Cancer colo-rectal métastatique
AU COURS de ces cinq dernières années, ont eu lieu un certain nombre d'avancées thérapeutiques dans le domaine du cancer colo-rectal métastasé, avec notamment la mise sur le marché de deux médicaments : l'oxaliplatine et l'irinotécan. Malgré ces progrès, et en l'absence de possibilités chirurgicale, on se heurte rapidement à l'apparition de résistances à ces chimiothérapies. C'est dans ce contexte que le cetuximab a été évalué, soit seul soit en combinaison à l'irinotécan, chez des patients qui avaient progressé sous des chimiothérapies conventionnelles antérieures et qui n'étaient pas accessibles au traitement chirurgical.
Le premier grand essai européen.
Deux petites séries américaines, d'une soixantaine de patients, avaient déjà permis d'étudier l'efficacité du cetuximab seul (57 patients) ou de l'association cetuximab + irinotécan chez des patients résistants à l'irinotécan utilisé seul (121 patients). Depuis, un grand essai européen a été a été mis en place, mené sur 329 patients inclus sur une durée d'environ 1 an et résistants à une chimiothérapie à base d'irinotécan ; 60 % d'entre eux avaient reçu en plus une autre ligne de traitement comportant de l'oxalitadine. Une randomisation 2/1 a été réalisée : un patient sur trois (111) recevait la monothérapie (cetuximab seul) et deux patients sur trois (218) la combinaison (irinotecan+cetuximab). Chez les 111 malades qui n'ont reçu que le cetuximab (une injection hebdomadaire), il a été observé 11 % de réponses et un temps de contrôle de la maladie de 1 mois et demi. En revanche, dans le bras combiné (irinotécan + cetuximab), le taux de réponse a été de 23 % et le temps de contrôle de la maladie de 4,1 mois. « Ce taux de réponse de 23 % en troisième ligne est un résultat qui n'avait jamais été obtenu avec aucun traitement », précise le Dr Michel Ducreux, investigateur de l'étude.
L'inconvénient potentiel de ce médicament appartenant aux nouvelles thérapeutiques dites ciblées et le fait qu'il s'agisse d'un anticorps antirécepteur d'un facteur de croissance (anti-Egfr, Epidermal Growth Factor). Pour l'instant, le cetuximab n'a donc été administré qu'à des patients chez qui ce récepteur était mis en évidence (ce qui est le cas de 80 à 90 % des malades porteurs de cancer colo-rectal) et cette étude n'a pas montré de corrélation entre le pourcentage de cellules fixées et l'activité du produit. L'effet secondaire le plus fréquent, puisqu'il concernait 80 % des patients, est une éruption à type de pseudo-acné. Cette éruption s'amende avec le temps, entraîne exceptionnellement des arrêts de traitement (5 % des cas) à un stade très sévère (aspect purulent).
Une asthénie sévère a été constatée dans 14 % des cas du bras combiné et 10 % des cas du groupe monothérapie. La diarrhée liée à la prise d'irinotécan était de même fréquence au cours du traitement combiné que lorsque l'irinotécan est utilisé seul (1 à 2 % de diarrhées sévères). Dans le bras combiné, ont également été notés 4 % de nausées, vomissements sévères et 3,5 % de réactions d'hypersensibilité. Les effets secondaires hématologiques ont été plus fréquents dans le bras monothérapie, avec moins de 1 % de leucopénie et 4 % d'anémie, que dans le bras combiné comportant une chimiothérapie, où il y a eu 20 % de leucopénie et 11 % d'anémie.
Déjà commercialisé en Suisse et aux Etats-Unis, le cetuximab devrait l'être en France au début du mois de juin (Merck Lipha Santé, sous le nom d'Erbitux), mais il peut être utilisé dès maintenant en ATU (autorisation temporaire d'utilisation) payante. Les résultats très encourageants de cet essai devraient inciter à utiliser ce traitement en deuxième, voire en première ligne thérapeutique. Des essais sont actuellement en cours dans ce sens.
D'après un entretien avec le Dr Michel Ducreux (institut Gustave-Roussy, Villejuif).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature