Macroangiopathie diabétique
LE DIABETE est responsable d'une atteinte microvasculaire responsable de lésions rénales et oculaires, par exemple. Mais il est également un facteur de risque important d'atteinte des gros vaisseaux, en particulier des artères coronaires ou cérébrales. Cette atteinte macrovasculaire justifie une prévention des événements cardio-vasculaires chez les diabétiques.
L'étude Proactive (PROspective pioglitAzone Clinical Trial In macroVascular Events), dont les résultats ont été présentés à Athènes, ont montré qu'un traitement par pioglitazone (Actos, Laboratoire Takeda) pouvait diminuer de 16 % la fréquence des événements cardio-vasculaires chez des diabétiques déjà traités de manière optimale.
Dans cette étude de prévention secondaire, 5 238 diabétiques à haut risque cardio-vasculaire, c'est-à-dire ayant déjà été victimes d'un événement coronaire, cérébral ou périphérique, ont été inclus. Tous les patients devaient bénéficier d'un traitement optimisé du diabète et de ses complications. Ils devaient donc recevoir des antidiabétiques oraux, éventuellement de l'insuline, et, selon les besoins, un traitement antihypertenseur, un antiagrégant plaquettaire et/ou un hypocholestérolémiant. Ils ont été répartis de façon aléatoire afin de recevoir, en plus de ce traitement, soit de la pioglitazone à une dose pouvant atteindre 45 mg/j, soit un placebo. L'objectif était d'obtenir un taux d'HbA1C inférieur à 6,5 %, conformément aux recommandations européennes. La durée du suivi a été de trois ans.
Un suivi de trois ans.
Le critère de jugement principal de l'étude était la diminution de la fréquence d'un premier événement parmi les sept suivants : décès, infarctus non fatal (IDM), accident vasculaire cérébral (AVC), amputation d'un membre inférieur, syndrome coronaire aigu, angioplastie coronaire ou angioplastie pour artérite des membres inférieurs. Le principal critère secondaire était la baisse de fréquence d'un premier événement parmi les trois suivants : IDM, AVC cérébral et décès.
A l'issue des trois années de suivi, les auteurs ont mis en évidence une baisse de 10 % du taux des sept événements composant le critère principal, 21 % dans le groupe pioglitazone et 23,5 % dans le groupe placebo, cette différence n'atteignant toutefois pas le seuil de significativité statistique. En revanche, la baisse de 16 % du taux des trois principaux événements composant le critère secondaire principal a, elle, été significative, avec une fréquence d'événements de 12,3 % dans le groupe pioglitazone et de 14,4 % dans le groupe placebo (p = 0,027). Le bénéfice de la pioglitazone sur le contrôle glycémique, déjà connu, a par ailleurs été confirmé, avec une réduction de 0,5 % du taux d'hémoglobine glyquée (HbA1c) comparativement au placebo (p < 0,001), ainsi que sur le profil lipidique : HDL + 9 % par rapport au placebo (p < 0,001) ; triglycérides - 13 % (p < 0,001), avec, toutefois, une légère hausse du LDL (+2 % par rapport au placebo, p = 0,003).
Pour le Pr B. Charbonnel (Nantes), « le choix du critère de jugement principal de l'étude peut être discuté », car il comporte des éléments qui sont des décisions propres à chaque investigateur ou à chaque centre participant. En revanche, le critère secondaire a porté sur les éléments principaux du critère primaire sans retenir « les infarctus silencieux en raison d'un problème de définition, et les items qui n'étaient pas des événements, mais des décisions thérapeutiques, comme les revascularisation », a précisé le Pr Charbonnel.
Une nécessité.
Le Dr D. Pouchain (médecin généraliste, Créteil), estime que « la méthodologie de l'étude Proactive est exemplaire, mais, qu'il faut bien insister sur le fait que ses résultats concernent des diabétiques à très haut risque cardio-vasculaire en raison de leurs antécédents d'insuffisance coronaire ou d'accident vasculaire cérébral, et qu'ils ne doivent donc pas nécessairement s'appliquer à tous les diabétiques. Il faut également signaler, ajoute-t-il, le risque éventuel d'apparition d'une insuffisance cardiaque sous traitement ». « Ce phénomène, explique le Pr X. Girerd (groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris), est lié au fait que cette molécule induit, chez certains patients, une rétention hydrosodée, qui peut favoriser une insuffisance cardiaque. Cet effet, déjà connu, impose une surveillance régulière des sujets les plus fragiles sur le plan cardiaque. »
« Par ailleurs, selon le Pr Girerd, cette étude de prévention des maladies cardio-vasculaires concerne au plus haut point les cardiologues. Chez les diabétiques, la nécessité de prendre en charge l'hypertension artérielle est bien connue. Il en va de même pour les dyslipidémies, comme les études HPS (Heart Protection Study) et CARDS (Collaborative Atorvastatine Diabetes Study) l'ont bien montré. L'étude UKPDS (United Kingdom Prospective Diabetes Study), dans laquelle 5 102 patients atteints de diabète de type 2 avaient été inclus par 23 centres d'Angleterre, d'Irlande du Nord et d'Ecosse, a marqué une étape décisive dans la prise en charge de cette affection. Ses résultats, publiés simultanément dans le "Lancet" et dans le "British Medical Journal" en 1998, avaient en effet montré l'intérêt d'un traitement dit intensif du diabète de type 2, visant à réduire durablement le niveau d'hyperglycémie et de tension artérielle, pour diminuer la survenue des complications du diabète. L'étude Proactive franchit une autre étape en montrant que, chez des diabétiques ayant des antécédents cardiologiques - une insuffisance coronaire chez la moitié d'entre eux, un accident cérébro-vasculaire chez 20 % -, l'optimisation du traitement grâce à la pioglitazone permet d'éviter plus de 16 % d'événements cardio-vasculaires. »
D'après la présentation des résultats de l'étude Proactive et les commentaires des Prs B. Charbonel et X. Girerd et du Dr D. Pouchain.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature