DANS LE MONDE, les AVC représentent la deuxième cause de mortalité et le nombre de décès devrait doubler d'ici à 2020, du fait du vieillissement de la population. En France, on dénombre entre 120 000 et 150 000 cas par an, avec environ un quart de mortalité à court terme, la moitié des patients survivants étant handicapés. D'autres chiffres ont de quoi inquiéter : 50 % des survivants sont déprimés dans l'année suivant l'AVC et 25 % deviennent déments à cinq ans. A ce sujet, le Dr Tzourio insiste sur la signification péjorative des hypersignaux de la substance blanche, à l'IRM ; cette anomalie peut être découverte en dehors de toute symptomatologie, traduisant vraisemblablement des AVC silencieux. A ce bilan dramatique s'ajoutent des données économiques tout aussi préoccupantes : le coût des soins, mais aussi du handicap, les coûts directs et indirects sont énormes, de l'ordre de 3 milliards d'euros en France (estimations).
La prévention des AVC est donc une nécessité, d'autant que les solutions thérapeutiques sont limitées : moins de 5 % des patients entrent dans les critères d'application de la thrombolyse, celle-ci exposant à un risque élevé d'hémorragie cérébrale ; même si la prise en charge en unité neuro-vasculaire améliore nettement le pronostic, celui-ci reste très sombre.
Prévention qui repose essentiellement sur le contrôle de l'HTA, facteur de risque causal qui multiplie le risque d'AVC par 3 à 5. Le risque d'AVC attribuable à l'HTA est compris entre 40 et 50 % et, enfin, quand on abaisse la pression systolique de 10 à 12 mmHg, on diminue le risque d'AVC de 37 %. C'est dire, conclut le Dr Tzourio, que le dépistage et le contrôle de l'HTA sont la base de la prévention des AVC.
Lutte contre l'HTA : une certaine stagnation.
Or, même si d'énormes progrès ont été accomplis et si la France fait partie des « bons élèves » dans ce domaine (avec les Etats-Unis et le Canada), le dépistage et, a fortiori, le contrôle de l'HTA sont loin d'être généralisés.
On peut citer l'enquête Ihpaf (2002), qui met en évidence une prévalence de l'HTA qui est de 16 % chez les hommes et de 9,4 % chez les femmes. Dans cette enquête, la moitié des hommes et les trois quarts des femmes connaissent leur hypertension, le taux de contrôle étant respectivement de 30 et 50 %.
Certes, l'étude longitudinale des cohortes Monica met en évidence des améliorations, notamment chez les hommes âgés de 25 à 65 ans : le pourcentage de patients traités est passé de 60 à 80 % et celui d'HTA contrôlées, de 30 à 50 %.
Cependant, la comparaison des études Euroaspire I et II montre que si des succès importants ont été enregistrés dans la lutte contre les dyslipidémies, la surcharge pondérale « explose » littéralement, la prévalence de l'HTA non traitée et/ou non contrôlée stagne.
De toute façon, conclut le Pr Stéphane Laurent, le vieillissement de la population et des objectifs tensionnels plus exigeants, en particulier chez les sujets à risque, font que l'on est encore loin d'un contrôle idéal de l'HTA : ainsi, l'étude France HTA a montré que seulement 7 % des insuffisants rénaux atteignaient les objectifs tensionnels (130-85 mmHg) et 14 % des diabétiques (140-80 mmHg).
Mobilisation contre l'AVC ?
Ce constat a conduit la Fédération européenne des associations de neurologie, l'Institut européen pour la santé des femmes et la Société européenne d'hypertension à proposer à l'Union européenne un plan d'action en dix points pour combattre la menace d'AVC. En France, une journée nationale va être organisée le 7 mai, pour informer et mobiliser le public pour la lutte contre l'HTA et la prévention de l'AVC.
(1) Conférence de presse organisée par MSD-Chibret.
Les antihypertenseurs ne sont pas équivalents
Quand on parle de lutte contre l'HTA, on sous-entend souvent que les gains en termes de morbi-mortalité s'expliquent essentiellement par la réduction des chiffres tensionnels, indépendamment des molécules utilisées. Or l'étude Life, portant sur plus de 9 000 patients âgés de 55-80 ans (dont 54 % de femmes), a montré que le losartan (Cozaar) réduisait de 13 % le risque combiné de mortalité cardio-vasculaire, de crise cardiaque et d'AVC, par rapport à un traitement par bêtabloquant (aténolol). Le risque d'AVC seul est, lui, réduit de 25 %.
Le Pr B. Dahlöf (Göteborg, Suède) a calculé que, pour l'ensemble de la population européenne, ce gain enregistré sous losartan se traduisait par la prévention de 125 000 premiers AVC sur une période de 5,5 ans.
Autrement dit, cette approche pourrait avoir un impact positif majeur en termes de morbi-mortalité.
>>>> Dr A. M.
>>>(1) « J of Human Hypertension », 2004, 1-7.
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