L'idée de mettre les enfants nés hypoxémiques, voire anoxiques, en état d'hypothermie dans les suites immédiates de la réanimation cardio-respiratoire, a été évoquée il y a quelques années à la suite de travaux expérimentaux sur les animaux. Des études préliminaires ont confirmé la faisabilité de cette technique et son bénéfice potentiel.
Une étude récente publiée en 2005 (« Lancet » 2005 ; 365, pp. 663-670) n'a pas permis de confirmer l'effet bénéfique d'un refroidissement du cerveau des enfants à risque d'encéphalopathie. Les nouveau-nés avaient été maintenus, avant leur 6e heure de vie, dans un état d'hypothermie modérée (34 ou 35 °C de température centrale), par un système de refroidissement de l'extrémité céphalique, pendant une durée totale de 72 heures. L'analyse de l'EEG et l'examen clinique n'avaient pas permis de conclure à un effet positif, à l'exception néanmoins du groupe des enfants le plus sévèrement atteints.
Une nouvelle étude publiée dans le « New England Journal of Medicine » par l'équipe du Dr Seetha Shakaran (Detroit) donne des résultats opposés. Ce travail randomisé qui a inclus 208 enfants - 102 dans le groupe hypothermie et 106 témoins - visait à apprécier l'effet d'une hypothermie à 33 °C par un système de refroidissement externe pendant une durée de 72 heures, suivi d'une remontée progressive de la température. Les enfants inclus présentaient soit des signes cliniques d'encéphalopathie modérée à sévère, soit une acidose sévère, soit un état de mort apparente ayant nécessité une réanimation cardio-pulmonaire. Ils étaient nés depuis moins de six heures.
« L'hypothermie systémique a permis une baisse de 18 % du taux de décès ou de complications modérées à sévères à l'âge de 18 mois. L'incidence des effets indésirables, tels que des arythmies, est restée faible », analysent les auteurs.
Pourquoi une telle différence entre les deux études ? Pour le Dr Lu-Ann Papile (Albuquerque), éditorialiste, le délai entre la prise en charge, l'obtention d'une température basse, ainsi que la vitesse à laquelle la baisse de température est obtenue (deux heures pour la première étude, contre moins d'une heure pour la seconde), pourraient jouer un rôle décisif. En outre, dans la seconde étude, aucune analyse EEG n'a été effectuée, or il s'agissait pour les premiers auteurs de l'un des critères d'évaluation. Les patients du Dr Shakaran devraient bénéficier dans les années à venir d'un tel examen.
Alors, quelles conclusions tirer de ces études ? Pour le Dr Papile, « aux Etats-Unis, où la plupart des enfants souffrant d'hypoxie néonatale naissent dans des hôpitaux généraux, il paraît difficile de mettre en place des systèmes de refroidissement pour le plus grand nombre. Il faudrait, en effet, que les ambulances soient équipées de ce matériel, ce qui n'est pas encore le cas. Enfin, l'évaluation à plus long terme - et notamment en période scolaire - des enfants inclus dans l'étude permettrait de mieux évaluer l'impact de ces mesures néonatales. En attendant, l'hypothermie doit être considérée comme une piste thérapeutique à n'appliquer qu'avec le consentement des parents ».
« New England Journal of Medicine », vol. 353; 15, pp. 1574-1584 et 1619-1630, 13 octobre 2005.
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