l'enfant avec une évolution rapide vers la cirrhose (82 % à trois ans).
•Les AC anticellules pariétales gastriques très évocateurs de maladie de Biermer devant un tableau complet asso- ciant anémie macrocytaire avec déficit en vitamine B12 et gastrite fundique atrophique. Les AAC peuvent surtout orienter la démarche dans des cas plus difficiles de maladie de Biermer sans anémie ni macrocytose (signes neurologiques isolés ou association à d'autres maladies auto-immunes : vitiligo, dysthyroïdies...). Leur sensibilité n'est que de 70 %, mais ils sont très spécifiques.
• Les AC antifacteur intrinsèque souvent associés sont sensibles (90 %), mais peu spécifiques (existent chez 16 % des femmes de plus de 65 ans).
•Les AC antimitochondries (type2) qui sont quasi spécifiques (95 %) de la cirrhose biliaire primitive, avec une prévalence de 90 à 99 %. Le tableau clinique est celui d'une femme présentant un prurit et une cholestase biologique. Leur titre est stable et indépendant du traitement. Un autre AAC intéressant dans la CBP est l'anti-GP210, qui a une sensibilité de 25 à 43 %, une spécificité de 99 %, à rechercher en cas de CBP séronégative. C'est un marqueur de mauvais pronostic.
Citons pour finir les principales familles d'AAC spécifiques d'organes, détectés sur d'autres tissus ou par d'autres méthodes : les AC anti-îlots, anti-insuline et anti-IA2 dans le diabète de type 1, mais surtout l'AC anti-GAD, marqueur du diabète auto-immun à marche lente (Lada), les AC antithyroglobuline et antithyroperoxydase des thyroïdites, antirécepteur de la TSH de la maladie de Basedow, antitransglutaminase de la maladie coeliaque et anti-CCP (peptide c citrulliné) de la polyarthrite rhumatoïde pour les plus spécifiques et surtout les plus utilisés.
Les Anca
Les anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (Anca) sont surtout utiles pour le diagnostic des vascularites ; leur place dans le suivi reste indéterminée, même si le taux diminue souvent après mise en place du traitement.
En cas de rechute, la réascension du titre est généralement contemporaine ou précède les signes cliniques (trois dilutions). Les Anca sont dépistés par IFI sur frottis de polynucléaires humains fixés à l'éthanol/formol et ils doivent être typés par immunodot (pour les urgences) ou test Elisa. Ils sont non spécifiques et associés à divers contextes : médicaments, exposition à la silice, infections (endocardites, tuberculose, VIH), autres maladies auto-immunes, maladies digestives inflammatoires…
•Les c-Anca reconnaissent habituellement la protéinase3 (PR3), ce sont alors de bons marqueurs d'une granulomatose de Wegener (c-Anca et PR3 = 75 % et jusqu'à 90 % dans les formes systémiques.
•Les p-Anca reconnaissent habituellement la myéloperoxydase (MPO), dans le cadre des polyangéites microscopiques, du syndrome de Churg et Strauss et des glomérulonéphrites nécrosantes focales.
•Des Anca MPO ou PR3 négatifs orientent vers la catégorie «x» Anca présente dans 50 à 70 % des cholangites sclérosantes primitives, de 40 à 80 % des rectocolites hémorragiques (RCH), de 10 à 20 % des maladies de Crohn.
Approche dans les Mici
Approche biologique du diagnostic des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin.
Le diagnostic biologique des Mici peut être envisagé selon la démarche proposée dans le tableau 2, en couplant la recherche des Anca et des Ac anti-Saccharomyces cerevisiae (Asca) dont le dépistage des IgG et IgA en IFI au 1/1 000 est réalisé sur culture de levures.
Les Asca ne sont pas spécifiques puisqu'ils ont été retrouvés dans la maladie de Behçet, la cholangite sclérosante primitive et la spondylarthrite ankylosante.
Les Asca peuvent orienter vers la maladie de Crohn avec cependant une faible sensibilité. Il n'y a pas de corrélation entre le titre et l'activité de la maladie.
La recherche des Asca et des Anca est proposée dans le diagnostic d'une colite indéterminée : le « couple : Asca +, – Anca – » est en faveur du diagnostic de maladie de Crohn et le « couple : Anca + – Asca – » en faveur de celui de RCH.
Conclusion
Le monde de l'auto-immunité compte actuellement de très nombreux membres de sensibilité et de spécificité très inégales pour le diagnostic de pathologies à expression clinique variable. Seul un petit nombre est utilis(able)é en pratique quotidienne ou en débrouillage-dépistage et n'a de valeur que lorsqu'il existe un contexte clinique.
La qualité et la valeur informative des résultats rendus dépendent de multiples facteurs : de la maladie en cause et de son évolutivité, de la technique utilisée, de l'expérience du biologiste et surtout de la qualité de la communication et de la coopération entre clinicien et biologiste. Ce dernier pourra utilement commenter les résultats si des renseignements cliniques précis lui sont fournis. A l'inverse, une connaissance des bases simples des méthodes diagnostiques biologiques des AAC aide le clinicien à mieux prescrire cette gamme d'examens et à mieux comprendre et à interpréter les conclusions du biologiste.
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