SUSPENSIONS DE SÉANCES, effets de manches, claquements de tribune, joutes oratoires tard dans la nuit sur des bancs clairsemés où les députés de la majorité UMP ont souvent fait défaut : sur la forme, le débat parlementaire sur le PLFSS 2008, dont le vote solennel en première lecture est prévu demain, n'a pas échappé aux lois du genre. Et c'est plutôt à un train de sénateur que les députés ont examiné ce texte, certes technique et complexe.
Mais la discussion de fond a eu lieu, dépassant le contenu des articles pour nourrir des débats sur le sort de la Sécu solidaire « à la française » ou l'accès aux soins (« le Quotidien » du 25 octobre).
Les élus de l'opposition, et le Nouveau Centre – membre de la majorité présidentielle mais critique sur ce budget de la Sécu – ont longuement questionné le gouvernement sur l'accumulation de la dette sociale, l'affectation des nouveaux déficits 2007 et 2008, et les «mauvais coups» à redouter l'an prochain sur la «TVA sociale, la CSG ou la CRDS». Les ministres et rapporteurs UMP ont défendu la thèse d'un projet de loi «fondateur» bousculant certains intérêts catégoriels ou conformismes en médecine de ville et à l'hôpital, posant des jalons sur les nouvelles recettes (taxation des stock-options avant d'examiner les niches sociales en 2008) ou répondant à de nouveaux besoins de financement (franchises médicales).
Sur la liberté d'installation, le gouvernement a revu sa copie pour débloquer la crise avec les internes (lire page 4).
Sélection des principales mesures adoptées vendredi soir – notamment pour la médecine de ville – alors que la discussion se poursuivait dans la nuit...
Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV)
En raison de crédits non consommés cette année du fait des difficultés de démarrage du DMP, la dotation 2007 du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) a été amputée de 70 millions. Le gouvernement et les rapporteurs UMP ont assuré que les missions du FAQSV (réseaux, maisons médicales, expérimentations...) ne seraient pas remises en cause.
Stabilisateurs automatiques
Cet article jugé «très important» par Roselyne Bachelot, mais dénoncé par la profession, crée un délai de carence de six mois (période d'observation des résultats de la maîtrise) avant d'appliquer des mesures de revalorisations décidées par la convention. Surtout, en cas d'alerte sur les dépenses maladie (et si le dépassement est imputable aux seuls médecins de ville), les mesures de revalorisation seront suspendues et reportées au 1er janvier de l'année suivante. Cette mesure de «bonne gestion», a expliqué la ministre, vise à «prévenir les risques de dépassement».
Roselyne Bachelot a réaffirmé que que le passage de la consultation généraliste de 22 à 23 euros serait «subordonné» au respect des objectifs de maîtrise médicalisée.
Contrats individuels
Ces nouveaux contrats à adhésion individuelle, conclus avec les caisses primaires, permettront aux médecins qui veulent «aller plus loin» de s'engager sur des objectifs de maîtrise médicalisée, de prévention ou de formation et d'être « récompensés » financièrement aux résultats (rémunération à la performance). «Vous introduisez un conventionnement individuel pour transformer les pratiques», a ironisé Jean-Marie Le Guen. «On reste dans la démarche conventionnelle», a objecté Roselyne Bachelot. Combien de médecins concernés par ces contrats en 2008 ? Nul ne le sait. La ministre a répondu qu'il s'agissait d'une démarche «volontaire».
Modes de rémunération
Le PLFSS propose d'expérimenter des modes de rémunération «alternatifs» ou complémentaire au paiement à l'acte pour les médecins volontaires (forfaits, capitation). Le gouvernement constate une «montée de cette demande» du côté de la jeune génération. Prévention, éducation sanitaire, coordination… : la ministre a cité plusieurs champs possibles pour ces expérimentations qui porteront sur les «soins primaires», donc impliqueront surtout des médecins généralistes (un décret précisera les modalités).
L'organisation et le financement de la PDS feront également l'objet d'expérimentations, en laissant plus de marge à l'échelon local (missions régionales de santé).
«Surprescripteurs» sous surveillance
Une procédure de mise sous entente préalable s'appliquait déjà aux transports sanitaires et aux arrêts de travail (par exemple, si le taux d'IJ d'un praticien atteint six à sept fois la moyenne régionale). Elle sera étendue à l'ensemble des domaines de prescription ainsi qu'à la réalisation d'examens complémentaires avec un seuil de déclenchement toujours élevé. Les syndicats voient dans cet article une entrave à la liberté de prescription.
Coût des médicaments
Un amendement du gouvernement incite les éditeurs de logiciels à intégrer l'affichage du coût de chacune des lignes médicamenteuses, au moment de la prescription. L'objectif est de susciter une «autorégulation» de la part du prescripteur.
Transports en taxi: remboursement conditionné
Un article conditionne le remboursement des frais de transport des malades en taxi à l'existence d'une convention préalable entre l'entreprise de taxi et la caisse locale assurance-maladie.
Tarifs: transparence accrue
Le PLFSS impose aux praticiens libéraux de préciser par écrit aux patients le tarif des actes «coûteux» (seuil à préciser par arrêté) ainsi que le montant du dépassement. Le refus de ces devis préalables sera sanctionné par les caisses. Un amendement d'Yves Bur, adopté contre l'avis du gouvernement, accroît encore l'exigence d'information écrite préalable sur les dépassements, y compris pour les actes légers.
Secteur II encadré
Un amendement des rapporteurs UMP Jean-Pierre Door et Yves Bur oblige les spécialistes du secteur II à pratiquer «une proportion minimale d'actes sans dépassements d'honoraires» (« le Quotidien » du 24 octobre) . La convention fixera les modalités de cette obligation qui vise à «garantir une offre à tarif opposable sur tout le territoire».
Secteur optionnel
Ce point ne fait pas partie du PLFSS. Mais, à l'occasion du débat, Roselyne Bachelot a précisé que ce sujet serait «au menu de la réflexion du premier semestre 2008» (sur le financement de la santé, le reste à charge) . Pas pour tout de suite, donc...
Haro sur le papier
L'UMP a fait adopter le principe d'une «contribution forfaitaire» pour le professionnels récalcitrants qui utilisent systématiquement les feuilles de soins papier. La convention décidera des modalités.
Délégation de tâches
Un amendement du gouvernement habilite les infirmières à effectuer des vaccinations sans prescription, notamment les rappels antigrippe (un décret fixera le champ et les modalités). La première injection devra continuer à être prescrite par le médecin.
Pour ceux qui s'intéressent de très près au débat parlementaire, les comptes rendus exhaustifs, instructifs, sont disponibles sur le site de l'Assemblée nationale : www.assemblee.nationale.fr
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