Pendant longtemps, la stratégie des établissements hospitaliers a été centrée sur le déploiement optimisé de l’offre de soins stricto sensus, oubliant que la fonction logistique pouvait contribuer également à maîtriser les dépenses. Mieux, quand elle est bien gérée, elle peut même améliorer la performance économique des hôpitaux. La crise économique et la volonté d’assainir la gestion de flux dans ces structures ont eu pour corollaire la nécessité d’y asseoir une bonne gestion de l’importante masse de ressources affectée à la logistique. Résultat : celle-ci fait l’objet d’une informatisation de plus en en plus croissante.
Gérer les approvisionnements
L’une des réalisations communautaires les plus significatives de ces dernières années est le projet Aurea, lancé par un groupe d’établissements hospitaliers en vue d’acquérir une solution mutualisée de gestion électronique des approvisionnements. Il s’agit là de l’une des fonctions de la chaîne logistique qui comprend plus généralement la gestion de flux de patients, de produits et matières, la collecte des prélèvements et des instruments sales, du linge, ainsi que leur distribution, etc. Depuis quelques années, les utilisateurs de ce pool se connectent en direct au portail Achatpro en vue de gérer leurs approvisionnements conformément à la réglementation, dans un environnement électronique sécurisé. Dans un contexte de tarification à l’activité (T2A) et de gestion par pôle, la solution d’e-procurement Aurea élargit le champ des possibles. Dans un laboratoire, par exemple, le technicien utilisateur a la possibilité de saisir ses demandes d’achats périodiquement, sur la base de ses besoins réels. La ligne budgétaire dédiée au financement est consultable en temps réel sur un portail dédié.
La gestion d’entrepôt du CHU de Dijon
Parmi les sites utilisateurs de cette solution, le CHU de Dijon se caractérise par une modernisation récente de son système d’information de la logistique. Outre Achatpro adopté il y a deux ans et utilisé également pour passer les commandes sur catalogue en interne, l’établissement a finalisé le déploiement de LM7 de Asis, solution de gestion d’entrepôt (Warehousing Management System ou WMS). Celle-ci prend en charge le suivi et la gestion des stocks, du mode de distribution de quantités fixes à dates variables, dérivé du kanban et des transports. Interfacées entre eux, ses différentes briques « nous ont permis de professionnaliser la chaîne logistique. Les fournitures arrivées sur notre plate-forme sont scannées et désormais livrées dans les unités de soins avec une meilleure traçabilité. Cette dernière est réalisée à partir du numéro de lot et la date de péremption du produit concerné », explique François Bisch, responsable de la logistique.
Le mode de distribution adopté permet d’en optimiser le processus. Selon le responsable de cette fonction, il réduit la quantité de stocks physiques présents dans les unités de soins. « Le fait de tracer les livraisons de petite quantité implique moins de pénurie », observe-t-il.
La gestion des stocks du CHU de Strasbourg
Dans le sillage du CHU de Dijon et plus antérieurement des hospices civils de Lyon, d’autres établissements sont poussés par l’exigence de traçabilité réglementaire et sa nécessité de gérer une masse de données croissante. Le CHU de Strasbourg est ainsi engagé dans le déploiement d’une solution informatisée de gestion de ses stocks. Les établissements qui veulent informatiser leur chaîne logistique se trouvent confrontés à une alternative : implémenter un progiciel de gestion intégré (PGI) ou une solution métier de Warehousing Management System (WMS). L’histoire récente semble davantage plaider pour la seconde approche, la première ayant échaudé plus d’un établissement de santé public. Les difficultés du CHU de Montpellier dans l’intégration d’un ERP pour sa partie logistique sont désormais de notoriété publique. Les HCL, qui ont intégré la plate-forme Oracle Applications, ont abandonné son exploitation pour la fonction logistique. L’exemple de l’AP-HP avec SAP manque de recul pour être passé au crible.
Les hôpitaux choisissent les WMS
À la lumière de ces différentes fortunes, les projets en cours font l’objet d’études approfondies et de visites de sites installés, avec l’objectif de minimiser les risques. Le CHU de Nantes s’inscrit dans cette démarche feutrée. Celle-ci est ponctuée d’un appel d’offres lancé au courant de cette année. « Nous avons reçu une quinzaine de réponses, preuve s’il en est, que le marché est dynamique et mature. Pour autant, il reste des efforts à faire du côté du segment des ERP, car leur mise en œuvre s’avère lourde, étant donné leur vision globalisante de la gestion de l’entreprise. Leur niveau de gestion opérationnelle des unités logistiques (de la palette au blister) laisse effectivement à désirer. Contrairement aux solutions métiers que sont les WMS qui proposent une gestion spécialisée et davantage de terrain dédié aux stocks », estime Blaise Nsimba, responsable des processus logistiques de distribution. En attendant de statuer sur le choix de l’outil à implémenter, le CHU de Nantes – qui compte vingt-deux sites dont quatre concentrent 85 % de son activité de logistique – a pris le soin de mettre en place au sein du pôle logistique un fonctionnement par processus complet, qui part de la gestion de l'information liée à l’achat, jusqu’à la distribution au service client destinataire. Un réingineering des organisations qui s’inscrit dans la logique de décloisonnement des achats et de la logistique afin de garantir aux utilisateurs du futur outil, une visibilité en amont et en aval sur l’ensemble du circuit des produits. Progressivement, les établissements hospitaliers informatisent leur fonction logistique. Les WMS semblent pour l’heure avoir leur préférence.
Le développement durable pour les CLCC
Du côté des centres de lutte contre le cancer, la modernisation de la logistique est également au programme.Et cela dans une optique communautaire qui a pour fondement l’optimisation des charges et la recherche d’économies d’échelle. L’ensemble des établissements français ont mis en place un groupement d’achats. Afin de permettre aux centres anticancéreux d’optimiser la gestion de leurs commandes dans ce nouveau contexte, le groupement d’achats est en train de mettre en place des procédures d’e-procurement.
Enfin, si la modernisation de la logistique hospitalière passe par l’intégration de solutions logicielles visant à optimiser les processus et à maîtriser les coûts, la problématique du développement durable s’invite à sa table. Et doit davantage être prise en compte au quotidien par toutes les structures, qu’elles soient de grands établissements publics ou privés. Dans cette perspective, soulignons le rôle important de la logistique que leurs responsables prennent à cœur. D’autant qu’ils n’ont pas attendu le Grenelle de l’Environnement pour mettre en place des stratégies de tri en aval et de respect de l’environnement dans leurs commandes (sélection de solutions respectant les normes définies, par exemple). Une étude réalisée par D-Link dans le domaine technologique (Green IT) montre d’ailleurs que le domaine de la santé est actuellement l’un des plus demandeurs de solutions technologiques respectant l’environnement. Il est situé devant l’administration et au coude-à-coude avec l’éducation. Dans ce contexte, l’enjeu pour les structures de soins est de disposer de matériels plus écologiques, sans pour autant dépenser plus ou perdre en performance. En fait, consentir le même tarif pour des produits écoresponsables. Décidément, la logistique est d’actualité, sous l’angle technologique, comme sur le plan écologique.
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