RELATIVEMENT MAL LOTIE en matière de démographie médicale, la Lorraine a besoin d'étoffer les rangs de ses médecins dans ses secteurs les moins peuplés. La mission régionale de santé (MRS), qui réunit l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH) et l'Union régionale des caisses d'assurance-maladie (Urcam), a défini 28 zones éligibles aux aides à l'installation de médecins généralistes. Mais, qu'ils soient médecins ou administrateurs, tous les acteurs du dossier sont conscients que les aides financières ne suffiront pas à attirer de nouveaux médecins dans ces secteurs.
Reflet de la démographie et de l'économie régionale, les 28 zones concernées se situent principalement dans le nord de la Meuse et de Meurthe-et-Moselle (le « pays haut »), ainsi que dans le secteur de Lunéville et dans plusieurs cantons de l'ouest et de l'est des Vosges. Ces zones ont été définies en fonction de leur densité médicale, de l'activité des médecins qui s'y trouvent, mais aussi des difficultés particulières d'exercice qui s'y rencontrent et de leur éloignement par rapport aux services d'urgence et aux hôpitaux. En proportion, 5,4 % de la population lorraine réside dans ces zones qui recouvrent 313 communes.
Les médecins qui souhaiteront s'y installer bénéficieront notamment d'exonérations fiscales et d'aides à l'installation, matérielles et financières. Ceux qui feront le choix d'un fonctionnement en cabinet de groupe bénéficieront d'une rémunération supplémentaire de 20 %.
Prévues depuis 2005, ces mesures sont effectives depuis le début de cette année et devraient donc maintenant avoir des effets concrets : en 2006, rappelle le directeur de l'Urcam, Patrick Marx, «nous avions publié une première liste de zones, mais elle n'a pas entraîné d'installations». Aujourd'hui, en revanche, l'effectivité des mesures, et le fait que le dispositif soit mieux connu, «devraient permettre son démarrage», estime-t-il.
Toutefois, la MRS et l'union régionale des médecins libéraux de Lorraine (Urmll) admettent qu'il ne suffira pas de verser des aides pour redynamiser les secteurs concernés, alors même qu'il est urgent de trouver des solutions durables. Car dans la Meuse, par exemple, la plupart des médecins exerçant actuellement dans les zones « éligibles » ont plus de 55 ans, et plus de la moitié des médecins lorrains ont plus de 50 ans. Aujourd'hui, rappelle la MRS, il y a plus de 30 projets de « Maisons médicales » en Lorraine, dont certains ont déjà été concrétisés. Mais, note Antoine Perrin, directeur de l'ARH de Lorraine et de la MRS, les médecins veulent d'autres conditions de travail et d'autres conditions de vie, et le succès à long terme passe par ces évolutions.
La MRS et les médecins estiment qu'il faut aussi éviter que d'autres zones déjà fragilisées ne deviennent à leur tour des zones « éligibles », car il est plus simple d'intervenir avant que la situation n'empire. Pour cette raison, explique Patrick Françoise, ingénieur de santé à l'Urmll, les médecins actuellement installés souhaitent que des mesures progressives leur permettent de rompre leur isolement, avec par exemple des permanences téléphoniques communes ou des centres d'information. L'Urmll rappelle que beaucoup de médecins seraient prêts à conserver leur cabinet plus longtemps s'ils pouvaient être aidés et coopérer entre eux sur des bases originales: «De nombreux médecins isolés ne souhaitent pas passer du jour au lendemain à un cabinet de groupe, et on peut donc mettre en place des mesures plus souples», note Patrick Françoise. Ces évolutions « en douceur », qui se produisent déjà dans certains secteurs des Vosges, éviteront des cassures brutales lors du départ d'un médecin, et faciliteront le maintien des soins dans ces secteurs.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature