Une évolution chirurgicale majeure
Par le Dr Dan Alexandre Lebuisson*
Le premier appareil proposé sur le marché est l'IntraLaser FS. Cet appareil arrive en Europe et sera marqué CE en mai 2004. Ce système ophtalmologique acquis par deux cliniques parisiennes et bientôt par des centres hospitaliers ainsi que d'autres établissements est à la disposition des chirurgiens américains (70 machines en activité) depuis presque un an ; les résultats sont probants et font l'objet de présentations majeures au congrès de l'Ascrs de mai 2004. En chirurgie réfractive et aussi réparatrice, l'inconvénient principal du Lasik, aux yeux du public et de certains ophtalmologistes, est le recours pour la première étape à une découpe mécanique, quoique automatisée, du volet cornéen. Le laser Femtosecond permet de réaliser cette découpe uniquement au laser. Il s'agit d'un laser agissant en infrarouge (1 053 nm) et créant en unité femtoseconde des minispots espacés de 5 à 12 μ se rejoignant avec cavitation au sein du stroma cornéen. La progression du tir s'effectue à partir de la charnière et va vers la profondeur avec une précision telle que la déviation standard théorique n'est que de ± 4 μm pour une déviation clinique de 12 μ, ce qui est excellent, compte tenu du biais introduit par la précision pachymétrique, l'hydratation. Une fois focalisé au plan choisi, il se produit une rupture optique à basse énergie, sans effet thermique, ni de souffle, dans le plan lamellaire prédéterminé. Il n' y a pas d'ablation de tissu, mais séparation intralamellaire par création de bulles mixant de l'eau et du carbone dioxyde. Ensuite, le faisceau entame la découpe verticale du bord selon une entame très oblique. L'ensemble du protocole est sous le contrôle du programme informatique dont les données choisies par le chirurgien donnent le profil du traitement. La plasticité est grande et il est possible de positionner la charnière n'importe où, de choisir sa taille, de tailler un volet ovale, etc. Comme il n'y a plus de lames, beaucoup d'aléas mécaniques et de facteurs d'infection sont réduits au minimum. L'élément humain ne disparaît pas car il joue son rôle lors de la séparation du capot. Ainsi, la précision augmente car ce laser est reproductible et surtout programmable aussi bien en profondeur qu'en diamètre, ce qui n'est jamais aussi précis avec un microkératome.
Certes la dernière génération de ces microkératomes demeure de haute valeur et à fait disparaître bien des anomalies encore décrites dans les informations préalables au patient. Le champ de découpe Femtosecond en profondeur s'étend de 80 μ à 400 μ, voire plus, autorisant toute ablation au laser Excimer et même des greffes de cornée ou des exérèses localisées de tissu. L'indépendance de l'Intralaser de la courbure cornéenne ou de la forme de l'œil évite les surprises car le programme permet, comme en informatique, d'être un système Wysiwyg (What You See is What You Get). La surface du stroma est très lisse et celle du volet si régulière qu'il ne se produit ni plis ni ridules ou stries, contrairement à ce qui est fréquemment observé avec la découpe mécanique.
Le contact avec l'œil n'est pas supprimé car, pour éviter tout mouvement intempestif, un anneau de succion bloque le globe oculaire durant les quelques secondes du traitement, tout en permettant un aplatissement de la cornée offrant un plan parfait à la découpe du laser. Cet anneau est à usage unique, garantissant ainsi la stérilité. La forme du volet réduit les inconvénients résiduels des microkératomes : il n' y a plus d'altération épithéliale, de découpe irrégulière ou incomplète, de taille inattendue. La découpe est plana,r c'est-à-dire que la périphérie n'est plus ménisquée mais ici parallèle avec un bord droit ou angulé au mieux à 30°. En cas de perte de succion, il n'y a aucun risque de lacération, de trous ; l'épithélium demeure intact. La reprise peut être immédiate.
L'inconvénient de départ de ce laser était d'attendre entre les deux actions laser afin de laisser le temps de disparaître aux bulles de cavitation, mais nous savons depuis peu que cette précaution est inutile et que les deux actions peuvent se suivre à deux minutes d'intervalle. L'autre contrainte est de ne pas retrouver, à chaque fois, le côté spectaculaire de la guérison visuelle du Lasik conventionnel car la récupération visuelle est ici un peu plus lente, en raison d'un retour à la cornée normale demandant deux à trois jours, mais sans aucune douleur ou gène.
L'Intralaser est une machine d'avant-garde, fiable, aux réglages sophistiqués. Elle seule permet une procédure de kératomileusis (Lasik) qui soit tout laser. Il permet aussi de traiter avec un volet les cornées fines qui devaient jusqu'à maintenant faire l'objet d'une PKR ou d'un Lasek, voire d'un épi-Lasik. Comme pour tout acte invasif, la disparition de l'outil restérilisable constitue une avancée irrémédiable.
La modélisation de l'effet laser permet de traiter les kératocônes frustes, les déformations primitives ou secondaires de la cornée. La chirurgie lenticulaire obtient ici le mode de découpe idéal. Les indications ne sont qu'à leurs débuts tant le développement ne dépend que de l'affinement des logiciels. Des laboratoires français travaillent depuis longtemps sur le Femtoseconde, mais la transformation ne vient pas de chez nous et même le futur appareil allemand Femtek n'est pas encore utilisable hors expérimentation.
La méthode implique deux lasers et leurs périphériques à usage unique. Le coût va être amplifié, mais c'est le prix du progrès et de la sécurité. Le Lasik avec microkératome demeure excellent, mais le progrès exige chaque d'année d'employer la gamme complète des moyens techniques les plus performants.
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