A la question « La mobilisation contre le cancer est-elle un mythe ou une réalité ? », le Pr Guy Frija répond sans détour : « C'est un mythe tant que nous n'aurons pas comblé le retard important qu'a la France en termes d'équipement d'imagerie et qui ne cesse de croître. »
Sur les 94 IRM supplémentaires accordées au mois de mars 2000 par Martine Aubry réparties sur l'ensemble de la France, le Pr Frija explique qu'il n'y en a que 88 d'attribuées au jour d'aujourd'hui et qu'aucune n'a encore été installée.
« Les délais sont très longs, que ce soit dans les hôpitaux ou dans les cliniques. Entre l'annonce du ministre et le moment où l'appareil est prêt à fonctionner, il peut s'écouler deux ou trois ans... Enfin, il faut tout de même préciser que les 94 appareils accordés ne représentent même pas le tiers des besoins en termes d'appareils manquants », a souligné le secrétaire général de la Société française de radiologie.
A titre de comparaison, l'Allemagne dispose de 12 appareils d'IRM par million d'habitants, l'Espagne et l'Italie de 7 à 8 appareils par million d'habitants, alors que la France n'en a que 3 par million d'habitants. Des chiffres tout à fait éloquents.
Un retard thérapeutique
Cette carence en IRM est préjudiciable à plus d'un titre. Elle est bien sûr nuisible au diagnostic et au suivi des patients. Pour rechercher des métastases cérébrales, l'IRM est beaucoup plus performante que le scanner. Or à l'heure actuelle, presque 40 % de l'activité des scanners est consacrée à l'encéphale. Ce retard entretient donc des pratiques non conformes aux avancées médicales.
« Ce retard a d'autres conséquences, enchaîne le Pr Frija. En effet, dans le domaine du cancer, d'autres techniques d'imagerie se développent. Avec l'IRM et même avec le scanner, on réalise maintenant de l'imagerie fonctionnelle, qui permet d'étudier la fonction des tumeurs et de l'imagerie métabolique avec la spectroscopie. Or faute de disponibilité suffisante des IRM, la France ne peut pas profiter de ces nouvelles techniques qui se pratiquent à l'étranger et sont susceptibles de modifier les protocoles thérapeutiques : par exemple, dans le cancer de la prostate traité par brachythérapie, on a montré que certaines anomalies métaboliques se voyaient avant les anomalies morphologiques. Ce retard dans l'équipement entraîne donc également un retard idéologique. »
D'après un entretien avec le Pr Guy Frija, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris
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