Faudra-t-il surveiller les taux de TSH à l’institution d’un traitement par metformine chez les sujets en hypothyroïdie substituée ? C’est ce que laisse penser une étude dirigée par Laurent Azoulay, de l’université Mc Gill de Montréal, qui montre que l’antidiabétique oral le plus prescrit augmente de 55 % le risque d’avoir une TSH basse (‹0,4 mIU/l) en cas d’hypothyroïdie substituée. Le phénomène ne semble pas concerné les sujets en euthyroïdie. Ces résultats renforcent les preuves rapportées précédemment dans trois études. Une TSH basse pourrait exposer aux effets délétères d’une hyperthyroïdie infraclinique, essentiellement cardiovasculaires et osseux.
En partant des données d’une robuste cohorte britannique menée chez 13 millions de patients, la Cinical Practice Research Datalink (CPRD), l’équipe dirigée par Laurent Azoulay a étudié les variations de TSH chez des sujets diabétiques nouvellement traités ayant débuté, entre 1988 et 2012, de la metformine ou un sulfamide, et dont la TSH était›1 dans l’année ayant précédé l’inclusion. Au final, ont été inclus 5 689 sujets diabétiques traités pour hypothyroïdie et 59 937 sujets en euthyroïdie.
Des répercussions cliniques à évaluer
Avec 495 événements TSH basse relevés au cours du suivi chez les sujets en hypothyroïdie, l’incidence était de 119,7/1 000 personne-années. Dans le groupe en euthyroïdie, 322 événements de TSH basse ont été notés, correspondant à une incidence de 4,5/1 000 personne-années. La metformine majorait de 55 % ce risque par rapport aux sulfamides, principalement dans les 3 à 6 mois suivant l’introduction du traitement.
Le mécanisme physiopathologique mis en jeu n’est pas clairement établi. Plusieurs hypothèses sont évoquées. Ce pourrait être via un effet central au niveau de la régulation exercée par l’axe TRH-TSH, puisque la metformine inhibe l’AMPK hypothalamique, sans davantage de précision. Autre piste, la metformine pourrait modifier l’affinité du récepteur pour l’hormone thyroïdienne ainsi que de la force de liaison de l’hormone, sa biodisponibilité et son métabolisme, entraînant une activation du récepteur de la TSH.
Poursuivre les recherches
L’étude canadienne n’était pas en mesure d’évaluer les conséquences cliniques de la TSH basse induite par l metformine. Si une petite étude chez 23 sujets a montré l’absence de troubles rythmiques et d’anomalies à l’ECG, ces preuves limitées ne sont pas suffisantes. Compte tenu de l’incidence relativement élevée du phénomène, « il est impératif » de poursuivre les recherches sur les effets à court et à long termes de ce phénomène biochimique. Plusieurs questions pratiques attendent des réponses, concernant la nécessité de surveiller la TSH à l’institution du traitement et celle d’adapter les doses de L-thyroxine en cas de TSH basse.
CMAJ, publié le 22 septembre 2014
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