DANS les mélanomes localisés, l'épaisseur de la lésion et la présence ou l'absence d'ulcération constituent des facteurs pronostiques indépendants. Ils font partie des critères retenus par l'Ajcc (American Joint Committee on Cancer), avec des éléments cliniques et anatomopathologiques, pour établir la gradation des mélanomes.
La chirurgie d'une tumeur primitive a pour but d'ôter la tumeur et le tissu pouvant contenir des cellules malignes inapparentes, présentes dans les éléments lymphatiques. Jusqu'où doit aller le chirurgien en prenant en compte la sécurité carcinologique et les complications chirurgicales ?
La question de la marge chirurgicale reste posée et demeure l'objet d'investigations.
L'une d'entre elles est publiée dans le « New England Journal of Medicine », émanant d'une équipe londonienne (Meirion Thomas et coll.), qui a mené une étude randomisée sur des tumeurs de mauvais pronostic, de plus de 2 mm d'épaisseur.
L'étude a débuté en 1993. Ont été enrôlés 900 patients (dont un quart avaient une tumeur de plus de 4 mm d'épaisseur), qui ont été assignés à une ablation chirurgicale avec une marge d'excision autour de la lésion étroite (1 cm) ou large (3 cm).
Un risque de récidive.
Ils ont été suivis pendant 30 mois. A ce terme, les résultats montrent que la marge d'excision de 1 cm est associée à un risque de récidive locale et régionale significativement plus élevé que la marge de 3 cm : 168 récidives locorégionales dans le premier groupe, contre 142 dans le second (RR de 1,26, p = 0,05).
La survie totale est similaire dans les deux groupes (RR de décès de 1,07, p = 0,6), mais les mesures du risque relatif de survie favorisent le deuxième groupe, quand on tient compte des variables spécifiques à la tumeur : le nombre des décès attribuables au mélanome est de 128 dans le groupe 1 cm, contre 105 dans le groupe 3 cm (RR de 1,24 et p = 0,1).
S'il existe un risque de récidive locorégionale moins élevé en association avec une marge chirurgicale plus large, le taux de survie globale à cinq ans n'est pas amélioré.
L'étude de Thomas et coll. ne donne pas de réponse concernant la comparaison de marges de 2 cm et de 3 cm, font remarquer des commentateurs. Elle ne travaille pas non plus sur un autre paramètre très étudié, celui de l'envahissement ganglionnaire. Les patients de cette étude n'avaient pas d'adénopathie palpable et n'ont pas eu de dépistage portant sur les ganglions sentinelles, ni de lymphadénectomie régionale pour détecter des métastases occultes.
« Environ 15 % des patients présentant un mélanome primitif sans lymphadénopathie palpable (c'est-à-dire aux stades cliniques I ou II) ont une implication d'un ou plusieurs ganglions sentinelles (c'est-à-dire un stade III), lorsque l'on procède à un examen des ganglions après coloration par l'hématoxyline ou l'éosine. » Mais on ne sait pas encore si l'ablation de ces ganglions a un effet thérapeutique.
« New England Journal of Medicine », 350 ; 8, 19 février 2004, pp. 757-766 et commentaire, pp. 823-825.
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