LES RÉSULTATS d'une étude internationale, impliquant notamment le laboratoire de Jacques Ravel à l'Institut pour la recherche en génomique (Tigr, Rockville, Maryland) et l'unité des Yersinia dirigée par Elisabeth Carniel, à l'Institut Pasteur (Paris), indiquent que le risque de voir émerger des souches du bacille de la peste multirésistantes aux antibiotiques est plus important qu'on ne le croyait. Ce phénomène pourrait en effet facilement intervenir par transfert horizontal d'ADN extra-chromosomique présent dans de très nombreuses souches de salmonelle ou d'autres entérobactéries pathogènes courantes.
Jusqu'ici, la seule souche de Yersinia pestis multirésistante jamais isolée l'a été en 1995, chez un patient malgache. Il est apparu que cette souche contenait un fragment d'ADN extra-chromosomique circulaire (un plasmide) lui conférant une résistance à au moins huit antibiotiques, parmi lesquels la streptomycine, la tétracycline, le chloramphénicol et les sulfamides.
Le plasmide de résistance.
Welch et coll. ont séquencé ce plasmide et l'ont comparé à ceux retrouvés dans d'autres bactéries multirésistantes. Il est alors apparu que le plasmide de résistance de Yersinia pestis est très similaire à ceux isolés dans certaines souches de Salmonella enterica et d'autres entéropathogènes. Des bactéries porteuses d'un plasmide pratiquement identique à celui isolé dans le bacille de la peste ont pu être isolées à partir de viande de boeuf, de poulet et de dinde destinée à la consommation humaine et vendue dans au moins neuf Etats américains.
Le haut degré de conservation nucléotidique des différents plasmides de résistance isolés indique que leur acquisition par les bactéries est récente. Elle passerait par des événements de transferts horizontaux.
Ces données suggèrent que des souches de Y.pestis actuellement sensibles aux antibiotiques pourraient assez facilement acquérir un plasmide de résistance à partir d'une bactérie courante telle qu'une salmonelle. Le transfert pourrait se faire indirectement, par l'intermédiaire d'une bactérie « passeuse », ou directement, dans un hôte mammifère commun ou dans le tractus digestif de la puce.
Selon Welch et coll., la probabilité qu'un tel événement se produise est suffisamment importante pour que des programmes de surveillance spécifique soient rapidement mis en place dans les régions où la peste est endémique.
Welch TJ et coll. « PLoS ONE », mars 2007.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature