LE FILM en costumes est un genre dangereux. Quand on voit apparaître Yolande Moreau en comtesse, coincée dans ses atours XIXe et débitant un texte fleuri, on a un peu de mal à y croire. Michael Lonsdale, qui lui donne la réplique en vicomte malfaisant, n'est pas plus convaincant. Ils ont l'air bien empesés, ces personnages sortis du roman publié en 1851 par Jules Barbey d'Aurevilly et que Breillat avait de longue date le projet d'adapter. L'histoire se passe il est vrai dans un temps et un monde – l'aristocratie – où les conventions pèsent aussi lourdement que les robes des grandes dames et où l'hypocrisie n'a d'égale que la curiosité pour les secrets d'alcôves.
La comtesse et le vicomte parlent de l'affaire du moment : le mariage annoncé d'un libertin désargenté et d'une jeune fille riche appartenant au fleuron de l'aristocratie ; les deux jeunes gens semblent très amoureux mais le garçon est lié par une longue et tumultueuse passion à une maîtresse au tempérament ravageur. On voit bien ce qui a pu séduire la réalisatrice de « Romance » et d'« Anatomie de l'enfer » dans ce récit : la puissance des sentiments y dépasse toutes les conventions.
Mais l'adaptation, qui ne peut atteindre la richesse du roman, reste justement conventionnelle. Les scènes se succèdent presque trop sagement, même si l'on a droit à quelques nus et corps mêlés du plus bel effet. Et Claude Sarraute, dans l'important rôle de la grand-mère, la marquise de Flers, récite son rôle et prend des poses avec une application trop visible.
Heureusement, il y a le couple vedette. Asia Argento, présente à Cannes dans trois films, est une Vellini inspirée et on peut aisément comprendre qu'elle suscite des sentiments dont on ne peut se délivrer. Fu'ad Aït Aattou, qui débute, a séduit la cinéaste. «Pour la première fois, dit-elle, j'ai trouvé cette beauté fulgurante, féminine sans être efféminée, que j'ai toujours cherchée. » Alors elle ne lésine pas sur les gros plans. Le jeune acteur fait front et tient tête à sa partenaire, ce qui ne devait pas être facile.
On apprécie aussi, dans le film, les téléscopages d'époques, comme quand elle fait chanter « Yes Sir », air des années 1930, dans un salon très XIXe. Là, tout d'un coup, on y croit.
Sur les écrans à partir d'aujourd'hui.
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