LA LITTÉRATURE scientifique finirait parfois par nous le faire oublier, mais l'homme n'est pas une souris ! Si la restriction calorique augmente l'espérance de vie des petits rongeurs, il est fort possible qu'elle n'apporte aucun bénéfice aux humains. Les derniers travaux de John Holloszy et coll., de l'université de Washington (Saint Louis, Missouri), suggèrent, en effet, que la réduction des apports caloriques ne déclenche pas les mêmes mécanismes moléculaires chez l'homme et chez la souris.
Vivre jusqu'à deux fois plus longtemps.
Selon les données obtenues par l'équipe américaine, pour obtenir un ralentissement du vieillissement et espérer vivre plus longtemps, les humains devraient réduire leur consommation de protéines plutôt que leurs apports caloriques totaux.
L'effet positif de la restriction calorique sur le vieillissement des mammifères a été démontré pour la première fois à la fin des années 1930. À cette époque, le biologiste Mac Cay et coll. ont observé qu'il était possible d'augmenter l'espérance de vie des animaux en les sous-alimentant légèrement sans pour autant les carencer. Un tel régime commencé à l'âge adulte permet aux rats de vivre jusqu'à deux fois plus longtemps que leurs frères nourris à volonté.
Dans ce modèle expérimental, la restriction calorique agit notamment en retardant l'apparition de certaines pathologies liées à l'âge et en ralentissant la dégradation des fonctions motrices et cognitives au cours du vieillissement. Mais aucune étude n'a jamais démontré qu'il en est de même chez les humains.
La nature exacte des mécanismes à l'origine de ce phénomène n'est pas entièrement élucidée, mais de nombreuses études ont démontré que les facteurs de croissance IGF-1 y jouent un rôle clé.
Diminution de 30 à 40 % du taux d'IGF-1.
Holloszy et coll. ont tiré partie de l'existence de communautés de plus en plus nombreuses de personnes pratiquant la restriction calorique pour comparer les effets d'un tel régime sur la physiologie des souris et de l'homme. Chez la souris, la restriction calorique entraîne une diminution de 30 à 40 % du taux d'IGF-1 circulant. Mais chez l'humain, les données recueillies par Holloszy et son équipe montrent que le taux plasmatique du facteur n'est pas modifié par six ou sept ans de régime.
Le taux d'IGF-1 circulant pouvant être modifié non seulement par l'apport calorique global, mais aussi par l'apport spécifique en protéines, les chercheurs ont eu l'idée de mesurer le facteur de croissance chez des sujets qui consomment peu de protéines. C'est ainsi qu'ils ont découvert que les végétaliens dont la consommation de protéines correspond à seulement 10 % de l'apport calorique (contre 23 à 24 % chez les sujets qui pratiquent la restriction calorique) ont un taux plasmatique d'IGF-1 circulant étonnamment bas.
Holloszy et coll. ont alors demandé à des personnes pratiquant la restriction calorique de diminuer leurs apports protéiques pour quelques semaines. Ces personnes ont très rapidement vu leur taux d'IGF-1 profondément diminuer.
L'existence d'un effet bénéfique de la restriction protéique sur le vieillissement et l'espérance de vie des humains reste évidemment encore à démontrer. Mais le fait que, contrairement à la restriction calorique, elle induise une diminution du taux plasmatique d'IGF-1 est une donnée encourageante.
L. Fontana et coll., « Aging Cell », octobre 2008, vol. 7, pp. 681-687.
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