Deux fois palme d'or à Cannes (pour « la Ballade de Narayama », en 1983, et « l'Anguille », en 1997), Shohei Imamura, bien qu'en activité depuis un demi-siècle, ne se repose pas sur ses lauriers. Il continue à filmer et, à en juger par le résultat, n'a en rien perdu de son énergie et de sa verdeur.
Imamura, né en 1926, voit loin. « Nous voici au XXIe siècle, dit-il dans ses notes d'intention : si d'aucuns disent que ce siècle sera celui de la science et de la technologie, je pense qu'il sera aussi celui de la femme ». Evoquant les héroïnes de ses films précédents, il se demande : « D'où vient que ces femmes soient si fortes ? Est-ce grâce à leur nature particulière ? J'aime penser plutôt qu'elles usent alors d'une extraordinaire puissance de refus de ce qu'elles ne peuvent accepter tout en le subissant ». Pour savoir « sur quoi repose la nature profonde des femmes », Imamura a choisi d' « interpréter » un roman de Yo Henmi. Et le résultat n'est pas triste.
Parti à la recherche d'un bouddha en or dont un vieux vagabond lui a révélé la cachette, un homme sans travail et que sa femme vient de quitter se retrouve dans un village près de la mer. Là, dans une maison près d'un pont rouge, au bord de la rivière, vit une séduisante jeune femme qui a une étrange particularité. Quand elle vole (elle est kleptomane) et surtout quand elle jouit, son corps libère des centaines de litres d'eau tiède qui permettent des pêches miraculeuses et font s'épanouir les fleurs.
Scabreux ? Avec n'importe quel autre cinéaste sans doute. Mais Imamura traite cette histoire comme si elle était parfaitement banale, même si le héros ouvre souvent des yeux effarés, et y met tant d'humour et de légèreté qu'on se laisse nous aussi emporter par ces gentils flots. « Noie-toi dans les bras d'une femme, sois fidèle à tes désirs sans te soucier des ennuis quotidiens », avait dit le vagabond. C'est une des morales de ce conte qui, au passage, sans avoir l'air d'y toucher, évoque quelques problèmes du temps, le chômage, la destruction des familles, les menaces pour l'environnement, l'immigration...
Peut-être le film, où l'on retrouve les acteurs de « l'Anguille », Koji Yakusho et la jolie Misa Shimizu, s'essouffle-t-il un peu, sur la fin, mais le téléscopage de la fable, du burlesque et du réalisme composent un mélange qu'on n'oubliera pas.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature