CONGRES HEBDO
L ES données de la littérature permettent de préciser ce que doivent être les traitements pharmacologiques lors de la prise en charge initiale de l'asthme aigu de l'adulte. Ces traitements reposent avant tout sur les bêta 2-agonistes administrés préférentiellement par la voie inhalée, qui est plus efficace et mieux tolérée que la voie intraveineuse, même dans les asthmes aigus graves hypercapniques. Lorsque aucune de ces deux voies n'est disponible, la voie sous-cutanée constitue une alternative valable. En ce qui concerne la voie inhalée, il est possible d'utiliser un aérosol-doseur couplé à une chambre d'inhalation (les doses pouvant aller jusqu'à 24 bouffées/h). La nébulisation (continue ou intermittente) est légèrement plus onéreuse en termes de matériel, mais présente l'avantage de nécessiter une surveillance moins prolongée lors de l'administration. L'adjonction d'anticholinergiques (bromure d'ipratropium) en première intention offre un bénéfice supplémentaire en termes de fonction respiratoire et, surtout, de taux d'hospitalisation (diminution de 40 %), en particulier chez les malades les plus sévères (débit de pointe initial inférieur à 35 % de la valeur théorique).
Le préhospitalier
A l'opposé, les théophyllines (par voie intraveineuse) n'ont pas leur place en première ligne, du fait de leur trop faible rapport efficacité-tolérance. Enfin, une corticothérapie systémique précoce est justifiée d'emblée dans toutes les crises graves, et dans les autres cas si l'amélioration dans la première heure est insuffisante. Elle peut être administrée par voie orale ou parentérale, ne doit pas obligatoirement comporter de fortes doses et peut être interrompue après quelques jours (une fois le malade amélioré de façon stable). La voie nébulisée exclusive (budésonide nébulisé) est en cours d'évaluation dans cette indication.
La prise en charge préhospitalière de l'asthme aigu a été évaluée dans une enquête auprès de certains SMUR français (Dr P. Plaisance, SMUR Lariboisière, Paris). En premier lieu, le critère clinique principal d'évaluation est très variable selon les médecins, et seulement 30 % utilisent le DEP (avec un seuil à 150 l/min pour la plupart, alors qu'un seuil exprimé en pourcentage de la théorique serait plus fiable à l'échelon individuel). La nébulisation est quasiment toujours employée pour l'administration des bronchodilatateurs, même si 20 % environ la réservent à l'asthme aigu non grave ; la place de la voie veineuse en cas d'asthme aigu grave ne recueille pas de consensus, et les convictions sur l'intérêt de la voie sous-cutanée restent partagées. Soixante pour cent des praticiens interrogés ne tiennent pas compte de la gravité de la crise dans leur décision d'administration des anticholinergiques. Quant aux corticoïdes, ils ne sont administrés systématiquement que par 60 % des médecins, en grande majorité par voie I.V. Enfin, seulement un tiers des médecins emploient un score de gravité, et les stratégies d'orientation utilisées paraissent éminemment variables.
Par ailleurs, les pratiques aux urgences ont fait l'objet de la vaste étude multicentrique ASUR, qui a concerné 3 772 crises d'asthme aiguës (Dr Sergio Salmeron, hôpital du Kremlin-Bicêtre Paris). Ce travail montre la grande gravité initiale des exacerbations d'asthme vues aux urgences : 26 % mettent la vie du malade en danger et presque la moitié des asthmes aigus graves sont sans signe d'alarme. Les corticoïdes sont sous-utilisés, tandis que les anticholinergiques sont administrés dans la moitié des cas environ, ici encore, indépendamment de la gravité. Or, la prescription d'anticholinergiques (Atrovent nébulisé) aux urgences a permis une réduction significative, de 7,5 % du taux d'hospitalisations. Une utilisation plus régulière de cette molécule en nébulisation et en association à un bêta 2-agoniste, devrait se développer pour ces patients. Fait étonnant, seulement 77 % des malades ayant initialement des critères d'alarme (asthme aigu très grave) ont été hospitalisés.
Ces travaux montrent que des efforts restent à faire pour améliorer la prise en charge de l'asthme aigu et la rendre conforme aux recommandations, qui sont fondées sur un niveau de preuve scientifique élevé. Ces efforts doivent en particulier porter sur l'établissement de scores pour l'évaluation initiale de la gravité et la décision d'orientation, la rationalisation du choix de la voie d'administration et la décision d'utiliser ou non les anticholinergiques, et la généralisation de l'utilisation des corticoïdes systémiques dans l'asthme aigu grave ou les exacerbations sévères (DEP < 50 %).
Symposium Boehringer Ingelheim, auquel participaient : J.-F. Dessanges (Paris), D. Perrotin (Tours), N. Roche (Paris), P. Plaisance (Paris), S. Salmeron (Paris) et J.-F. Muir (Rouen).
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