« La mélanopsine est la principale protéine de l'oeil qui envoie le signal a l'horloge », résume, dans un communiqué, le Pr Steve Kay, du Scripps Research Institute (San Diego) qui a codirigé l'une des deux équipes. « Cette étude éclaircit le rôle que joue la mélanopsine dans le réglage et le maintien de l'horloge circadienne », déclare pour sa part, dans un autre communiqué, le Dr Bruce O'Hara, de l'université de Stanford (Californie), qui a codirigé l'autre équipe. On sait qu'une horloge circadienne centrale cérébrale, logée dans le noyau suprachiasmatique de l'hypothalamus, contrôle nos rythmes circadiens comme notre rythme d'activité/sommeil ou les oscillations, dans la journée, de notre température corporelle ou de notre tension artérielle. Cette horloge centrale est réajustée chaque jour sur le cycle lumière/obscurité de vingt-quatre heures qui nous entoure. Les personnes qui réajustent mal leur horloge interne souffrent souvent de troubles du sommeil. Ce réajustement intervient aussi pour adapter l'organisme après un changement de fuseau horaire.
Les photorécepteurs circadiens
Chez les mammifères, l'horloge centrale est réajustée par des photorécepteurs situés uniquement dans la rétine. Ces cellules spécialisées détectent la lumière grâce à un photopigment et envoient l'information au cerveau.
De nombreux chercheurs ont d'abord pensé que ce photopigment pouvait être la rhodopsine, qui est présente dans les bâtonnets et les cônes, les photorécepteurs rétiniens responsables de la vision.
L'exemple des non-voyants
Mais cette supposition était fausse puisque certaines personnes aveugles du fait de l'absence de cônes et de bâtonnets restent néanmoins capables de réajuster leur horloge interne. Il restait donc à découvrir les photorécepteurs, oculaires mais non visuels, qui règlent l'horloge interne. Récemment, il a été suggéré que la mélanopsine, codée par le gène Opn4, pourrait être un photopigment circadien chez les mammifères. Ce photopigment initialement découvert dans la peau des grenouilles, a ensuite été trouvé dans la rétine des grenouilles et des souris. Puis, il a été montré chez les mammifères que les cellules ganglionnaires rétiniennes qui contiennent la mélanopsine innervent directement le noyau suprachiasmatique.
Peau et rétine de grenouilles
Pour savoir si la mélanopsine intervient dans le réajustement de l'horloge circadienne, deux équipes indépendantes ont étudié la souris knock-out (K.O.), dont le gène Opn4 est altéré et ne produit plus la mélanopsine (souris Opn4-/-).
Ruby, O'Hara et coll. ont découvert que les souris K.O. privées de mélanopsine présentent une baisse de 40 % de leur faculté a réajuster leur horloge interne comparées a des souris normales. Ainsi, « bien que la mélanopsine ne soit pas indispensable pour que l'horloge circadienne reçoive l'information lumineuse, elle contribue grandement à l'ampleur des réponses à la lumière », concluent les chercheurs. Ils proposent que de multiples types de photorécepteurs rétiniens et photopigments contribuent à transmettre l'information lumineuse au système circadien.
« Il sera ardu de déterminer les contributions relatives de la mélanopsine, des opsines des cônes et bâtonnets, des cryptochromes et des autres photopigments non encore caractérisés, dans la transmission de l'information lumineuse au système circadien », estiment-ils. Panda, Kay, et coll. ont aussi constaté que les souris knock-out en mélanopsine ne présentent aucune anomalie des rythmes circadiens lorsqu'elles sont dans une totale obscurité, mais elles « montrent une sévère atténuation du réajustement de phase en réponse à de brèves impulsions de lumière ».
« Science » du 13 décembre 2002, pp. 2213 et 2211.
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