DE NOTRE CORRESPONDANTE
VINGT-CINQ POUR CENT des chutes nécessitent une intervention d'urgence. Elles représentent 30 % des causes d'hospitalisation des plus de 65 ans. De 9 000 à 12 000 personnes en meurent chaque année (deux tiers des décès des plus de 70 ans sont liés aux chutes). Supprimer les tapis, poser des rampes d'escalier, éclairer les lieux sombres sont autant de gestes de prévention indispensables, rappelés lors de la campagne de prévention du ministère de la Santé « Bon pied-bon œil après 60 ans », mais ces mesures pratiques ne suffisent pas.
Comme l'explique le Pr Jean-Philippe Azulay (hôpital de La Timone), les causes de la chute sont souvent d'ordre neurologique, elles peuvent être multiples et elle entraîne aussi un « syndrome postchute » qui altère gravement la qualité de vie de la personne âgée, en dehors des traumatismes physiques : après une première chute, le risque de tomber à nouveau dans la même année est multiplié par vingt. Le Dr Aline Bismuth, chef de service au centre de gérontologie de Marseille, constate qu'une personne âgée sur deux a peur de tomber et que cette crainte provoque une régression psychomotrice pouvant aller jusqu'à l'alitement et ses conséquences.
Evaluer aussi les capacités.
Les autres tables rondes du colloque, qui présentaient des initiatives en matière d'activité sportive, d'équilibre nutritionnel ou même de lutte contre l'isolement et de prévention du suicide, ont apporté elles aussi des réponses indirectes pour la prévention des chutes et du repli sur soi qu'elles génèrent. Mais dans ces différents sujets, les intervenants ont insisté sur la nécessité d'une bonne évaluation médicale, préalable à une prévention bien adaptée. En matière de chutes, « il faut procéder à une évaluation d'ensemble », souligne Jacqueline Casali, cadre masseuse-kinésithérapeute à l'hôpital Cimiez de Nice, où un ensemble d'appareillages permet de mesurer les différents paramètres spatio-temporels de la marche. « Il faut scanner méthodologiquement, dit-elle, les déficiences, mais aussi les efficiences, pour arrêter des objectifs thérapeutiques précis. » Elle insiste sur l'évaluation des capacités, souvent sous-utilisées, de façon à mettre en place des « reprogrammations » ou des rééducations bien adaptées, faisant appel à la pleine participation et à la compétence de la personne âgée, souvent appelée à effectuer des exercices seule, surtout dans le cadre d'un maintien à domicile. Elle donne en exemple le tandem kiné-psychologue qui permet de travailler sur « la peur de faire ».
La région dispose de différents types d'aide à la prévention des chutes. La Fédération française de gymnastique volontaire et la Caisse régionale d'assurance-maladie proposent des « ateliers équilibre » qui permettent d'entraîner les muscles et les réflexes mais aussi d'apprendre à tomber et à se relever, pour éviter l'appréhension.
Au centre gérontologique départemental de Montolivet, à Marseille, un parcours rééducatif est utilisé depuis quelques années pour les patients ayant été hospitalisés pour chute. Un circuit passant par du gravier, des pierres, des obstacles à enjamber, des escaliers et des plans inclinés permet à la personne, soutenue ou non par un kiné, de se réhabituer à sortir au grand air et de reprendre confiance dans sa faculté d'affronter différentes situations. « Le syndrome phobique de chute empêche les personnes de lâcher leurs appuis, il faut donc encourager les déplacements extérieurs après une chute : ce parcours sécurisé est complémentaire de la rééducation classique », note le Dr Bismuth. Actuellement réservé aux patients du centre, ce parcours devrait prochainement être ouvert aux personnes âgées extérieures, en liaison avec les réseaux ville-hôpital de lutte contre la dépendance, soutenus par l'Union régionale des médecins libéraux.
Pour le maintien à domicile ou le retour après hospitalisation, de telles prises en charge apparaissent comme indispensables aux intervenants. Reste à les développer au plus près des lieux de vie des personnes âgées et à sensibiliser les médecins traitants.
Qi-gong antichutes
L'une des interventions les plus suivies du colloque a sans doute été celle du Dr Yves Réquéna, médecin acupuncteur à Aix-en-Provence mais surtout responsable de l'école de rééducation par le qi-gong. Il a fait une démonstration de différentes positions et mouvements, tout en lenteur et maîtrise, qui permettent, s'ils sont régulièrement pratiqués, de limiter les risques de chute.
Cette discipline est née des arts martiaux et notamment du tai-chi. Elle est quotidiennement pratiquée par de nombreux Chinois pour favoriser la sérénité et prévenir différents maux, parmi lesquels les troubles spatio-temporels liés à l'âge. Plusieurs études, menées en Suisse et aux Etats-Unis notamment, montrent une amélioration de l'ensemble des paramètres neuropsychiques des adeptes du tai-chi. Les observations effectuées par le Dr Réquéna relèvent une amélioration des différentes mesures fonctionnelles. Les effets bénéfiques, tant sur le tonus musculaire que sur l'équilibre et l'humeur, semblent surtout ressentis après une quarantaine de séances ; les résultats apparaissent meilleurs sur les hommes et sur les personnes ayant commencé plus jeunes (avant 50 ans).
Téléchargement possible du dossier sur « La place du Qi-gong dans la prévention des chutes chez la personne âgée », sur le site www.yves-requena.com.
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