PRATIQUE
1) TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE
Anticholinestérasiques
Le traitement principal repose sur les anticholinestérasiques (tableau 1). Ces médicaments agissent en bloquant l'acétylcholine estérase et prolongent l'action de l'acétylcholine dans les synapses cholinergiques. Les principaux effets secondaires sont une augmentation des sécrétions (hypersalivation, encombrement bronchique), une diarrhée par augmentation de la motricité digestive, des crampes et des fasciculations. Ces effets secondaires sont à rechercher systématiquement et sont le signe d'un surdosage. A l'extrême, l'excès d'acétylcholine va entraîner un blocage de la transmission neuromusculaire mimant une crise myasthénique. Les deux principaux anticholinestérasiques utilisés sont le Mestinon, dont il existe une forme retard, et la Mytélase.
Des règles à respecter
Un certain nombre de règles doivent être respectées pour leur prescription.
- Ils doivent être pris à jeun, une demi-heure à une heure avant les repas.
- Il n'y a pas avantage à associer entre eux deux anticholinestérasiques.
- La posologie quotidienne de l'anticholinestérasique choisi doit être recherchée par tâtonnement en commençant par des doses faibles. Les doses utilisées sont variables d'un malade à l'autre réparties en trois ou quatre prises, il ne semble pas utile de dépasser des doses supérieures à 6 comprimés par jour.
- En cas de troubles de déglutition, l'anticholinestérasique doit être administré par voie parentérale ou par sonde gastrique.
Certains malades sont gênés par une hypersalivation importante qui peut être corrigée par l'administration de gouttes de teinture de belladone.
La distinction entre un surdosage en anticholinestérasique et décompensation de la maladie est quelquefois difficile et parfois, l'arrêt de toute thérapeutique anticholinestérasique s'impose à la condition d'avoir une surveillance rigoureuse, notamment respiratoire et des troubles de déglutition et de pouvoir recourir rapidement à une intubation trachéale. La réalisation d'un test diagnostique par anticholinestérasique d'action rapide dans ces conditions peut être délétère, de même que la prescription d'une perfusion continue de Prostigmine.
2) TRAITEMENTS IMMUNOMODULATEURS
Ces traitements s'imposent en cas de mauvais contrôle de la maladie par les anticholinestérasiques seuls. La mise en place de ces traitements ne pourra se faire qu'en milieu hospitalier, en milieu spécialisé et proche d'une unité de réanimation, ou d'emblée en réanimation s'il existe une atteinte respiratoire.
Il faut distinguer plusieurs situations : le premier cas est celui du myasthénique de découverte récente chez qui l'introduction des anticholinestérasiques peut suffire à contrôler la symptomatologie, et les traitements complémentaires seront introduits si le malade reste symptomatique. Le deuxième cas est celui du myasthénique déjà connu pour lequel se discutera l'introduction ou le renforcement des traitements immunosuppresseurs.
Dans tous les cas, la recherche d'un facteur déclenchant d'une poussée est indispensable. En effet, des poussées peuvent être déclenchées par certains facteurs comme des médicaments, y compris en application locale (tableau 2), des infections ou une baisse de la corticothérapie par exemple.
a) Corticoïdes et immunosuppresseurs
La dose initiale de corticoïdes est de 1 mg/kg/j, poursuivie pendant un mois, puis la posologie est diminuée de 10 mg par mois jusqu'à une dose plateau de 0,5 mg/kg suivie d'une diminution de la dose de 5 mg/mois jusqu'à un plateau de 10 mg. Il faut savoir que les corticoïdes risquent d'entraîner une aggravation transitoire des signes myasthénique au bout de trois à quatre jours de traitement. Les immunosuppresseurs sont utilisés d'emblée en association aux corticoïdes, puisque l'effet des immunosuppresseurs n'est visible qu'au bout de plusieurs semaines. L'immunosuppresseur le plus utilisé est l'azathioprine (Imurel) ; il doit être introduit à dose progressive jusqu'à une dose de 2 à 3 mg/kg. Les effets secondaires sont essentiellement digestifs, hépatiques, hématologiques et infectieux, et cèdent à la diminution ou à l'arrêt du traitement. D'autres immunosuppresseurs ont été proposés, comme la ciclosporine ou le cyclophosphamide (Endoxan) et plus récemment le mycophénolate mofétil (CellCept).
b) Immunoglobulines intraveineuses (IVIg) et échanges plasmatiques (EP)
Ces traitements sont réservés aux crises ou poussées sévères. Les EP et les IVIg ont une efficacité identique avec un taux de succès de l'ordre de 50 % pour les deux traitements. Les effets indésirables sont moins importants avec les IVIg qu'avec les EP. Ces deux traitements utilisent des produits dérivés du sang, ils nécessitent donc l'information du malade et son suivi sérologique. Les EP ont un effet rapide et transitoire et nécessitent de façon impérative l'introduction d'un traitement a visée immunosuppressive et corticoïde.
Le nombre d'EP habituellement recommandé est de deux à cinq en dix à quinze jours. La dose d'IVIg habituellement utilisée est de 2 g/kg répartie en deux ou cinq jours. La perfusion doit être lente, en douze heures, en ayant vérifié l'absence de contre-indication (créatininémie supérieure à 100 μmol/l, allergie aux IGg).
c) Thymectomie
La thymectomie est systématique en cas de suspicion de thymome sur le scanner thoracique, et reste discutée dans les autres cas, notamment chez un sujet jeune. Elle devra être suivie d'une radiothérapie complémentaire en cas de thymome invasif à l'histologie.
Tableau 1 - Médicaments anticholinestérasiques | ||
Médicaments | Administration | Durée daction |
Chlorure dédrophonium (Reversol) | I.V. (ampoules à 10 mg/ml) | Quelques minutes |
Néostigmine (Prostigmine) | orale (comprimés à 15 mg) | 2 heures |
parentérale (ampoules à 0,5 mg) en IV ou IM | 2 heures | |
Pyridostigmine (Mestinon) | orale (comprimés à 60 mg) | 4 heures |
Pyridostigmine retard | orale (comprimés à 180 mg) | 8 à 10 heures |
Ambénomium (Mytelase) | orale (comprimés à 10 mg) | 4 à 6 heures |
Tableau 2 - Médicaments contre-indiqués dans la myasthénie |
Médicaments formellement contre-indiqués Aminosides, Colimycine, polymyxine, cycline injectable, quinine-chloroquine quinidine, procaïnamide, diphénylhydantoïne, triméthadione, bêta-bloquants dantrolène, D-pénicillamine, magnésium injectable, tous les curarisants |
Médicaments à utiliser avec précaution Neuroleptiques, benzodiazépines, phénothiazines, carbamazépine |
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