Pour réduire les délais diagnostiques

La PCR en temps réel, une technique en plein essor

Publié le 08/02/2004
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AFIN D'AMELIORER la sensibilité du diagnostic de la listériose neuroméningée, une équipe de l'hôpital Necker - Enfants-Malades (Paris) a mis au point une technique de PCR en temps réel du gène hly. Le diagnostic de cette infection est à la fois important et difficile, du fait de la grande hétérogénéité des tableaux cliniques, qui sont parfois aspécifiques, et de la forte incidence des séquelles (plus de 30 %). Il est confirmé par l'isolement de Listeria monocytogenes dans le liquide céphalorachidien. Mais la culture peut avoir des limites, notamment en cas d'antibiothérapie précoce et de faibles inoculums, difficiles à mettre en évidence. La technique utilisée, explique le Dr Alban Le Monnier, est fondée sur « l'amplification génique d'un fragment de gène de virulence hly codant pour la listériolysine O ». Elle a été évaluée dans une étude rétrospective sur 264 LCR prélevés pour suspicion de méningite infectieuse, dans 73 % des cas chez des adultes (âge moyen 48,7 ans) et dans 27 % des cas chez des enfants (âge moyen 3,3 ans), avec une analyse finale sur 160 LCR. L. monocytogenes a été identifié par culture dans 4 cas. « Dans le cas d'une culture positive, souligne le Dr Le Monnier, la détection de L. monocytogenes montrait une concordance de 100 %. » Un seul résultat de PCR-hly a été considéré comme faussement positif. Il concernait un patient avec une lésion cérébrale sans autre argument en faveur d'une listériose évolutive.
Enfin, aucune positivité croisée avec des LCR infectés par d'autres agents pas plus qu'une influence de la composition du LCR n'ont été constatées. La PCR en temps réel est donc une technique rapide et performante qui se positionne comme un examen complémentaire utile à la culture et à la sérologie pour documenter une infection à L. monocytogenes.

La tuberculose.

D'après une évaluation réalisée par une équipe hospitalière de la région lilloise, la PCR en temps réel pourrait également être intéressante dans le diagnostic de la tuberculose. Les auteurs ont comparé les performances de cette technique et de l'amplification génique par deux trousses commerciales (Amtd Genprobe et Amplicor MTB test) sur 91 prélèvements, dont 47 d'origine pulmonaire, provenant de 79 patients. Les résultats de l'amplification génique, ajoute le Dr Nadine Lemaître (CHRU de Lille), « ont été confrontés avec les résultats bactériologiques et les données cliniques, radiologiques et épidémiologiques des malades ». Vingt-sept patients souffraient de tuberculose, confirmée bactériologiquement dans 23 cas. Dix-sept avaient à la fois un examen microscopique et une culture positifs. Chez ces malades, la PCR en temps réel a été systématiquement positive et la méthode MTB l'a été dans 16 cas. Chez les 4 malades qui avaient uniquement un examen microscopique positif, la PCR en temps réel s'est révélée positive dans tous les cas, alors que la méthode MTB l'était dans 2 cas. Dans la tuberculose paucibacillaire, les deux méthodes font jeu égal, avec une positivité dans 4 cas sur 6. Ainsi, la PCR en temps réel a une sensibilité et une spécificité supérieures à celles des méthodes d'amplification génique à l'aide des deux trousses commerciales : respectivement 92 % et 100 % contre 81 % et 94 %. « Ces résultats semblent indiquer que la PCR en temps réel est une méthode sensible et spécifique pour le diagnostic direct de la tuberculose en routine de laboratoire », concluent les auteurs. Ils soulignent cependant la nécessité de la poursuite de son évaluation dans la tuberculose paucibacillaire.

Infections virales.

La rapidité, la fiabilité et la sensibilité de la PCR en temps réel ont été mises en évidence dans les bronchiolites et dans les méningites. Une étude a été menée sur 124 nourrissons âgés en moyenne de 7,8 mois et présentant des troubles respiratoires. Ses auteurs se sont intéressés au rôle du métapneumovirus humain (hMPV) dans la bronchiolite infantile. Dans le groupe des 67 nourrissons avec bronchiolite sans étiologie virale identifiée par les techniques virologiques classiques, « 13,4 % se sont révélés positifs pour la détection par RT-PCR en temps réel du hMPV dans leur aspiration rhinopharyngée », rapporte le Dr Maude Bouscambert (faculté de médecine, Lyon ; hôpital Robert-Debré, Paris). Par ailleurs, des virologues du CHU de Clermont-Ferrand ont mis au point une technique de RT-PCR pour le diagnostic rapide des méningites à entérovirus, qui a été validée de façon rétrospective dans des LCR de 70 patients hospitalisés pour syndrome méningé aigu. Le Dr Christine Archimbaud souligne les avantages de cette technique, en l'occurrence sa rapidité d'exécution et sa fiabilité sans perte de sensibilité.

Résistances bactériennes.

La PCR en temps réel fait aussi l'objet d'évaluations dans le cadre de la détection des résistances bactériennes. Des spécialistes franciliens ont développé une technique pour l'identification rapide des souches de Helicobacter pylori (HP) résistantes à la clarithromycine (de 10 à 20 % en France). Une résistance quasiment toujours liée à une mutation en position 2142 ou 2143 dans le gène du rRNA 23S, rappelle le Dr Jacques Tankovic (hôpital Saint-Antoine, Paris). La culture doit être la méthode de référence pour tester la sensibilité de HP, mais la fragilité de cette bactérie et la nécessité de conditions de transport contraignantes qui en découle représentent un écueil non négligeable. De plus, les résultats ne sont disponibles qu'après plusieurs jours. Si elle se montrait efficace, la PCR en temps réel permettrait un gain en termes de rapidité et de sécurité. Cette technique a donc été testée sur des prélèvements de biopsie gastrique effectués sur 196 patients et ses résultats ont été comparés à ceux de la culture et de l'histologie. Sur les 66 patients infectés par HP, 53 (80 %) étaient positifs par les trois techniques. La sensibilité de la PCR était au moins aussi bonne, voire meilleure que celle des autres méthodes : 97 % contre 90,6 % pour la culture et 87,9 % pour l'histologie. Sa spécificité est de 94,6 % contre 100 % pour les deux autres techniques. Ces travaux montrent que la PCR en temps réel donne des résultats fiables et rapides (en une journée) pour un coût raisonnable. Compatible avec une utilisation en routine, elle permet également de déterminer la densité des bactéries et peut être utilisée pour des études épidémiologiques. A l'hôpital Henri-Mondor, elle a été introduite il y a un an en routine, à la place de la culture.

* 23e réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuse, Paris les 4 et 5 décembre 2003.

> Dr CATHERINE FABER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7473