I NCOMPREHENSIBLE et inacceptable : pour le Dr Bernard Asselain, président de la commission médicale d'établissement (CME), la décision de la direction de l'institut Curie, à Paris, de ne pas renouveler le contrat de détachement du Dr Edwige Bourstyn, est tout simplement inadmissible. « Comment peut-on accepter ce choix, explique-t-il au "Quotidien" », qui prive un établissement d'une chirurgienne aux qualités et aux compétences reconnues par tous, médecins comme patients ? ».
Détachée depuis 1995 à l'institut Curie, le Dr Bourstyn occupait les fonctions de chef du service de chirurgie viscérale et son contrat, qui s'achevait en janvier 2001, n'a ainsi pas été renouvelé.
Pour la direction de l'institut, il n'y a pas lieu, cependant, de crier au scandale. « Ce ne sont pas les compétences de ce médecin qui sont en cause, déclare un responsable de l'établissement. Mais une évaluation du département de chirurgie (au sein du duquel figure le service de chirurgie viscérale dirigé par le Dr Bourstyn, NDLR) montre certaines faiblesses, notamment concernant le service de chirurgie viscérale ». Le compte rendu d'une réunion de la commission médicale d'établissement, l'année dernière, confirme d'ailleurs l'intention de la direction de procéder à cette réorganisation. « En ce qui concerne le service à orientation viscérale, rappelle alors le directeur de l'institut, le Pr Jean-Pierre Camilleri, on ne peut que constater à la fois le peu de productivité globale du service et la part très importante de la chirurgie mammaire par rapport aux autres activités opératoires. Il est apparu nécessaire de remettre en cause la chefferie de service et de procéder au non-renouvellement de détachement de la fonction publique d'Edwige Bourstyn ». Toutes les activités sénologiques devront être regroupées dans le même service.
Selon la réforme préconisée par la direction, le département de chirurgie sera désormais composé de quatre services : anesthésie-réanimation, chirurgie générale et sénologique, chirurgie ORL et cervico-faciale, ophtalmologie. Deux unités figurent également dans ce département : la microchirurgie plastique et reconstructrice et la chirurgie viscérale, qui perd donc sa chefferie de service. Ce qui explique, selon la direction, la décision de se séparer du Dr Bourstyn.
Un manque de concertation ?
Si cette réorganisation a été acceptée de justesse par la CME lors d'une de ses réunions ( « grâce aux pressions, dit un de ses membres, exercée par la direction », ce que celle-ci nie, évidemment), elle est largement refusée par le comité d'établissement. Mais, surtout, s'insurge le Dr Bernard Asselain, « elle a été décidée unilatéralement, sans concertation ». D'autres médecins, sous couvert d'anonymat, parlent même d'une opération qui a surtout servi à se débarrasser « d'une personnalité forte, gênante pour certains, dont l'autorité était mise en cause ».
Difficile à vérifier. « Je m'interroge, dit encore le Dr Asselin, sur les raisons d'un tel acharnement envers un praticien , au mépris du respect élémentaire du droit du travail. »
Ce qui est sûr aussi, c'est que cette réorganisation s'est heurtée au chef du département de chirurgie générale, le Dr José Rodriguez, qui voulait conserver le service de chirurgie viscérale, à la tête duquel il voulait garder le Dr Bourstyn. Conséquence : le Dr Rodriguez a démissionné de ses fonctions.
Cette affaire commence à gêner les responsables de l'établissement qui insistent auprès de la direction des Hôpitaux du ministère pour qu'elle trouve une affectation rapide au Dr Bourstyn. Une première offre lui aurait été faite, à l'hôpital de Bobigny, mais elle ne semble pas correspondre aux souhaits et surtout au profil de carrière de la praticienne. Surtout, les soutiens, à l'institut et en dehors, qui se multiplient à son égard, pourraient l'inciter à persévérer dans sa « résistance ».
D'autant qu'un fol espoir s'empare de ses partisans : le Pr Camilleri, atteint par la limite d'âge, doit, dans les prochains mois, quitter ses fonctions. Une procédure de recrutement, pour son remplacement, a même été engagée. Et certains espèrent que ce changement sera l'occasion de renoncer à une réforme très contestée.
Du côté de la direction, on insiste aujourd'hui sur le caractère inéluctable de la réorganisation du service de chirurgie générale, indispensable pour que l'institut Curie, dit-elle, retrouve un fonctionnement adéquat.
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