Entretien avec le Pr Jean-François Muir, président de la SPLF,CHU Rouen.
« Les BPCO, le cancer du poumon et l'asthme sont les trois grands problèmes actuels de santé publique face auxquels la pneumologie bénéficie d'une grande évolution dans différents secteurs », déclare le Pr Jean-François Muir, président de la SPLF (Société de pneumologie de langue française). Les progrès réalisés en recherche fondamentale permettent une meilleure compréhension des processus inflammatoires du poumon profond, tant dans la BPCO que dans l'asthme et les pneumopathies interstitielles, ainsi qu'une meilleure connaissance de la dyspnée et de son exploration. En recherche cancérologique, les progrès concernent les processus de la tumorogenèse, en particulier les facteurs vasculaires de la tumorogenèse.
Vers un diagnostic plus précoce du cancer pulmonaire
Des progrès sensibles concernent la détection précoce du cancer bronchique, avec deux méthodes de pointe : la détection endoscopique (par photodétection) particulièrement développée par certaines équipes en France (notamment l'équipe du Pr. L. Thiberville au CHU de Rouen) ; le scanner haute résolution dont l'intérêt est actuellement évalué pour la détection des formes précoces de cancer intraparenchymateux. « Avec ces deux méthodes, commente J.-F. Muir, on peut espérer parvenir à détecter plus précocement le cancer dans des populations à risque et donc gérer plus efficacement son traitement. »
A noter aussi l'intérêt des techniques d'analyse des gaz expirés qui permettent de mieux préciser l'état d'inflammation pulmonaire à un stade précoce et qui pourraient être utilisées dans certaines étiologies comme les BPCO, l'asthme ainsi que le cancer.
L'imagerie bénéficie d'une amélioration constante : elle permet notamment une détection plus fiable de l'embolie pulmonaire par l'angioscanner, qui est de plus en plus utilisé pour le diagnostic, parallèlement à la scintigraphie pulmonaire. « Si l'angioscanner se démocratise, remarque le Pr Muir, le PET-scan va aussi bénéficier, dans le cadre du cancer, d'une augmentation du nombre de postes de détection dans les mois à venir, permettant de rattraper le retard important pris par la France dans ce type d'équipement. »
Les perspectives thérapeutiques
Enfin, dans le cadre de la BPCO, certaines modalités de diagnostic précoce sont actuellement en cours d'étude (débitmètre de pointe informatisé, pouvant être utilisé en réseau avec le pneumologue correspondant). Elles pourraient passer d'ici peu du laboratoire au cabinet du médecin praticien.
Les recommandations de la SPLF en matière de BPCO ont permis de recentrer le traitement sur l'arrêt du tabac, sur les bronchodilatateurs (prescrits au cas par cas) et sur l'utilisation raisonnée des corticoïdes inhalés au long cours pour lesquels des études récentes sont en faveur d'une efficacité sur la réduction des exacerbations dans les BPCO les plus sévères. A noter, parmi les anticholinergiques à longue action, l'arrivée du tiotropium, en attente d'AMM, qui est prometteur dans les BPCO.
Les schémas thérapeutiques de l'asthme sont bien établis avec les corticoïdes inhalés, puis le recours en association avec les bêtamimétiques à longue action. « Les perspectives thérapeutiques, annonce J.-F. Muir, concernent des bronchodilatateurs prometteurs, en cours d'évaluation ou de commercialisation, à savoir les nouveaux inhibiteurs de la phosphodiestérase non théophylliniques, qui doivent trouver leur place dans les schémas thérapeutiques actuels. Des administrations plus séquentielles que continues des corticoïdes inhalés sont actuellement en cours d'évaluation, afin de vérifier si elles permettent ou non une meilleure prise en charge thérapeutique de la maladie asthmatique. »
« Dans le champ de l'antibiothérapie, remarque le Pr Muir, l'apparition des kétolides suscite un grand intérêt en raison de leur spectre intéressant dans la sphère pulmonaire. Ce qui permet de recommander ce produit dans les pneumopathies communautaires et dans les surinfections préoccupantes bronchiques des BPCO. »
Enfin, toute la communauté scientifique est attentive à l'évolution de l'épidémie sévère de pneumopathie à coronavirus du sud-est asiatique et pour laquelle des tests diagnostiques vont être disponibles, permettant la détection précoce des malades et des sujets porteurs.
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